Les causes de la fonte des glaciers tropicaux sur les 10 000 dernières
années sont enfin dévoilées par une équipe de chercheurs français* du
CNRS, du CEA, de l'IRD, de l'Université Joseph Fourrier et un chercheur
américain de l'Université d'Albany. Ils ont montré que le recul du
glacier Telata en Bolivie sur cette période est avant tout lié à une
hausse de température atmosphérique de 3°C et au réchauffement de
l'océan Pacifique tropical en réponse à une augmentation de
l'insolation.
Les travaux ont été publiés le 09 juin 2011 sur le site de la revue Nature.
Dans
l'imaginaire collectif, parler de glaciers sous les Tropiques semble
contradictoire. Pourtant, il existe bel et bien des glaciers tropicaux,
dans les Andes principalement. Pour identifier les causes du recul de
ces glaciers, la connaissance de leur histoire récente est nécessaire.
L'équipe
de chercheurs a étudié l'un des glaciers de haute altitude de la
Cordillère Royale de Bolivie : le Telata. Les moraines (roches déposées
par le glacier témoignant de ses positions antérieures) du Telata, très
bien conservées et en grand nombre, rendent ce site unique sous les
Tropiques. Elles offrent en effet un enregistrement quasi continu des
stades glaciaires successifs. Datées en mesurant dans les roches la
concentration d'éléments, elles permettent de reconstituer, pour la
première fois, l'histoire du glacier au cours de l'Holocène,
c'est-à-dire sur les 10 000 dernières années. Pendant cette période, la
surface du glacier a diminué et son front a reculé de 3 km. Ce recul
glaciaire, d'abord lent, s'est accéléré depuis le début du 19e siècle,
avec 2 km de recul de 1820 à aujourd'hui.
Les chercheurs des
différents laboratoires se sont penchés sur le lien pouvant exister
entre le volume glaciaire et les valeurs du couple
température/précipitation qui prévalaient pour différentes positions
passées du glacier. Les calculs montrent que le recul du glacier est
avant tout lié à un réchauffement des températures d'environ 3°C sur
l'ensemble de l'Holocène. L'augmentation très progressive de la quantité
de rayonnement solaire reçue à la surface terrestre a eu des
répercussions sur la température de surface de l'Océan Pacifique
tropical et sur le climat à proximité du glacier. L'augmentation de la
température modifie le comportement du glacier et explique de son recul.
En revanche, les simulations numériques avec des modèles de climat
montrent que les précipitations n'auraient pas varié de façon
suffisamment importante depuis 10 000 ans pour influencer l'évolution du
glacier.
C'est la première fois qu'une étude montre que la fonte
de ces glaciers au cours de l'Holocène était étroitement liée aux
variations des températures de surface de l'Océan Pacifique tropical.
Cette étude confirme donc le caractère exceptionnel de la fonte rapide,
observée depuis le début de l'ère industrielle. Cette fonte, depuis
1820, n'est pas liée aux variations d'insolation mais à d'autres
mécanismes. Ces travaux montrent aussi combien les glaciers tropicaux,
situés à haute altitude, là où le réchauffement prévu pour le 21e siècle
devrait être le plus élevé (4 à 5°C dans le cas de la région du
Telata), seront extrêmement vulnérables au cours des prochaines
décennies.
* Laboratoire de géographie physique "Pierre
BIROT" (LGP-CNRS, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne/UPEC/INRAP),
Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement
(LSCE-CNRS/CEA/UVSQ), Laboratoire de glaciologie et géophysique de
l'environnement (LGGE-CNRS/UJF GRENOBLE 1), Laboratoire d'Océanographie
et du Climat : Expérimentations et Approches Numériques
(LOCEAN-CNRS/IRD/MNHN/UPMC), Institut des sciences de l'évolution de
Montpellier (ISEM-CNRS/IRD/Université MONTPELLIER 2), Centre de
recherches pétrographiques et géochimiques (CRPG-CNRS/Université Henri
Poincaré Nancy 1/INPL Nancy), Laboratoire d'étude des transferts en
hydrologie et environnement (LTHE-CNRS/UJF GRENOBLE
1/INPG/IRD/CEMAGREF).
Source : Institut de Recherche pour le Développement (IRD)
Retrouver l'information sur le site de l'IRD (663 hits)
Le communiqué de presse du CNRS et de l'IRD (593 hits)
Le site de la revue Nature (694 hits)
06/05/24 à 12h32 GMT