1. Instauration de règles claires pour la modernisation d’une économie à faible intensité de carbone en Europe
Les efforts collectifs de tous les États membres seront nécessaires pour moderniser l'économie et assurer une transition réussie vers une économie à faible intensité de carbone. C’est une transition qui garantira des possibilités d'emploi, de croissance et d'investissement en Europe et atténuera les effets dangereux liés au changement climatique. Cette transition nécessite des changements dans la manière de faire des affaires et d’investir, ainsi que des incitations dans tous les domaines d’action. La modernisation de l'économie stimulera l’investissement et l’innovation dans les nouvelles technologies et garantira que l’UE peut conserver sa position de chef de file mondial du secteur des énergies renouvelables et être compétitive sur les marchés des biens et des services tels que les véhicules à faibles émissions et l’efficacité énergétique.
À la suite de l’accord conclu par les chefs d’État ou de gouvernement de l’Union européenne en octobre 2014 et ultérieurement confirmé en mars 2016, la proposition présentée aujourd’hui, le «règlement sur la répartition de l'effort» (RRE), fixe aux États membres des objectifs contraignants en matière d’émissions annuelles de gaz à effet de serre pour la période 2021-2030 pour les secteurs de l’économie qui ne sont pas réglementés par le système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE de l’UE). Il s'agit notamment des secteurs du bâtiment, de l’agriculture, de la gestion des déchets et des transports, qui ont représenté près de 60 % du total des émissions de l’UE en 2014. La fixation des objectifs nationaux de réduction des émissions repose sur les principes d’équité, de solidarité, d'efficience et d’intégrité environnementale.
Cette proposition de règlement, combinée à la proposition de juillet 2015 relative à la révision du SEQE de l'UE et à la proposition présentée aujourd'hui sur la manière d'intégrer le secteur de l'utilisation des terres dans le cadre d'action en matière de climat et d'énergie à l'horizon 2030, garantira la réalisation des engagements pris par l’Union européenne et ses États membres au titre de l’accord de Paris sur le changement climatique.
En octobre 2014, les chefs d'État ou de gouvernement de l’UE ont fixé un objectif contraignant de réduction des émissions à l'échelle européenne pour l'ensemble de l'économie d’au moins 40 % d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 1990. Tous les États membres et tous les secteurs devraient contribuer à la réalisation de ces réductions des émissions. Pour atteindre cet objectif d'une manière économiquement avantageuse, les secteurs de l'industrie et de l'énergie qui relèvent du système d’échange de quotas d’émissions (SEQE) de l’UE devraient réduire leurs émissions de 43 % d'ici à 2030 par rapport aux niveaux de 2005. D’autres secteurs de l’économie (dits «hors SEQE») devraient réduire leurs émissions de 30 % d'ici à 2030 par rapport aux niveaux de 2005.
2. Répartition équitable et efficace au regard des coûts de l’objectif de réduction des émissions de 30 % entre tous les États membres de l'Union
L'ensemble de mesures que présente la Commission donnent à l'Europe les moyens de se préparer à l'avenir et de rester compétitive. Ces mesures traduisent les engagements pris par les États membres en octobre 2014 et s'adressent principalement aux États membres, puisqu'ils seront les premiers à décider de la manière de les appliquer pour atteindre l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre arrêté d'un commun accord pour 2030.
Tous les États membres auront des objectifs nationaux en matière d'émissions pour 2030, exprimés sous la forme d'une réduction en pourcentage par rapport aux niveaux d'émission de 2005, et auront également accès à de nouvelles marges de manœuvre pour atteindre ces objectifs selon un bon rapport coût-efficacité. À eux tous, ces objectifs nationaux permettent une réduction globale pour l’Union de 30 % dans les secteurs couverts par la proposition. Les objectifs pour 2030 vont de 0 % à - 40 % par rapport aux niveaux de 2005. Le tableau ci-dessous présente l’objectif et le niveau d’accès à ces nouvelles marges de manœuvre pour chaque État membre.
Par ailleurs, la proposition part toujours du constat que les États membres n'ont pas tous la même capacité à prendre des mesures, puisqu'elle différencie les objectifs selon le PIB par habitant de chacun. L'équité est ainsi garantie dans la mesure où les États membres à revenus élevés devront atteindre des objectifs plus ambitieux que les États membres à faibles revenus.
Les dirigeants de l’UE ont admis qu'une approche pour les États membres à revenus élevés fondée uniquement sur le PIB relatif par habitant reviendrait à imposer à certains d'entre eux des coûts relativement élevés pour atteindre leurs objectifs. Pour remédier à cette situation, les objectifs d'un groupe d’États membres dont le PIB par habitant est supérieur à la moyenne de l’Union devraient faire l’objet d’un ajustement relatif, pour assurer un meilleur rapport coût-efficacité d'une manière équitable et équilibrée.
