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Initiation socioculturelle : des jeunes Kapsiki bravent le rituel %u2018'Gwela'' au village Mogodé (nord-Cameroun)



  • À Mogodé (Extrême-Nord du Cameroun), ce n’est pas qui veut qui obtient le statut d’initié mais qui peut. À cet effet, à longueur de décennie, les jeunes sont appelés à montrer patte blanche pour accéder au cercle des personnes matures et mériter ainsi le pouvoir de participation à la prise des décisions, aux côtés des patriarches du peuple kapsiki. L'initiation de Gwela (guerrier) en est l’épreuve à franchir au préalable. Passage obligé constituant le trait d’union entre l’adolescence et l’âge adulte dans cette communauté.

    C’est ainsi que du 19 au 26 juin 2023, 192 jeunes garçons et filles (nouvellement mariées, ‘’Makwa’’) de cette bourgade ont bravé la 1ère phase du Gwela, dédiée à la fête de ‘’Rhoumlta’’, symbolisant l'introduction du jeune dans les secrets mysticosocioculturels du peuple. L’étape annonçant le premier mois de l'année traditionnelle (juin) chez les Kapsiki.

    La 2ème phase (décembre) est réservée à la fête de ‘’La'ah’’ qui regroupe presque toutes les cérémonies du peuple. Elle symbole l'initiation du jeune à la maturité.

    Et la 3ème phase (février-mars) confiée à la fête de ‘’Beuza’’, un rituel individuel qui permet au jeune initié d'intégrer finalement l'arbre à palabres des patriarches. Arrivé à cette phase, le jeune est responsable et prêt à fonder une famille et donner son avis sur les décisions prises par les patriarches ou matriarches (pour les filles).

    D’après le chef traditionnel de Mogodé, Sa Majesté Deli Zra, «le rituel Gwela qui existe depuis les origines du peuple kapsiki est le passage de l’adolescence à la maturité». Il s’agit d’une pratique traditionnelle qui met à l’épreuve des jeunes âgés de 18 ans et plus du village.

    Ce passage incontournable pour tout jeune kapsiki est jonché, entre autres, d’incantations, de certaines privations, des chants et danses de guerrier, des secrets et de la magie traditionnels du peuple, des mets du terroir, des coutumes et us du peuple.

    Dans le registre des innovations, d’après les organisateurs, cette année a été marquée par une abondance des candidats à l'initiation, soit 156 garçons et 36 filles nouvellement mariées.

    Visiblement satisfaite de son parcours sans faute, Kouvou Koda, la jeune mariée (Makwa) déclare : «Je suis très fière d'avoir effectué mon passage initiatique pour être femme au foyer et respectée dans la société. Aujourd'hui, je me sens plus femme, je suis appelée à être auprès des matrones, sous le hangar des matriarches du village.»

    Et le jeune initié, Deli Kodji, de renchérir: «Je suis très heureux d'être initié après mon passage d'adolescence à la maturité, qui me permet de me responsabiliser en fondant mon foyer et d’avoir l'autorisation à prendre part à l'arbre à palabres parmi les patriarches du village».

    Bref, les jeunes élus pour cette champagne initiatique sont unanimes à reconnaître qu’à travers cette épreuve coriace, ils se sentent pétris de responsabilité et de virilité dans la communauté.

    En perspective, le comité d’organisation de ce rituel entend doter les candidats d’uniformes (culottes et chaussures) et les évaluer avant le début du passage initiatique. Il compte inviter, par ailleurs, les populations à travers la planète pour venir assister à ce cérémonial riche en leçons et symboles de vie au sein d’une communauté bien structurée.

    La culture étant, selon un contemporain, ce qui nous reste lorsqu'on a tout oublié, le garant de la tradition de Mogodé, S.M Deli Zra, a demandé à ses sujets «de savoir d'où ils viennent pour savoir où ils partent. Nous ne devons jamais renier notre culture, sous prétexte d'appartenance religieuse ou sociale. Je demande à tout mon peuple de se mobiliser pour la pérennisation de notre identité culturelle».

    En rappel, Mogodé, localité au riche potentiel touristique (notamment la grotte des rites, des pics, des empreintes du pied du prophète Houmpita, des empreintes d’animaux domestiques gravées sur la montagne sacrée Heugoudeu) située à 36 km de la ville de Mokolo (département de Mayo Tsanaga), est composée d’environ 200 000 habitants.

     

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