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Afrique centrale : Organisations paysannes et chercheurs en phase pour une transition agroécologique réussie



  • La Plateforme régionale des organisations paysannes d’Afrique centrale (PROPAC) a organisé du 2 au 4 avril 2024 à Douala la 7e édition du dialogue entre organisations paysannes et institutions de recherche sur le thème : « agroécologie et systèmes agroalimentaires durables : quelles approches pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle en Afrique centrale ? ». Y prenaient part, 48 participants en provenance des pays suivants : Angola, Burundi, Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, République centrafricaine, Sao-Tomé-et-Principe, Tchad et Sénégal. L’objectif était de formuler des éléments d’un plan d’actions régional pour une transition agroécologique réussie en Afrique centrale, afin de développer des systèmes agroalimentaires et des chaînes de valeur productifs et résilients capables de relever les défis croissants actuels (sécurité alimentaire et nutritionnelle, changement climatique, perte de biodiversité, dégradation des terres, pénurie d'eau) dans une approche holistique.

    D’après le président de la PROPAC, Kolyang Palabele, il est important de transformer les systèmes alimentaires en Afrique centrale, en vue d’une agriculture familiale entreprenante, modernisée et durable assurant les fonctions économiques, sociales, culturelles, écologiques pour la sécurité et la souveraineté alimentaire et nutritionnelle. Du côté du Conseil ouest et centre-africain pour la recherche et le développement agricoles (CORAF), le directeur de la Recherche et de l’Innovation, Dr. Emmanuel Njukwe, a indiqué que l’Afrique centrale connaît des problèmes d’électricité et d’Internet entre autres, qui constituent des freins à la mobilisation des financements auprès des partenaires techniques et financiers. Il est d’avis que la recherche doit être réalisée pour les producteurs et non pour la recherche.

    Quant au représentant du ministre camerounais de la Recherche scientifique et de l’Innovation (MINRESI), Pr. Eddy Ngonkeu, du Cameroun, l’intensification agroécologique semble être une transition à favoriser, pour garantir une alimentation diversifiée et saine et préserver l’environnement et la santé des communautés. Les pistes de réflexion, a-t-il ajouté, doivent aller dans le sens de : l’agriculture de conservation, la gestion de la fertilité des sols, l’agriculture climato-intelligente, l’agriculture durable, l’agriculture biologique et l’agriculture de précision en vue d’une gouvernance responsable des ressources naturelles et l’interconnexion des systèmes agricoles. Toutes choses que nécessitent des changements à long terme dans les pratiques et dans les politiques.

    L’agroécologie, un créneau incontournable

    Les échanges ayant meublé les travaux de Douala ont mis un point d’honneur sur : la nécessité d’avoir une définition consensuelle de la notion d’agroécologie en prenant en compte les pratiques traditionnelles des producteurs sur le terrain, la mesure des risques qu’apporte la transition vers l’agroécologie (équilibre carbone), la prise en compte de la rentabilité de différentes solutions des modèles d’exploitation agroécologiques proposé par les instituts des recherches, le développement des actions de complémentarité entre l’agriculture et l’élevage afin d’éviter les conflits qui existent sur le terrain et l’implication des gouvernements dans la mise en œuvre de l’agroécologie et les systèmes agroalimentaires durables pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle en Afrique centrale.

    Quatre piliers sont nécessaires pour l’atteinte des résultats : la sensibilisation des acteurs, le renforcement des capacités des acteurs (chercheurs, agriculteurs, décideurs), le plaidoyer politique et la recherche-développement pour renforcer le lien entre la recherche et le monde rural.  

    Les financements manquent le plus…

    A en croire M. Kolyang Palabele, le succès de la transition écologique qui relève les défis de la souveraineté alimentaire, du chômage massif des jeunes et de la préservation de la base de production passe par la mobilisation des ressources pour le financement du plan d’actions pour le développement d’une transition agroécologique réussie en Afrique centrale, défini par les parties prenantes. Même son de cloche pour le Dr. Njukwe qui évoque le mécanisme de financement comme un chantier à adresser. Si nos Etats ne financent pas nos initiatives, soutient le responsable du CORAF, il sera difficile de mobiliser les partenaires financiers à apporter leur soutien. D’où l’invite faite à la PROPAC à élaborer une policy brief du plan d’actions en vue de rencontrer les bailleurs de fonds pour la mobilisation des ressources. Il faut indiquer que le cadre organisations paysannes-institutions de recherche est un espace stratégique multi-acteurs permettant de mutualiser les ressources, de l’avis du Pr. Ngonkeu.

