En conflit ouvert avec François Hollande sur la question du nucléaire lors de la dernière présidentielle, Nicolas Sarkozy a réaffirmé le samedi 30 avril dernier, dans un entretien accordé au « Journal du dimanche », son intention d'abroger en cas de succès en 2017 l'objectif de réduction de la part de l'atome dans la production d'électricité. L'ancien chef de l'Etat considère en effet l'énergie nucléaire comme un élément déterminant du mix énergétique national, et juge cet objectif de réduction largement prématuré au regard des besoins de la transition énergétique.
La place du nucléaire dans le système énergétique français de demain devrait continuer d'occuper les débats lors de la prochaine campagne présidentielle. En effet, si le gouvernement actuel a bien légiféré dans la loi de transition énergétique sur la réduction de la part du nucléaire de 75 à 50 % du mix énergétique d'ici à 2025, cette mesure est loin de faire l'unanimité au sein de la classe politique française. Et devrait revenir sur le devant de la scène dès 2017.
Un clivage bien dessiné
Nicolas Sarkozy, candidat potentiel à la primaire Les Républicains (LR), a d'ores et déjà relancé la question en se prononçant la semaine dernière pour le maintien d'une énergie nucléaire forte et compétitive, et cela sans attendre le positionnement exact de son parti. « Il n'y aucune alternative crédible à l'énergie nucléaire » et de nouveaux investissements sont nécessaires « pour développer une nouvelle génération de centrales », a-t-il affirmé. Des déclarations, certes assez radicales, mais qui reflètent bien l'état d'esprit dominant chez les leaders politiques de droite.
Nathalie Kosciusko-Morizet, par exemple, estime dans le « Monde » que « fixer dans la loi des objectifs de réduction impératifs » entraînera la fermeture éventuelle de « centrales qui n'ont pas atteint leur échéance », et constitue donc une mesure « économiquement absurde ». François Fillon, autre candidate déclaré à la primaire LR, considère quant à lui l'énergie nucléaire comme « une carte importante » de la France pour lutter contre le réchauffement climatique.
Le gouvernement, empêtré dans le mouvement de contestation contre la loi Travail, semble lui-même assez mal à l'aise avec cette disposition et son application concrète. Outre la fermeture de la centrale de Fessenheim confirmée par François Hollande, aucune réduction effective des capacités de production nucléaire ne devrait donc avoir lieu avant 2019, voire 2020. Une façon en quelque sorte pour le gouvernement de se décharger et de passer ce dossier sensible à ses successeurs ?
Quoi qu’il en soit, si ces prises de position semblent assez logiques de la part des membres du premier parti d'opposition, elles révèlent surtout l'ampleur du clivage qui divise actuellement les dirigeants de notre pays. Les enjeux énergétiques et climatiques de demain nous imposent en effet d'engager une transition énergétique forte dans laquelle les énergies renouvelables devront jouer les premiers rôles aux côtés d'autres énergies de complément.
Un mix entre nucléaire et renouvelable
Les énergies renouvelables intermittentes solaire et éolienne restent toujours conditionnées aux aléas météorologiques et aux progrès technologiques dans le domaine du stockage de l'électricité, et ne peuvent pas à ce jour garantir un approvisionnement électrique stable à des prix compétitifs. L'énergie nucléaire offre en revanche une production d'électricité prévisible, bon marché et bas carbone. Profiter du parc nucléaire français pour accompagner la maturation technologique et l'émergence progressive des énergies renouvelables semble donc être la voie la plus logique dans le contexte actuel. Plus logique, en tous cas, que de développer l'exploitation controversée du gaz de schiste.
Plusieurs personnalités politiques de droite ont laissé jusqu'à présent la porte ouverte à l'exploration des sous-sols à la recherche de gaz de schiste (Alain Juppé ou Bruno Lemaire, par exemple, en opposition à Nathalie Kosciusko-Morizet). L'ancien président de la République, Nicolas Sarkozy, est même allé plus loin en se déclarant pour l'exploitation de ce gaz, après avoir interdit en 2011 la fracturation hydraulique, seule technique connue à ce jour pour exploiter les sous-sols… mais accusée de causer de graves dégâts environnementaux.
Un retour en arrière, en quelque sorte, extrêmement préjudiciable – pour l’environnement, d’abord, pour le climat, ensuite –, alors que la France a dirigé et mené à son terme la COP21 avec brio en décembre dernier. De son côté, EDF, premier électricien français et premier producteur d’énergies renouvelables en Europe, tente de militer pour un mix électrique bas carbone basé sur le nucléaire et les énergies vertes – hydraulique, éolien, solaire. Une « bonne équation », selon son PDG Jean-Bernard Lévy, qui permet de « dégager très peu d’énergies fossiles ». Et, par conséquent, de gaz à effet de serre.
19/11/24 à 15h53 GMT