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Eau

   

TECHNIQUES = Le pH en chimie des eaux



  • Cette dépêche a été co-rédigée avec Monique Henry du CEGEP de St-Laurent (Québec)

     

    Le pH est la mesure de la concentration des ions H+ ou plutôt de leur activité, c'est-à-dire leur concentration "efficace", fonction de la force ionique et donc de tous les ions présents :

    pH = - log (H+)

     

    L'échelle est logarithmique et la lettre "p" correspond à une fonction mathématique :

     "-log10 (X)" que l'on peut retrouver dans pOH = - log(OH-) ou pCa = - log(Ca2+)...

     

    Le pH ne mesure que les ions réellement présents - du fait de la dissociation d'un acide, par exemple et non pas les ions "en puissance"; ainsi :

     

    Pour une solution HCl 0,01 M (acide fort, complètement dissocié) : pH = 2

    Pour une solution CH3COOH 0,01 M (acide faible, peu dissocié) : pH =  3,9

     

    Du fait de l'équilibre de dissociation de l'eau les concentrations des ions H+ et OH- sont reliées :

    (H+) (OH-) = Kw = 10-14     ou      pH  + pOH  = 14    à 25°C

     

    Comme les constantes d'équilibre K varient avec la température, le pH aussi. Quand on prélève un échantillon quelconque, il faut d'ailleurs le mesurer sur place.

     

    Le pH-mètre comporte 2 électrodes : la référence est souvent incorporée dans le boîtier. Il faut étalonner l'appareil avec soin, généralement avec 2 solutions tampons stables. Il faut surtout adopter un mode opératoire précis pour avoir des résultats reproductibles - en particulier avec les eaux naturelles; par exemple, on plonge l'électrode rincée à l'aide d'un jet d'eau distillée dans l'échantillon, on agite doucement, on attend une valeur stable - ce qui  peut prendre plusieurs minutes (temps que l'on peut fixer); on arrête d'agiter et on fait la lecture 30 secondes plus tard.

    Certaines eaux sont bien "tamponnées" et la mesure est plus rapide (comme avec les solutions tampons).

    Dans les stations de traitement des eaux, on devrait avoir un tel mode opératoire afin que les différents opérateurs en arrivent à des valeurs comparables puisque ce sont surtout les variations du pH qui sont importantes. L'idéal est d'ailleurs de faire la mesure sur l'eau courante.

    À  souligner aussi l'importance de l'entretien régulier de l'électrode : nettoyage doux hebdomadaire (solution savonneuse puis trempage en milieu acide dilué 30 minutes), conservation en milieu humide (solution d'entreposage ou tampon mais pas d'eau distillée...), vérification de la pente (100% ± 15% au grand maximum), de la vitesse de réponse et... changement au bout de un an ou deux tout au plus, et quelques mois pour les solutions tampons! On ne lit jamais assez les recommandations des fournisseurs!

     

    En chimie, le pH de 7 est considéré comme "neutre" puisque la solution contient alors autant d'ions H+ que d'ions OH-: les solutions de pH inférieur sont acides, celles de pH>7 sont basiques.

    Pour les eaux naturelles (faiblement colorées), les phénomènes sont plus complexes...L'acidité est due à la présence de gaz carbonique, acide faible résultant de la dissolution du CO2 atmosphérique et de la respiration. En solution, cet acide se dissocie (faiblement) selon :

     

    CO2  +  H2O  <----->   HCO3- +  H+    avec pKa = 6,35 (à 25°C)

     

    On peut vérifier que pour une solution pure de CO2 10-3 M (44 mg/L), le pH vaut :

    ½ pKa - ½ log C = ½ (6,35 + 3) = 4,7

    Et pour une solution 10-2 M, pH = 4,2

    On considère donc le pH de 4,5 comme une valeur moyenne pour une eau ne contenant que du CO2, avec quelques ions H+ et quelques ions HCO3- provenant de la faible dissociation de " H2CO3 " - en fait, (CO2 + H2O).