    Le succès de l’agroécologie passe par la mutualisation des actions

    Les recommandations définies à l’issue des travaux interpellent plusieurs acteurs. Aux institutions sous-régionales comme la CEEAC et la CEMAC, il est recommandé de mettre en œuvre une stratégie de mobilisation des ressources financières, à travers le déploiement auprès des partenaires techniques et financiers et la participation aux évènements nationaux et internationaux, de soutenir la mise en œuvre de la Décennie de l’Agriculture familiale en Afrique centrale et formaliser le partenariat avec la PROPAC et de faciliter le partage des informations, des technologies et innovations disponibles sur l’agroécologie à travers la PROPAC.

    Les ministères sectoriels eux ont la responsabilité d’améliorer la coordination et la communication dans tous les sous-secteurs de l’agriculture en mettant en place des mécanismes pour renforcer les collaborations institutionnelles, de manière à améliorer la formulation des politiques et des stratégies de production ou d’exploitation agricole durable (tout en soutenant l’expansion des études pilotes, le renforcement de l’expérience paysanne et la promotion des savoir-faire locaux, endogènes et traditionnels), d’identifier aux niveaux nationaux des systèmes de production qui ne respectent pas les critères de durabilité et prendre des mesures visant à garantir la durabilité de l’écosystème, collaborer avec les exploitants agricoles afin de valider et d’adapter les axes stratégiques de façon intégrée en fonction des priorités, mettre à profit l’expérience acquise.

    L’autre voie à explorer consiste à mettre en œuvre des programmes (avec l’assistance technique et les politiques d’exécution nécessaires) basés sur les approches et sur les initiatives promues depuis la base, évaluer les risques actuels, futurs et potentiels des pratiques de l’agriculture conventionnelle sur l’écosystème agricole et la santé humaine, intégrer l’agroécologie dans les politiques nationales en associant les OP dans tout le processus et incorporer dans les programmes de formations des acteurs agricoles et ceux des métiers connexes, les curricula prenant en compte l’agroécologie.

    L’élaboration d’un programme régional de promotion de la transition agroécologique sur la table

    Les partenaires techniques et financiers pour leur part sont attendus la facilitation de l’accès aux fonds verts climat par l’information et la formation des acteurs et des bénéficiaires sur les différents guichets mis en place, l’accroissement des financements directs en faveur des organisations paysannes et de la société civile et le soutien de la capitalisation et du partage des expériences paysannes et des innovations et technologies scientifiques. La recherche, elle, doit impliquer les organisations paysannes et toutes les parties prenantes dans les projets de recherche en matière d’agroécologie et les diagnostics participatifs y relatifs, ainsi que dans la mise en œuvre des projets et programmes en matière de la recherche agricole sous-régionale.

    A la PROPAC, il est recommandé d’élaborer un programme régional de promotion de la transition agroécologique en Afrique centrale, de mener un plaidoyer auprès des autorités nationales pour mettre en place des systèmes de surveillance de bio-agresseurs des plantes et d’alerte précoce, d’engager un plaidoyer auprès des autorités nationales afin que les structures en charges des relevés météorologiques accompagnent les systèmes de surveillance des bio-agresseurs et de préparer une note conceptuelle conjointe avec certains partenaires pour la captation des financements en agroécologie.

    Aux organisations de la société civile (OSC), il est attendu la mise en œuvre des plateformes multi-acteurs sur l’agroécologie avec un ancrage institutionnel qui peut être renforcé par des représentations à différentes échelles par des comités d’action (aux niveaux régionaux, départementaux et locaux) et la promotion de la recherche-action entre les OSC, les OP et la recherche afin de capitaliser les expériences, les documenter si nécessaire, et produire des itinéraires techniques prenant en compte l’agroécologie.

    Le dialogue de Douala était organisé dans le cadre du projet Organisations paysannes en Afrique Caraïbes et Pacifique (OPenACP), financé par l’UE/ACP et le FIDA et du projet Recherche & innovation en agro-écologie menées par les organisations des producteurs pour des systèmes alimentaires durables (FO-RI), financé par l’Union européenne.

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