L'influence des É.-U. dans ce domaine dépendra de ce qu'ils font pour réduire leur consommation de carburants, estiment des spécialistes.
Par Andrzej Zwaniecki
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Washington - La forte hausse du cours du pétrole a des effets aussi bien positifs que négatifs. La consommation de carburants a diminué dans tous les pays industriels. On s'attend à ce que la diminution de la consommation soit la plus forte depuis vingt-cinq ans aux États-Unis car les Américains conduisent moins. C'est là une bonne nouvelle.
La mauvaise nouvelle, c'est que ces économies d'énergie sont plus que compensées par l'augmentation de la consommation de carburants dans les pays en développement.
Entre le premier trimestre de 2007 et celui de 2008, la demande de pétrole dans les pays industriels membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a baissé de 1 million de barils par jour, alors qu'elle a augmenté de 1,1 million de barils dans le reste du monde, a indiqué le Fonds monétaire international (FMI).
Cette augmentation est due en grande partie à la forte expansion économique de pays tels que la Chine et l'Inde. Toutefois, près d'une cinquantaine d'États accroissent la demande de pétrole en subventionnant les carburants, c'est-à-dire en offrant des avantages fiscaux qui permettent aux sociétés pétrolières et aux raffineries de réduire ou supprimer l'écart entre le cours mondial du pétrole et les prix moindres fixés par les pouvoirs publics. Selon la société pétrolière BP, les pays qui ont des subventions dans ce domaine ont contribué pour 96 % à l'augmentation mondiale de la consommation de pétrole en 2007.
Les économistes estiment que ces subventions ont un effet de distorsion sur le marché mondial du pétrole car elles occultent l'augmentation des cours. Les entreprises et les consommateurs n'ont aucune incitation à faire des économies d'énergie lorsqu'ils n'ont pas à payer plus pour l'achat de carburants.
D'après Mme Michelle Foss, qui est à la tête du Centre d'économie énergétique de l'université du Texas à Austin, les subventions constituent le risque principal pour le marché pétrolier. " Si on ne peut pas équilibrer les forces du marché, rien ne va fonctionner ", a-t-elle dit à America.gov.
Les pays en développement défendent les subventions en déclarant que c'est un moyen de favoriser l'industrialisation et de protéger les catégories les plus pauvres de la population contre la hausse mondiale du cours du pétrole. En revanche, la plupart des économistes disent que ces subventions profitent surtout aux consommateurs les plus riches et, fait encore plus important, qu'elles entravent souvent le développement en détournant l'argent d'emplois plus productifs et en empêchant un meilleur rendement énergétique.
En raison de la hausse du cours du pétrole, les subventions ponctionnent les finances publiques. Le FMI prévoit que l'Égypte et l'Indonésie, entre autres, consacreront en 2008 environ 5 % de leur produit intérieur brut aux subventions consacrées aux carburants.
Face à ces coûts croissants, plusieurs États, dont la Chine, l'Inde, Taïwan, la Malaisie et l'Indonésie, ont réduit leurs subventions. Bien que ces mesures n'aient pas été assez importantes pour diminuer fortement la demande, elles ont cependant entraîné une réaction brutale et des manifestations. Certains États qui craignent de plus amples répercussions et une forte augmentation de l'inflation se sont abstenus de prendre de nouvelles mesures.
Selon un haut responsable du ministère américain des finances, M. David McCormick, il convient que les pays élaborent un plan en vue de supprimer progressivement les subventions.
Pour sa part, Mme Foss s'est déclarée d'avis que l'adoption de plans crédibles par les grands États qui subventionnaient les carburants pourrait avoir pour effet de réduire le cours du pétrole. Elle a cependant ajouté que les États-Unis et d'autres pays industriels avaient peu d'influence sur ces États.
D'autres spécialistes estiment que les États-Unis ne sont guère en mesure de dire à d'autres pays ce qu'il convient de faire dans ce domaine, étant donné qu'ils sont le plus grand consommateur de pétrole du monde, même s'ils ne subventionnent pas les carburants.
Les États-Unis peuvent donner l'exemple
Jusque récemment les Américains figuraient parmi les consommateurs les moins économes de pétrole. Si l'Union européenne a augmenté ses taxes sur les carburants et découragé l'usage des véhicules automobiles de diverses façons, le gouvernement et les parlementaires des États-Unis ont été peu disposés à " affronter " les automobilistes et les constructeurs d'automobiles américains habitués à des carburants bon marché, a fait remarquer un spécialiste du secteur de l'énergie, M. Steve Andrews. Ce n'est qu'en 2007 que le Congrès a rendu plus strictes les normes en matière de consommation d'essence des automobiles.
En Chine, les ventes d'automobiles augmentent rapidement, en particulier les véhicules utilitaires de sport qui consomment beaucoup d'essence. L'Inde prévoit aussi d'augmenter considérablement son parc automobile. Toutefois, ces deux pays, qui devraient contribuer à augmenter fortement la demande de pétrole à l'avenir, ont adopté des normes plus strictes que celles des États-Unis en matière de consommation d'essence, a indiqué un spécialiste de l'énergie du Massachusetts Institute of Technology, M. John Deutch.
Les États-Unis collaborent avec la Chine et d'autres pays en développement dans le cadre du Partenariat Asie-Pacifique sur le développement propre et sur le climat. Ce partenariat qui intéresse les secteurs public et privé a déjà donné naissance à de nombreux projets concrets en matière de rendement énergétique.
Toutefois, les États-Unis risquent ne pas pouvoir convaincre la Chine ou d'autres pays à changer leur comportement s'ils ne donnent pas eux-mêmes l'exemple. Ils peuvent le faire notamment en investissant davantage en vue de l'adoption d'innovations dans le secteur automobile, a déclaré à America.gov Dan Rosen, de l'Institut Peterson d'économie internationale.
Il est tout à fait possible, a-t-il dit, de réduire la consommation d'essence de l'automobile moyenne pour la faire passer à 4,7 litres aux 100 kilomètres alors que la loi en vigueur prévoit de ne la faire passer qu'à 6,7 litres aux 100 kilomètres en 2020.
Pour sa part, M. McCormick s'est déclaré optimiste quant à la possibilité que les États-Unis relèvent ce défi. " Les Américains, a-t-il dit, doivent faire ce qu'ils ont toujours fait, à savoir s'adapter, innover, persévérer et réussir. "
Source : Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat.
Site Internet : http://www.america.gov/fr/