La proposition met en place un système souple, donnant aux États membres la possibilité de réduire leurs émissions conjointement, dans plusieurs secteurs et sur un temps donné, ce qui permet également de tenir compte des différences de structure économique des États membres. Non seulement elle fixe des objectifs nationaux, mais elle prévoit également un certain nombre de marges de manœuvre permettant d'atteindre les objectifs visés de manière équitable et dans un bon rapport coût-efficacité. En particulier, deux nouvelles marges de manœuvre sont mises en place comme décrit ci-dessous, lesquelles permettront aux États membres d'atteindre leurs objectifs efficacement et à moindre coût.
3. Nouvelle marge de manœuvre ponctuelle donnant accès aux quotas du système d'échange de quotas d’émission de l’UE
La nouvelle marge de manœuvre permet aux États membres admissibles à son bénéfice d'atteindre leurs objectifs nationaux en compensant certaines émissions des secteurs hors SEQE avec des quotas du SEQE de l’UE qui auraient normalement été mis aux enchères, générant ainsi des recettes pour l'État membre concerné.
Les États membres admissibles et le niveau d’accès maximal correspondant (exprimé en pourcentage des émissions de l’année de référence 2005) sont indiqués dans la proposition. À l'échelle de l'UE, ce chiffre ne peut pas dépasser 100 millions de tonnes de CO2 pour la période 2021-2030. Afin de préserver la prévisibilité du SEQE, les États membres admissibles doivent notifier à la Commission avant 2020 à quelle hauteur ils comptent utiliser cette marge de manœuvre sur l'ensemble de la période. La prévisibilité et l’intégrité environnementale sont maintenues, car le transfert de quotas est strictement limité en volume et décidé au préalable.
4. Nouvelle marge de manœuvre donnant accès aux crédits du secteur de l’utilisation des terres
Afin d’encourager l’adoption de mesures supplémentaires dans le secteur de l’utilisation des terres, cette proposition prévoit qu'une quantité maximale de 280 millions de tonnes de CO2 peut être créditée à partir de certaines catégories de terres pour être utilisée afin de réaliser les objectifs nationaux sur l’ensemble de la période allant de 2021 à 2030. Le nombre de crédits pouvant être utilisés par chaque État membre est inclus dans la proposition. Bien que tous les États membres puissent accéder à ces crédits pour se conformer à leurs objectifs, ceux dont une part plus importante des émissions est due à l'agriculture y ont davantage droit. Conformément aux orientations des dirigeants de l’UE, cette mesure prend acte du fait que le potentiel d'atténuation des émissions du secteur de l'agriculture est moindre.
5. Maintien des marges de manœuvre existantes: mise en réserve, emprunt, achat et vente
En outre, la proposition prévoit plusieurs marges de manœuvre pour améliorer le rapport coût-efficacité. Les années où les émissions sont inférieures à leur quota annuel d'émission, les États membres peuvent mettre en réserve toutes les parties de QAE excédentaires et les utiliser ultérieurement, les années où leurs limites annuelles seront inférieures. Les années où leurs émissions sont supérieures à leur limite annuelle, ils peuvent prélever des parties de QAE sur l’année suivante. Ce système donne aux États membres la souplesse nécessaire pour faire face aux fluctuations annuelles des émissions dues aux conditions météorologiques ou économiques.
Les États membres peuvent aussi acheter des quotas à d'autres États membres ou leur en vendre. Il s’agit d’un outil important pour garantir un bon rapport coût-efficacité car il permet aux États membres d’avoir accès à des réductions d'émissions lorsqu'elles sont les moins coûteuses, et d'investir le solde dans la modernisation.
6. Trajectoire des émissions et point de départ
Les objectifs nationaux fixés dans la proposition ne sont pas seulement pour l’année 2030. En fait, la proposition établit une limite pour chaque année sur une période de 10 ans jusqu'en 2030. La limite pour chaque année est fixée selon une trajectoire linéaire décroissante, ce qui garantit des réductions d’une année sur l’autre et confère une certaine intégrité à l’objectif de 2030, dans la mesure où il représente l’aboutissement d'une série de réductions effectuées sur une période de 10 ans plutôt qu'un objectif isolé. Le point de départ de la trajectoire linéaire est fixé en 2020 au niveau de la moyenne des émissions pour la période 2016-2018, parce que ces données seront les plus récentes dont on disposera en 2020. Les États membres à faibles revenus qui étaient encore autorisés à accroître leurs émissions jusqu'en 2020 auront un point de départ plus élevé, comprenant les augmentations d'émissions convenues entre 2018 et 2020.
