Cette dépêche a été co-rédigée avec Monique Henry du CEGEP de St-Laurent (Québec).
Les propriétés organoleptiques de l'eau font référence à la sensation, bonne ou mauvaise, que le consommateur peut ressentir en buvant de l'eau. Les paramètres organoleptiques sont ceux que le consommateur perçoit immédiatement : la couleur, l'odeur ou la saveur. On exclut ici la turbidité (ou son inverse, la limpidité) qui fait partie de cette liste et qu'on regardera de plus près dans une dépêche ultérieure.
Si on confond les termes goût et saveur, tout en soulignant que la flaveur combine un ensemble de sensations liées particulièrement à l'odeur, au goût et au nerf trijumeau, on se doit d'insister sur le fait que la réglementation actuelle, en France, au Canada ou ailleurs, fixe des seuils pour les paramètres organoleptiques.
Concrètement, l'eau doit avoir une couleur, une odeur et une saveur acceptables pour les consommateurs selon la réglementation française. On rejoint ici les normes de l'Organisation Mondiale de la Santé pour les eaux de boissons distribuées. Dans la réglementation française, qui transpose la Directive européenne sur l'eau potable, on retrouve aussi une note sur le chlore (libre et total) qui demande à ce qu'il y ait absence d'odeur ou de saveur désagréable.
Ces paramètres, dont la dégradation doit alerter sur la qualité de l'eau distribuée, sont mesurés via des méthodes normalisées et sont donc quantifiables. C'est le cas en France pour la couleur, l'odeur et la flaveur. Pour les deux derniers paramètres, on évalue un seuil, rapport au-delà duquel l'échantillon dilué ne présente plus aucune odeur ou flaveur perceptible.
Tandis que la couleur se mesure en laboratoire par colorimétrie ou photométrie, les seuils d'odeur et de flaveur sont déterminés quantitativement par un jury, qui fait la comparaison entre un échantillon dilué ou pas avec une eau de référence. Ce panel, formé à ce type de mesures, est habituellement constitué des personnels du distributeur d'eau. Ce dernier peut aussi faire appel à des clients, formés de la même manière, qui peuvent ainsi constituer des vigiles de l'eau sur le terrain. Au-delà, les plaintes et leur traitement peuvent jouer ce rôle d'alerte sur la qualité de l'eau.
Comme le soulignait Hippocrate, médecin et philosophe grec, qui a vécu il y a plus de 2400 ans, il y a une relation entre la qualité de l'eau consommée et l'état de santé des populations. Evidemment, à son époque, ce sont sûrement les paramètres organoleptiques qui servaient en bonne partie de références de qualité.
Actuellement comme avant, les types d'odeur ou de goût perçus peuvent être qualifiés suivant différents descripteurs. Pour les goûts/saveurs, on s'entend pour en définir à minima 4 types : salé, sucré, amer et acide. Quant aux odeurs, on ne sera pas surpris de retrouver les odeurs de chlore, d'oeufs pourris, d'hydrocarbures,... Souvent la nature de ces goûts et odeurs nous suggère les composés, présents dans l'eau, qui les génèrent.
Les propriétés organoleptiques peuvent être altérées par des substances naturelles ou non. D'autre part, certaines substances peuvent donner un goût à l'eau sans qu'il y ait d'odeur et/ou de couleur perceptible et vice-versa. Pour simplifier, plusieurs composés inorganiques sont en cause ; le chlore, le sulfure d'hydrogène, le fer,... Pour les composés organiques, on pense aux alcools, aux esters, aux composés aromatiques,... Par exemple, les acides humiques et fulviques, issus de la décomposition des matières végétales, colorent naturellement l'eau, de jaune à brun, causant d'énormes soucis aux producteurs d'eau du Limousin (France) ou de la Beauce québécoise.
Les régies et délégataires n'ont pas tellement le choix lorsqu'ils sont confrontés à des paramètres organoleptiques dégradés dans leurs eaux brutes : ils se doivent d'éliminer les substances en cause, via des traitements plus ou moins poussés. Au-delà des traitements classiques, l'oxydation à l'ozone ou au bioxyde de chlore et la filtration sur charbon actif apparaissent relativement efficaces vis-à-vis des composés visés, particulièrement les composés organiques.
Enfin, quand l'eau traitée convenablement arrive malgré tout au robinet avec des problèmes, car le réseau de distribution peut aussi contribuer à la dégradation, quelques conseils pratiques peuvent être donnés aux utilisateurs. Par exemple, l'odeur de chlore s'élimine facilement en laissant reposer l'eau quelques heures dans un récipient (propre) au réfrigérateur. Une vidange des conduites, avant consommation de l'eau, particulièrement le matin, pourra éviter d'éventuels désagréments d'eau colorée, turbide ou trop chargée en minéraux. D'ailleurs, certains phénomènes sont plus perceptibles à l'eau chaude. Pour finir, il faut savoir que certaines populations sont plus sensibles que d'autres aux désagréments engendrés.
Le suivi des paramètres organoleptiques n'est donc pas à négliger. Ils font toujours partie de ces éléments que le consommateur suit de près et la collectivité, qu'elle soit en régie ou en délégation, se doit d'en tenir compte.
[TECHEAUA]
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12/12/24 à 10h17 GMT