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La forêt dans tous ses états: une belle récolte et des enseignements pour Rio + 20



  •  source: Synapse

    La forêt dans tous ses états: Une belle récolte et des enseignements pour Rio + 20

    A l'occasion de l'Année internationale des forêts, le Carrefour des acteurs sociaux a organisé, le 18 novembre 2011, à l'Institut de Paléontologie humaine (Fondation Prince Albert Ier de Monaco) à Paris, sous le parrainage des ministères français chargés de l'écologie et de l'agriculture, avec le soutien de l'Institut de l'énergie et de l'environnement de la francophonie (Organisation internationale de la francophonie) et de l'Office national des forêts (France), un colloque intitulé " La forêt dans tous ses états ". Ce colloque était dédié à la mémoire de Wangari Maathai, Prix Nobel de la Paix 2004, surnommée  " la femme des arbres " pour les 30 millions d'arbres qu'elle avait fait planter en Afrique.

    Tout au long de la journée, animée par les journalistes Antoine de Ravignan d'Alternatives économiques et Danielle Nocher de Valeurs vertes,  les orateurs se sont succédés à la tribune devant un public nombreux et attentif. Comme il a, en effet, été rappelé dans l'introduction, les choix de gestion forestière sont aussi des choix de société qui nous engagent tous.

    Après une mise en perspective par Marc Galochet, géographe, qui a présenté la forêt comme un espace ambivalent entre ressource et patrimoine né de la rencontre entre la nature et la société, les auditeurs ont pu entendre un témoignage du Prince Jean d'Orléans, propriétaire forestier, qui a évoqué son rapport personnel avec la forêt jugée par lui comme un maître pour l'action, tant la forêt incarne par elle-même toutes les qualités attendues d'un roi juste et sage. Lui faisant écho, alors qu'il était invité à décrire le modèle français de gestion forestière, Michel Hermeline, de l'Office national des forêts (ONF), citant les trois piliers économique, social et environnemental du développement durable auxquels la forêt française,  tant publique que privée, apporte une égale contribution, a fait remarquer que la conduite " soustenable " des bois demandée par un édit de Philippe VI de Valois ressemblait furieusement au " sustainable development " réclamé par la Conférence de Rio en 1992. Rappelant que la forêt française s'étend aussi à l'outre mer, Bernard Riéra, chercheur du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) au Muséum national d'histoire naturelle (MNHN), chargé de mission " Forêt tropicale " au GIP Ecofor, a enchaîné ensuite par une description de la forêt guyanaise, certes peu exploitée, mais d'une diversité phénoménale en raison des mécanismes naturels de régénération et de la diversité des milieux sur lesquels elle croît. Cette forêt représente une biomasse exceptionnelle et un important site de stockage du carbone. Il revenait dès lors de confronter ce modèle français avec la politique mise en oeuvre par l'Union européenne, ce qui fut fait grâce à l'intervention de Paul Speight, adjoint au chef de l'unité " agriculture forêts sols " de la direction générale de l'environnement à la Commission européenne. Entre les forêts industrielles de l'Europe du Nord, les forêts récréatives de Grande-Bretagne et de Belgique et les forêts réserves de l'Europe de l'Est, l'Union européenne n'a pas adopté, à la différence de l'agriculture et de la pêche, de politique forestière commune mais l'orateur s'est attaché à décrire les différentes politiques sectorielles qui concernent ou prennent en compte la forêt.

    Mais que faire quand la forêt a déjà disparu sous l'effet conjugué de la déforestation due à l'agriculture et à l'urbanisme et de la dégradation consécutive aux incendies ou à une mauvaise gestion? La restauration reste possible comme l'a démontré, à travers plusieurs exemples, Daniel Vallauri, du WWF, président du groupe " forêt " de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), en insistant sur le fait que la restauration d'une forêt ne passe pas seulement par des plantations nouvelles mais aussi par la régénération naturelle et surtout une bonne coopération des populations locales. Quant aux forêts existantes, elles peuvent être valorisées par une sylviculture à couvert et proche de la nature, telle qu'elle est ressortie du plaidoyer convaincant de Brice de Turckheim, expert forestier, premier président de Pro Sylva Europe, pour lequel l'individu (la belle tige) prime sur la surface (le traitement unifié de la parcelle).

