Depuis un certain temps l’actualité agricole en général et celle cotonnière en particulier s’est emballée au Burkina Faso suite à une décision prise par l’AICB d’imposer aux cotonculteurs la production du coton 100% conventionnel et donc l’abandon du coton Bt au cours de la campagne qui démarre bientôt.
On s’y attendait depuis quelques temps avec l’effervescence qui s’est emparée des milieux associatifs paysans. En effet, début avril, les professionnels de la culture annonçaient péremptoirement la rupture de leur contrat avec la firme Monsanto qui fournissait les semences aux producteurs. Le mercredi six avril le conseil des ministres entérinait cette décision à la grande surprise générale. Quand on sait que la filière fait vivre plus de 3 millions de personnes au Burkina et que sa contribution dans le PIB est de l’ordre de 4%, on ne peut que se demander si toutes les mesures idoines ont été prise pour éviter un clash dans la filière. Déjà que l’on constate une morosité de l’économie, un choc de plus dans la filière n’épargnera pas les vaillantes populations Burkinabè. La raison pour laquelle cette décision a été prise est que le Burkina perd de l’argent dans la vente du coton depuis 2011 et que cela serait dû au fait que la fibre s’est raccourcie entre temps et toutes les tentatives de la firme pour y remédier se sont avérées pour le moment vaines. Sans vouloir rentrer dans la polémique de l’opportunité ou pas de cette décision, plusieurs observations peuvent être faites relatives à la filière cotonnière en général et les conséquences éventuelles d’ordre environnemental, social et économique que cette décision de retour au coton conventionnel devra engendrer.
On le sait tous, la culture du coton conventionnel exige l’usage de très grandes quantités de pesticides. Un retour à cette variété de coton sans dispositions particulières prises fait peser sur l’environnement un risque énorme d’extinction de quantité d’espèces d’insectes et donc la remise en cause même de la biodiversité et de l’équilibre écologique déjà très précaire dans notre pays. Au plan économique, le Burkina Faso est aujourd’hui le premier producteur de coton en Afrique avec plus de 700 000 tonnes. Le risque majeur, c’est de n’avoir pas anticipé sur la décision en procédant à une réelle préparation des mentalités au niveau du monde paysan. Le risque de désaffection de la filière lié à l’augmentation des dépenses chez les paysans dans un contexte de rareté des ressources est très élevé. au plan social, en l'absence d'une autre spéculation qui soit à même d'apporter autant de devises aux paysans, il est à craindre une répercussion sur la qualité de vie des paysans. Aujourd'hui les zones de production cotonnière sont également celles qui approvisionnent le reste du pays en vivres. Si les cotonculteurs sont privés d'engrais suite à l'abandon de la filière, l'une des conséquences de cette pénurie serait l'impossibilité pour eux de cultiver par expemple du mais. Le premier corrolaire de la pauvreté qui en résulterait serait l'impact sur le taux de scolarisation qui pourrait réculer si les paysans n'ont plus de quoi soutenir l'école des enfants. En tout état de cause, il est indispensable que des concertations soient menées maintenant pour rassurer les uns et les autres.
11/12/24 à 13h46 GMT