     

    Si on neutralise cet acide par addition progressive d'une base comme NaOH (ce qui permet aussi de déterminer l'acidité), au point équivalent, on a formé une solution pure de bicarbonate de sodium (base faible) dont le pH vaut environ 8,3 :

     

                                                              CO2  + NaOH  -----> Na+  +  HCO3-

     

    De la même façon que toutes les eaux naturelles contiennent (plus ou moins) du CO2, elles contiennent aussi toutes (plus ou moins) des ions bicarbonates HCO3-  qui sont faiblement  basiques... et qui sont la base conjuguée du gaz carbonique :

     

    CO2  + H2O  <-----> HCO3-  +  H+

     

    Ka = (HCO3-) (H+)

         CO2

     

    C'est d'ailleurs ce qui explique qu'un acide et une base conjugués peuvent coexister : ils participent au même équilibre.

    C'est la raison pour laquelle on dit qu'une eau naturelle possède à la fois, une certaine acidité (due au CO2) et une certaine alcalinité (due aux bicarbonates)

     

    Et c'est aussi la raison pour laquelle le pH : 7 n'est plus la borne intéressante dans le cas des eaux naturelles; leur pH peut varier de 4,5 à 8,3 - en fait, surtout de 6 à 8,3 environ - selon leur acidité et leur alcalinité. Par contre, du fait de l'équilibre précédant, quand 2 de ces 3 paramètres sont connus, le troisième l'est automatiquement. La valeur de la constante Ka doit être corrigée en fonction de la température et de la force ionique (généralement estimée à partir de la conductivité).

     

    Le pH joue un rôle primordial dans les propriétés et le traitement des eaux : il influence l'agressivité, les processus biologiques, l'efficacité de la coagulation, de la chloration...

    - La coagulation est efficace à un pH relativement précis selon le type de coagulant et les caractéristiques de l'eau : de nombreux exploitants se fient à ce pH pour optimiser (avec succès) la coagulation-floculation. De plus, les dérivés de l'aluminium et du fer utilisés sont des sels acides qui abaissent le pH de l'eau ainsi traitée... Les fournisseurs proposent d'ailleurs toute une gamme de coagulants moins acides (par comparaison au sulfate d'aluminium), la dose requise étant parfois limitée par la faible alcalinité de l'eau.

    - Rappelons que les eaux agressives sont les eaux acides, riches en gaz carbonique; on doit généralement remonter leur pH pour les amener à l'équilibre. Par contre, les eaux de pH élevés, alcalines tendent à être incrustantes.

    - On a aussi déjà souligné dans ces dépêches que l'addition de chlore gazeux tend à diminuer le pH alors que l'eau de Javel tend à l'augmenter... et surtout que l'efficacité du chlore diminue quand le pH augmente, en particulier au-dessus de 8.

    - La déphosphatation chimique est un autre exemple de l'influence du pH : la précipitation se fait au mieux à un pH précis selon qu'on utilise un sel de fer, d'aluminium ou de la chaux. L'élimination des métaux par précipitation sélective est aussi étroitement liée au pH. Souvent, l'ajustement du pH est le seul traitement préliminaire exigé des industries avant le rejet à l'égout.

    - Enfin, les microorganismes travaillent dans des limites assez étroites de pH et celui-ci doit être surveillé dans tous les traitements biologiques.

    - Par contre, on ne peut parler de pluies "acides" - contaminées par des acides forts comme l'acide nitrique ou l'acide sulfurique - que si leur pH est inférieur à 4,5 - 5.

     

    Tous ces exemples illustrent l'importance du rôle du pH et pourquoi on le mesure plusieurs fois par jour! Fort heureusement, les électrodes des procédés s'améliorent constamment, devenant plus résistantes, plus fiables et permettant un suivi en continu aux divers stades du traitement.

     

     

     

    [TECHEAUA]

     

     

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