    Remplaçant au pied levé Pierre Radanne, ancien président de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) mandaté par l'Institut de l'énergie et de l'environnement de la francophonie (IEPF) mais souffrant, Bernard Riéra et Daniel Vallauri ont abordé les enjeux internationaux de la forêt à travers le programme de réduction des émissions de gaz à effet de serre dus à la déforestation et à la dégradation des forêts (REDD+) examinée lors de la Conférence de Copenhague en 2009. En dépit d'une approche divergente entre les pays développés et ceux en développement, il s'agit aujourd'hui de l'initiative la plus avancée dans la lutte contre le  réchauffement climatique. Autre enjeu majeur, celui de l'accès aux ressources génétiques et du partage des avantages définis l'an passé par le protocole de Nagoya. Il revenait à Claudio Chiarolla, chercheur à l'Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI), dans une dernière communication, d'en expliquer le contenu et les modalités, destinés à ce que le profit retiré par les laboratoires des pays riches à partir des ressources prélevées dans les forêts des pays pauvres, à des fins de recherche, soit partagé équitablement entre les deux parties.

    A l'issue de cette journée, quels sont les enseignements qui peuvent être tirés des réflexions apportées et qui pourraient utilement être prises en comptes lors de la Conférence Rio + 20 organisée en juin 2012 pour le 20ème anniversaire du Sommet de la Terre de 1992? Cinq recommandations sont proposées.

    -        La gestion multifonctionnelle des forêts, prenant en compte à la fois les dimensions économique, sociale et environnementale de leur exploitation, est la plus à même, dans la plupart des cas, de répondre tant aux besoins du marché qu'à ceux des populations locales, tout en faisant bénéficier des services rendus par la forêt à l'environnement.

    -        Les usages nobles de la forêt doivent être privilégiés sur tout autre, afin de retirer une plus grande valeur ajoutée de son exploitation tout en garantissant une utilisation maximale de ses différentes fonctions : considérant que, par principe, le bois mérite mieux que de partir en fumée, le bois énergie, qui constitue effectivement une bonne alternative aux énergies fossiles, ne doit être exploitée à cette fin qu'en l'absence de tout autre usage plus valorisant.

    -        Les trois conventions issues du Sommet de la Terre sur le réchauffement climatique, la diversité biologique et la lutte contre la désertification font porter une responsabilité particulière aux forêts: dès lors, il importe de prévenir la déforestation et, quand celle-ci n'a pu être évitée, d'encourager la reforestation par des programmes respectant les cycles naturels et impliquant les acteurs locaux.

    -        Les programmes de reforestation doivent, compte tenu de leur contribution à la lutte contre les conséquences des émissions de gaz à effet de serre, s'inscrire, le plus souvent possible, dans le cadre du mécanisme de développement propre du Protocole de Kyoto, générateur, par ailleurs, d'un véritable partenariat entre le Nord et le Sud.

    -        Les effets planétaires de la gestion forestière militent pour l'adoption, à l'échelle mondiale, d'une politique forestière intégrée, seule garante de la prise en compte des différentes fonctions complémentaires des forêts et qui pourrait constituer un modèle de bonne gouvernance mondiale du développement durable.

    Contributeur: Carrefour des acteurs sociaux (CAS)

    103, avenue Parmentier 75011 PARIS (FRANCE)
    dircas@cas-france.org

    Rédacteur: Patrice VERMEULEN
    Coordonnateur du pôle " environnement " du CAS
    patrice.vermeulen@developpement-durable.gouv.fr

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