Dans une tribune adressée au "Monde" publiée le 28 août, scientifiques, mécènes et philanthropes internationaux défendent une « alliance innovante et équitable pour une santé globale » entre la société civile et la recherche.
Cette tribune a été rédigée à la suite du séminaire « Santé pour tous en 2030 » tenu les 18 et 19 juin 2018 au centre des Pensières à Veyrier du lac, à l’initiative du Professeur Jean-Paul Moatti, Président-directeur général de l’IRD et de Benoît Miribel, Président du Centre Français des Fonds et Fondations (CFF) et directeur général de la fondation Mérieux.
"Face aux changements globaux, la santé planétaire est un défi crucial. Les inégalités d’accès aux soins accroissent les risques infectieux émergents et obèrent la capacité des pays du Sud à faire face au fardeau croissant des maladies chroniques. 70 % des maladies émergentes ou réémergentes graves sont favorisées par des déséquilibres écologiques et/ou climatiques. La clé de l’avenir sanitaire de notre planète et de ses habitants se trouve dans une approche interdisciplinaire « one health » de la formation, l’expertise, la recherche et l’innovation, en partenariat international équitable et inclusif.
Pour relever ce défi, les pays de la zone intertropicale et méditerranéenne souffrent cruellement de l’absence de système de santé universel efficace, soutenu par un mécanisme universel d’assurance maladie et par un nombre suffisant de personnel de santé qualifié. De la même façon, ces pays manquent de chercheurs pour anticiper, prévenir, innover, atténuer et s’adapter. L’Afrique ne compte par exemple que 2,3% des chercheurs du monde et contribue à moins de 2 % du total des publications scientifiques.
L’aide est aujourd’hui fragmentée, maladie par maladie, et se fond dans des mécanismes administratifs trop souvent éloignés du terrain. Depuis 2013, les investissements en santé globale stagnent. Cela menace la pérennité des progrès accomplis ces quinze dernières années et compromet la réalisation de l’objectif onusien de « bonne santé et bien-être ». Même si les fondations, des Etats-Unis notamment, consacrent des sommes importantes à l’atteinte des Objectifs de Développement Durable (ODD), l’investissement consenti est encore loin d’atteindre le niveau nécessaire.
La situation est pourtant favorable : la France veille à ce que les investissements privés soient porteurs de développement, dans le respect de la « loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et entreprises donneuses d'ordre » de mars 2017. Par ailleurs, les règles de la territorialité du don ont rendu, depuis mai 2017, éligibles au mécénat hors frontières européennes les bourses d’études et les activités de recherche. Ces efforts notables restent insuffisants au regard des enjeux et risques sanitaires auxquels nos sociétés font et feront face.
Dans la perspective de la 73ème Assemblée Générale des Nations Unies qui s’ouvrira le 18 septembre à New-York, durant laquelle seront notamment évalués les progrès vers l’Objectif de Développement Durable (ODD), nous, scientifiques, philanthropes, mécènes, lançons ensemble un appel à nos confrères, présidents et dirigeants de fondations, d’organisations non gouvernementales, d’universités et d’établissements de recherche, responsables politiques, pour :
- Créer des centres et plateformes scientifiques dédiés au développement durable dans toutes ses dimensions d’adaptation au changement climatique et autres changements environnementaux mais aussi de réduction de la pauvreté et d’amélioration de la santé (via la généralisation de la couverture santé universelle), à l’image du Conseil Africain de la Recherche promu par le Président de la République Française dans son discours de Ouagadougou (novembre 2017) et inspiré du mécanisme de Conseil Européen de la Recherche (ERC) qui a fait ses preuves depuis 2007 ;
- Investir dans la formation des personnels médicaux, l’autonomisation et la pérennisation des équipes d’enseignement et de recherche en santé globale, en particulier des jeunes chercheurs, par exemple avec un programme de renforcement des capacités du type « One Health Fellowship » ;
- Développer dans l’éducation de tous les jeunes, et en particulier des jeunes filles, la connaissance et la compréhension des comportements et actions de prévention et de promotion de la santé ;
- Promouvoir l’approche communautaire et le partenariat avec les acteurs clés de la société civile afin de répondre au mieux aux besoins de santé globale, dans le respect des diversités culturelles et de la dignité de chacun.
Nous nous mobilisons aujourd’hui pour que des avancées concrètes soient décidées lors du 2nd One Planet Summit, dans la lignée du sommet tenu à Paris l’année précédente, et de la session de reconstitution des ressources du Fonds mondial à Paris en 2019."
Source : IRD
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06/05/24 à 12h32 GMT