Les campagnols, ces petits rongeurs herbivores, sont connus pour leurs cycles de populations : tous les 3 à 5 ans, celles-ci atteignent des pics vertigineux – jusqu’à 200 fois le nombre habituel d’individus. Une équipe franco-britannique composée de chercheurs de l’Institut méditerranéen de biodiversité et d'écologie marine et continentale – IMBE (CNRS/Aix-Marseille Université/Univ. d’Avignon/IRD) et du Centre d'Ecologie Fonctionnelle et Evolutive – CEFE (CNRS/Univ. Montpellier 1,2 et 3/Supagro Montpellier/EPHE/Cirad) vient de montrer que l’effondrement de ces pics depuis une dizaine d’années a des conséquences directes sur la reproduction de la chouette hulotte, l’un des prédateurs du campagnol.
Le campagnol du genre Microtus, un petit herbivore qui peuple les plaines agricoles et les clairières forestières du nord au sud de l’Europe, constitue le met de prédilection de nombreux mammifères et rapaces (renards, chats sauvages, mais aussi chouettes, busards, faucons crécerelles...). Des chercheurs européens ont émis l'hypothèse que l’effondrement des pics de populations de campagnols, avéré depuis une dizaine d’années, n’était pas sans conséquences sur ces prédateurs. « Pour le vérifier, nous avons analysé un jeu de données démographiques exceptionnel constitué sur la population de chouettes hulotte de la forêt de Kielder, dans le nord de l’Angleterre - soit 3000 individus bagués sur 30 années d’observation » raconte Alexandre Millon, enseignant-chercheur à l’Institut méditerranéen de biodiversité et d'écologie marine et continentale (IMBE).
En comparant les données démographiques de la chouette hulotte à celles du campagnol, les chercheurs ont pu établir un lien direct entre effondrement des cycles de campagnols au printemps et reproduction du rapace. « Les années à campagnols, près de 90% des couples de chouettes hulottes se reproduisent. Les mauvaises années, seul un tiers des couples ont une progéniture » indique le biologiste, qui précise que la taille de la population de chouettes hulottes reste stable pour le moment – du fait de la longévité de ces rapaces (jusqu’à 20 ans) et d’une immigration soutenue.
Les chercheurs sont plus soucieux pour l’avenir : les divers scénarios élaborés montrent que si la raréfaction des pics de campagnols se confirmait, elle pourrait entraîner une diminution des populations de chouettes hulottes et d’autres prédateurs spécialistes des campagnols. « Au minimum, cela impliquera une profonde réorganisation de la chaîne alimentaire », remarque Alexandre Millon.
Source : CNRS
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