7. Des règles claires pour les déclarations et le suivi des progrès
La proposition maintient les obligations annuelles en matière de déclaration et de conformité pour la période 2021-2030.
La Commission évaluera chaque année les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs et en rendra compte. Si un État membre n’est pas sur la bonne voie, il devra présenter un plan d’action approprié. Afin de réduire la charge administrative et de permettre la contribution potentielle de l'utilisation des terres, un réexamen complet des déclarations des émissions de GES des États membres et un contrôle plus formel de la conformité auront lieu tous les 5 ans et non plus annuellement. Le premier réexamen de ce type aura lieu en 2027 pour la période 2021-2025 et le suivant en 2032 pour les années 2026-2030. La proposition est ainsi étroitement alignée sur le cycle de réexamen de 5 ans établi dans l'accord de Paris et est conforme à l'engagement pris par la Commission de mieux légiférer.
Lorsqu'un État membre ne respecte toujours pas son obligation pour une année donnée, même en tenant compte de l’utilisation des marges de manœuvre, la quantité d'émissions excédentaires est multipliée par un coefficient de 1,08 et le chiffre ainsi obtenu est ajouté aux émissions de l'année suivante.
8. Outils permettant aux États membres d’atteindre leurs objectifs nationaux
Dans des secteurs tels que le bâtiment et le transport routier, beaucoup de décisions importantes seront prises au niveau des États membres. Parmi les politiques et mesures visant à réduire les émissions peuvent figurer notamment la gestion de la circulation, le remplacement des carburants à base de carbone pour le transport, des mesures fiscales, la promotion des transports publics, les biocarburants, l'aménagement urbain et la planification des transports, l’amélioration des normes de performance énergétique pour les bâtiments, des systèmes de chauffage plus efficaces et à moindre intensité de carbone et l'utilisation d'énergies renouvelables pour le chauffage. Les mesures visant à réduire la production de déchets et à les recycler et à réduire la mise en décharge réduisent aussi les émissions de gaz à effet de serre (notamment les émissions de méthane). Le secteur de l’agriculture peut également apporter sa pierre à l'édifice en améliorant l’efficacité de la production en général. Il existe aussi un certain nombre de mesures d’atténuation spécifiques telles que la production de biogaz à partir de fumier.
Plusieurs mesures essentielles à l'échelle de l'UE aideront également les États membres à réduire leurs émissions et à atteindre ainsi leurs objectifs nationaux. Des propositions législatives complémentaires devraient être soumises avant la fin de l'année 2016 afin de contribuer à la réalisation des objectifs convenus par le Conseil européen pour 2030, à savoir porter à au moins 27 % la part des énergies renouvelables et améliorer l’efficacité énergétique d'au moins 27 % (cet objectif sera réexaminé d’ici 2020, dans l’optique d’un objectif de 30 % pour l’UE).
La directive sur l'efficacité énergétique et la directive sur la performance énergétique des bâtiments sont des politiques fondamentales dans ce contexte. En outre, le règlement sur les gaz fluorés garantira que les gaz qui contribuent au réchauffement climatique (utilisés dans les réfrigérateurs et les systèmes de refroidissement par exemple) seront remplacés par des substituts sans incidence sur le climat.
Le secteur des transports est celui qui produit le plus d’émissions parmi les secteurs hors SEQE et le seul dans lequel les émissions ont augmenté depuis 1990. Une baisse des émissions a néanmoins été amorcée en 2007. D'autres politiques devront être mises en place pour que cette tendance se poursuive. La stratégie européenne pour une mobilité à faible intensité de carbone qui est présentée aujourd'hui avec cette proposition expose de nouvelles mesures de réduction des émissions dans les transports.
Les politiques de l’UE tirent parti du marché unique pour stimuler l’innovation et offrir plus de produits et de solutions de façon plus rentable.
9. L’UE sur la bonne voie pour atteindre son objectif à l'horizon 2020
L’UE devrait dépasser son objectif de réduction de 10 % dans les secteurs hors SEQE comme indiqué dans la décision en vigueur sur la répartition de l’effort. Il ressort des données les plus récentes concernant les émissions de 2014 que celles-ci ont diminué de 13 % par rapport à 2005 dans ces secteurs. Selon les projections de l'UE, en 2020, les émissions dans ces secteurs devraient être réduites de 16 % par rapport à 2005. Pour presque tous les États membres, les émissions en 2020 devraient être en deçà de leurs limites nationales pour cette année-là.