Si la lutte contre les déchets plastiques a de plus en plus d’échos en Afrique, le recours aux sacs plastiques notamment reste ancré dans les mœurs… aux dépends de l’environnement, voire de la santé des populations, sans que tout le monde n’en ait vraiment conscience. Voilà pourquoi la Banque africaine de développement tire la sonnette d’alarme et a décidé, cette année, de célébrer la Journée mondiale de l’environnement qui a pour thème « Combattre la pollution plastique » en 2018.
Afin de marquer les esprits, la Banque a organisé, en son siège à Abidjan, diverses actions d’information et de sensibilisation au cours de la semaine.
« Non au Plastique » : une Journée célébrée… tout une semaine
Le coup d’envoi des activités a été donné dès le lundi 4 juin, avec une exposition d’objets artisanaux à base de plastique recyclé, présentée en partenariat avec la Fondation Magic System.
Le jour même de la célébration de la Journée mondiale de l’environnement, le mardi 5 juin, une table-ronde a réuni, en présence du vice-président principal de la Banque africaine de développement Charles Boamah et sous la houlette d’Anthony Nyong, directeur chargé du Changement climatique et de la croissance verte à la Banque, des représentants du ministère ivoirien de l’Environnement et de l’ONU Environnement, ainsi que des experts. Le thème qui a rythmé les débats était des plus pragmatiques : « Solutions pratiques pour réduire la pollution plastique en Afrique ».
Les mœurs et les habitudes de consommation doivent changer. Le constat est sans appel, au vu des chiffres alarmants brandis lors de la table-ronde (voir encadré). Dans le monde, ce sont ainsi 500 milliards de sacs en plastique qui sont utilisés chaque année et près de 1 million de bouteilles en plastique achetées chaque minute. Surtout, la moitié de tout le plastique que nous utilisons est à usage unique, et se transforme donc vite en déchets. Des déchets qui viennent polluer nos rivières et nos océans et menacer la vie marine, boucher les conduits d’assainissement et d’évacuation des eaux dans nos villes, envahir les zones de pâturage…
Ces dix dernières années, de plus en plus conscients et soucieux du problème, plusieurs municipalités et pays en Afrique ont décidé d’interdire les sacs plastiques. Ainsi du Rwanda, de l’Afrique du Sud, de la Tanzanie, du Sénégal, du Kenya, du Togo, de la Mauritanie ou de la Côte d’Ivoire… Avec plus ou moins de succès, toutefois. « En Côte d’Ivoire, un décret d’interdiction du sachet plastique est en vigueur depuis 2013, a rappelé Omer Kamelan, conseiller technique au ministre ivoirien de l’Environnement. Or les plastiques sont toujours en circulation, parce que les habitudes ne peuvent pas être changées du jour au lendemain ». Difficile aussi, a-t-il ajouté, de lutter contre la production clandestine et le secteur informel. Mais au nom de son ministère, Omer Kamelan a assuré : « Loin d’abdiquer, nous avons en perspective de lancer une vaste campagne de communication et de sensibilisation, de créer une police de l’environnement, de lancer un système de contrôle et de répression et surtout d’harmoniser les mesures d’interdiction au niveau communautaire, car certains pays limitrophes n’adoptent pas les mêmes mesures que nous ».
« Le plastique, réutilisez-le ou refusez-le ! »
Les mesures de lutte doivent tout autant cibler les professionnels du secteur que le grand public, les usagers du quotidien. « L’éducation doit commencer à la maison. Il faut une véritable campagne de sensibilisation, intégrer le sujet dans les programmes scolaires », a insisté Angele Luh, chef du Bureau ONU Environnement en Côte d’Ivoire. Et Anthony Nyong, directeur chargé du changement climatique et de la croissance verte à la Banque africaine de développement, d’abonder dans le même sens : « Nous devons éduquer et sensibiliser les gens sur les dangers de l’usage du plastique ». « À la Banque, nous avons pris des engagements pour combattre la pollution plastique, nous avons mis en place du matériel de récupération des déchets, et installé des poubelles partout et des fontaines. Le changement commence par soi-même », a-t-il ajouté.
Le directeur du département du changement climatique et de la croissance verte a tenu à en faire la démonstration lors du Conseil d‘administration qui, le 6 juin, réunissait les gouverneurs de la Banque à Abidjan. Après leur avoir exposé, chiffres et exemples à l’appui, l’étendue des dégâts que cause le plastique en Afrique et offert à chacun d’eux une gourde réutilisable aux couleurs de la Banque pour les inciter à éviter les bouteilles d’eau jetables, Anthony Nyong les a enjoints à signer le tableau blanc numérique apporté pour l’occasion, comme preuve de leur engagement dans cette lutte. Plusieurs de représentants des pays membres de la Banque ont applaudi l’initiative.
Le plastique à usage unique est celui qui cause le plus de dégâts. À condition de le recycler, le plastique peut trouver de multiples usages. La valorisation des déchets est même une filière prometteuse aujourd’hui. « Nous travaillons avec le secteur privé pour leur faire comprendre que les déchets peuvent être transformés en profits, a indiqué Anthony Nyong. Il faut qu’il se rendre compte de cette opportunité ». Angele Luh a renchéri, appelant à créer les conditions propices pour que la filière se développe : « Il faut mettre en place le cadre qui fasse en sorte que les entreprises qui se lancent dans la valorisation ou le recyclage du plastique ne se disent pas qu’elles y perdent ».
Montrer l’exemple : opération nettoyage de plage avec des bénévoles de la Banque
Point d’orgue de cette semaine activiste en faveur de l’environnement, et en écho également à la Journée mondiale des océans, célébrée le 8 juin, une grande opération de nettoyage de plage à Grand-Bassam, à une quarantaine de kilomètres d’Abidjan. Site historique classé au patrimoine de l’Unesco, Grand-Bassam est célèbre également pour ses plages bordées de cocotiers… qui, hélas, par endroits, sont souillées de déchets.
Soucieuse de montrer l’exemple, la Banque africaine de développement a donc organisé une grande journée de nettoyage de la plage samedi 9 juin, enrôlant de nombreux membres du personnel comme bénévoles. L’initiative bénéficie notamment de l’appui de la municipalité de Grand-Bassam, du ministère ivoirien de l’Environnement, de la Fondation Magic System et de l’ambassade de l’Inde – pays d’où l’ONU a lancé, cette année, la campagne internationale de lutte contre la pollution plastique. Outre une compétition par équipes pour nettoyer dans un esprit ludique, la campagne est l’occasion de prodiguer des conseils pédagogiques.
Communiqué de la BAD (1053 hits)