Afidégnigban fait partie de ces villages côtiers du Togo, qui donneront tout aujourd’hui pour un retour à une ambiance antérieure, à la vie d’avant. Sa plage autrefois bondée de monde, ne représente plus qu’un désert vue de loin. Sur le reste du périmètre encore épargné pour le moment, on y trouve des maisons abandonnées, complètement détruites ; une situation causée par l’avancée de la mer. Il faut dire que le Togo connait les conséquences directes des changements climatiques. Le fléau a orchestré un exode urbain sur toute la côte togolaise.
En quarante ans, le niveau de la mer a considérablement augmenté, en engloutissant près d’une douzaine de villages. Les quelques riverains restés pour s’accrocher à leur patrimoine familial, n’ont presque plus de vie. Pêcheurs par le passé, ils se retrouvent face à eux même, sans un avenir prometteur ; puisque les eaux sont aujourd’hui remplies de débris d’habitations emportées et de déchets de tout genre. Même les deux premières routes nationales numéro 2 reliant Lomé à Aného – ville tricentenaire, ancienne capitale du Togo – n’ont pu résister à la force des eaux.
Les seuls objets encore visibles sur les plages sont des cocotiers quasiment déracinés, des fragments d’habitations rongées par les eaux, des puits d’eau datant de près de 40 ans et des pirogues, condamnées à un repos éternel. Ici, les meilleurs moments font désormais partie du lointain passé. Selon des habitants, les vagues de la mer débordent pendant la nuit et s’emparent du reste des habitations, déjà à moitié détruites. Les bruits de ces vagues les obligent d’ailleurs à se priver de sommeil, à « cogiter sur le sort que l’avenir leur réserve », comme ça se dit par ici.
La plage d’Afidégnigban permet de se rendre au village voisin, Agbavi où la situation est identique. À une trentaine de minutes à pied le long de la côte partant d’Agbavi, se situe un autre village complètement englouti par les eaux : Akpagli. Ici, certains riverains sont restés malgré la recrudescence du phénomène. Pour eux, il n’est pas question de quitter leur terre natale. Ils se mobilisent d’ailleurs à lutter contre la montée des eaux à leur manière. À l’initiative de certains cadres de la localité plutôt engagés pour la sauvegarde de la côte, les villageois construisent deux catégories d’ouvrages de protection.
Le 1er ouvrage consiste à construire des amas de pierres perpendiculaires à la mer, plongeant dans les eaux pour créer un ensablement. Le second est constitué de plusieurs puits accolés, parallèles à la côte avec pour but de mettre en place un brise lame, afin d’atténuer l’énergie des vagues, les empêcher d’aller plus loin. L’initiative rassemble près d’une dizaine de villageois qui sont d’ailleurs payés. « Nous les payons pour les inciter à s’engager et les aider à pouvoir joindre les deux bouts, sachant qu’ils n’ont plus d’activité génératrice de revenus» nous a laissé entendre l’un des initiateurs de ce projet.
Le Togo perd peu à peu les lignes de sa côte, chaque fois que le phénomène s’accroit. Les dommages sont d’ailleurs considérables dans les villages longeant la côte, et même à Aného - ville située à 45 km au Sud-Est de Lomé, où les habitants vivent avec la peur au ventre de voir leurs habitations dévastées du jour au lendemain par les vagues. Chaque année, 7 à 15 mètres de rivage sur la côte en Pays Guin disparaîtraient. Dédé Ahoéfa Ekoué, ancienne Ministre de l’Environnement indiquait à l’occasion d’une réunion de concertation des pays francophones les moins avancés sur l’adaptation aux changements climatiques, organisée à Lomé en Mars 2013, que « La perte des terres rurales le long de la côte entre le port et Agbodrafo (sur 30 km de long environ) sera estimée entre 480 et 720 ha d’ici 2030 ».
Selon le site d’information et de statistiques sur les populations et les pays du monde «populationdata.net», des dizaines, voire des centaines de millions de personnes seraient menacées par la montée des eaux. Le niveau des mers devrait aussi monter d’au moins 50 cm, voire plus, selon les régions, d’ici à 2070. Une raison, d’accélérer les processus de protection et de sauvegarde des côtes, même si certains pensent que le processus de changements climatiques, généré par les activités humaines, ne peut être renversé.
Photo : Les puits en construction pour attenuer l'avanceé des eaux.
https://www.populationdata.net : Graeme VILLERET : « Montée des eaux : des dizaines de millions de personnes menacées », publié le 14 Novembre 2016, consulté le 24 Octobre 2017.
http://www.jeuneafrique.com : Edmond D’Almeida : « Changement climatique : au Togo, SOS villes côtières en danger », publié le 4 Novembre 2015, consulté le 2 Novembre 2017.
http://www.republicoftogo.com : « Menace sur nos côtes », publié le 18 Mars 2013, consulté le 2 Novembre 2017.
L'initiative jeunesse de lutte contre les changements climatiques a pour objectif de sensibiliser les jeunes francophones aux changements climatiques. Elle permet également de faire connaître les actions et l’engagement de la jeunesse francophone pour lutter contre les changements climatiques sous la forme d’une série d’articles.
[IJLCC] [CdP23-climat]
22/10/24 à 11h20 GMT