Le numéro 87 de la lettre NAPA poursuit notre série sur la gouvernance des aires protégées en Afrique : cette fois-ci, ce sont des exemples illustrant la gouvernance étatique des aires protégées et les conclusions principales de l’étude conduite qui sont résumés. La lettre propose aussi plusieurs offres d’emploi…
Le numéro 87 de la lettre NAPA
Edito : Geoffroy MAUVAIS Coordinateur du Papaco
C comme crédibilité
La trente-neuvième session du Comité du Patrimoine Mondial aura lieu à la fin de ce mois, à compter du 28 juin, à Bonn, en Allemagne. Ce Comité est composé de 21 pays élus lors de l’assemblée générale de l’UNESCO pour s’occuper spécifiquement du patrimoine mondial. Il est plus ou moins représentatif des différentes régions du monde (deux pays pour l’Afrique actuellement).
La notion de patrimoine de l’Humanité est une idée généreuse. Elle est née dans la douleur dans les années 50 lorsqu’il fallut sauver des eaux les temples situés à Abou Simbel et Philae en Egypte. La construction du barrage d’Assouan les menaçait en effet de submersion et il fut jugé opportun d’unir toutes les énergies pour les déplacer et ainsi les préserver pour toujours. De là s’est développée l’idée de préserver pour les générations futures les joyaux de notre monde, fussent-ils des créations de l’homme ou de la nature. Consacrée dans la convention de 1972, cette philosophie a permis d’inscrire de nombreux sites naturels (près de 200 au total aujourd’hui) dont la plupart des grands parcs emblématiques d’Afrique.
Les voilà donc sauvés pour toujours ? Et bien non !
Si l’Afrique compte actuellement 37 biens naturels inscrits sur cette liste, 14 sont par ailleurs incorporés dans celle des sites dits « en péril » (soit près de 40% des sites africains), c’est à dire
qu’ils sont menacés de perdre les valeurs pour lesquels on les célèbre. Hormis quelques situations d’insécurité flagrante, la plupart des cas est liée à des carences de gouvernance et/ou de gestion qui perdurent au fil du temps. Donc de défis qui sont à la portée des gestionnaires de ces territoires pour peu que les Etats qui les abritent le veuillent vraiment. Et pourtant, certains sites sont en péril depuis plus de 20 ans ! Ils font alors l’objet d’un suivi dit « réactif », chaque année : une mission organisée sur place pour mesurer les progrès vers le retour à une situation contrôlée, jusqu’à ce que le bien puisse enfin quitter la liste en péril. Et tous les ans, dans des rapports devenus aussi volumineux qu’inutiles, on félicite imman- quablement l’Etat du travail (qu’il n’a pas) fait et on lui demande à nouveau de faire (ce qu’il ne fera pas).
Le Comité recevra ces rapports, les discutera probablement, fera sans doute quelques observations et s’empressera de ne rien décider ; l’histoire continuera ainsi. En 2002, pourtant, l’UNESCO avait ajouté un C à sa stratégie qui en comptait déjà 3 (capacités, conservation et communication) : le C de crédibilité. Cette crédibilité, c’est la capacité de la liste à ne garder que les sites qui méritent vraiment le label, pas ceux qui n’en ont pas les qualités, pas ceux qui les ont perdues ou encore pas ceux qui s’en moquent. Cette crédibilité, c’est aussi la capacité de l’UICN à faire entendre sa voix de conseil auprès de la convention, pas seulement grâce à des avis tièdes, mais au travers de décisions qui vont dans le bon sens. Cette crédibilité, c’est enfin la reconstruction d’une liste de sites qui montrent la voie à tous les autres parcs, réserves et autres lieux de conservation et non pas un amas de souvenirs diffus d’un monde désormais perdu.
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