Dans le cadre de sa série de séminaires, l’IDEP a abrité une table ronde sur le thème « L’Afrique est-elle prête pour investir dans une industrie verte ? ». Ce séminaire a regroupé plus d’une vingtaine d’experts africains : des fonctionnaires des Etats membres réunis à l’occasion du programme de renforcement de capacités sur les politiques industrielles, ainsi que des universitaires travaillant sur des questions relatives au développement industriel du continent. La table ronde s’est tenue le 26 juin 2018 dans la salle de conférences de l’IDEP.
Le séminaire a été meublé par deux présentations portant sur « L’importance d’une industrialisation verte : enjeux cruciaux, opportunités et défis » et « L’Afrique est-elle prête pour investir dans une industrie verte ? » respectivement délivrées par Dr. Adetunji Babatunde, Université d’Ibadan (Nigeria) et Dr. Karima Bounemra Ben Soltane, Directrice de l’IDEP, suivies d’une discussion très riche.
La présentation introductive, par Dr. Babatunde, a permis de camper le sujet tandis que la présentation de Dr. Ben Soltane a tenter de donner des éléments de réponse à la question de savoir si l’Afrique est prête pour une industrie verte.
Selon Dr. Babatunde, l’histoire montre que l’industrialisation conduit à la transformation structurelle. Cependant pour se lancer dans une trajectoire de développement durable, les combustibles fossiles devront céder la place aux énergies renouvelables en Afrique, ajoute-il. De l’avis de certains participants, pour réussir un saut qualitatif vers le développement durable, le continent africain n’a pas le choix. Elle devra s’industrialiser davantage mais surtout le faire en respectant les normes écologiques, progressivement, tout en créant pour sa population, des opportunités d’emplois verts dans l’agriculture, le secteur manufacturier et les énergies propres. Il y a, bien sûr, des concessions à faire et il existe bel et bien des gains significatifs pour l’Afrique de développer une économie verte.
Les innovations technologiques diminuent considérablement les coûts des énergies renouvelables et permettent de réaliser des économies d’échelle. Selon Dr Ben Soltane, des pays comme le Rwanda, le Nigeria et le Kenya l’avaient déjà compris lorsqu’ils se sont lancés, il y a quelques années, respectivement, dans l’utilisation des TIC pour le développement, l’industrie cinématographique (Nollywood) et le transfert d’argent par mobile (M-Pesa).
L’intérêt d’écologiser l’industrie africaine est qu’à long terme : (1) des économies de coûts pourront être réaliser, (2) un développement résilient est garanti avec des activités industrielles faiblement polluantes ; (3) la croissance sera inclusive.
Si l’on fait un léger bilan économique du continent, on observera que malgré les performances économiques relativement bonnes, des problèmes persistent encore à savoir : les moteurs de sa croissance, encore non inclusive, manquent de diversification, les taux de pauvreté et les inégalités restent élevés, le marché de l’emploi évolue peu avec un secteur informel qui continue d’y avoir une trop grande part, les risques environnementaux fragilisent le développement. “Tout cela montre la pertinence de l’engagement des dirigeants africains à réexaminer l'industrialisation de l'Afrique, avec comme objectif qu’elle soit verte”, souligne Dr. Karima Bounemra Ben Soltane, Directrice de l’IDEP.
Selon elle, une réponse à priori est que l’Afrique se prépare pour une industrialisation verte, mais est-ce qu’elle est prête, la réponse ne serait pas très précise vue que la majorité de ses pays ont envisagé des actions isolées mais n’ont pas mis en place de véritables plans de développement d’une industrie verte ou intégré dans leur planification nationale. Un autre défi serait celui des capacités techniques relatives à la prise de conscience et à la mise en place effective d’une stratégie d’industrialisation verte, ajoute-t-elle.
Pourtant le moment est propice pour se lancer dans une industrialisation verte, vues les conclusions de la conférence sur le financement du développement, la signature des accords de libre-échange africaine (#AfCFTA), les opportunités offertes par les agendas 2030 et 2063. L’Afrique du Sud, le Malawi, l’Île Maurice, la Côte d’Ivoire et l’Ethiopie ont déjà mis en place des initiatives vertes dans les domaines de l’énergie renouvelable, la production du bioéthanol, l’écologisation des chaînes de valeurs agro-industrielles, l’économie bleue, la création de parcs éco-industriel.
Un impératif pour la réussite de l’industrialisation verte est la présence d’un leadership visionnaire solide et l’existence des capacités au niveau des gouvernements pour impulser le changement. L’IDEP continuera à jouer son rôle de formateur des cadres africains dans le domaine du développement industriel du continent, et notamment encourager l’industrialisation verte, précise la Directrice.
Communiqué de l'ONU (782 hits)