Alors que la tragédie syrienne se poursuit dans l’indifférence du monde, de jeunes femmes syriennes poursuivent le combat avec l'arme de leurs écrits.
Nous les avions rencontrées en mars 2013 à l'occasion d'une formation que le CFI (Agence française de coopération médias ) leur avait proposée. Lamis Aljasem, Milia Eidmouni et Rula Asad, trois jeunes journalistes syriennes ont créé le premier réseau de femmes journalistes syriennes.
Rula Asad qui habite en Hollande depuis 2012 a 30 ans, Milia Eidmouni, 29 ans s'est installée en Jordanie il y a un peu plus d'un an. Lamis Aljasem a 23 ans et vit depuis juillet 2013 à Paris où nous l'avons retrouvée.
A la fin de l'année 2012, le projet est clair dans leur tête, l'objectif des trois amies est de connecter, former et aider les femmes journalistes syriennes afin qu'elles prennent toute leur place dans les médias. Les responsables du réseau souhaitent également partager les opportunités professionnelles, échanger des expériences, aider les nouveaux médias. Mais leur principal objectif est de changer l'image que les médias donnent des femmes.
Il n'y a jamais eu d'association de femmes journalistes en Syrie, comme il en existe dans d'autres pays. Tout est à construire.
Le premier réseau de femmes journalistes syriennes
Le réseau se constitue peu à peu avec l'aide de plusieurs ONG dont Aid et Action et HIVOS, une ONG hollandaise. Il sera même enregistré en Hollande comme fondation. En quelques mois une vingtaine journalistes, seize femmes et quatre hommes intègrent le réseau. Ces journalistes viennent de divers médias, ont des âges, des spécialisations différentes. Ce sont des journalistes citoyen-ne-s, des journalistes du web, de la TV, de la radio, de la presse.
Très vite, le réseau réussit à mettre au point deux sessions de formation l'une en Jordanie, l'autre en Turquie. En Jordanie : dix femmes journalistes venant de Syrie participe à cette formation qui se déroule en février 2013. Hala Kodmani, journaliste franco-syrienne vivant en France fait partie des formateurs. La journaliste qui a gagné, en 2013, le prix de l'Association de la presse diplomatique française (l'APDF) pour sa couverture de la situation en Syrie accompagne le réseau depuis le début.
Le blog réseau de femmes journalistes est ouvert pendant cette première formation. Puis en mai 2013, une autre formation à laquelle participe également, cette fois-ci, des hommes journalistes a lieu en Turquie. Tous les journalistes du réseau ont ainsi pu être formés et ont commencé à écrire sur le blog. Avant cela, en mars 2013, à Paris, le CFI avait organisé, pour les trois fondatrices du réseau, une série de rencontres afin de les aider à construire leur projet. Ainsi elles ont été mises en contact avec des pure player comme Rue 89 ou Egalité infos.
Aujourd'hui Milia Eidmouni et Rula Asad sont devenues elles-mêmes formatrices. Du 10 au 15 avril, elles ont animé un temps de formation au Liban pour une dizaine de journalistes citoyen-ne-s grâce à l'aide d'un ONG allemande Heinrich Boll.
Des journalistes engagé-e-s pour l'égalité de genre
Les trois journalistes ont eu pour ambition, dès le début de leur aventure d'informer, de sensibiliser sur les droits des femmes souhaitant prendre leur part dans la lutte pour l'égalité de genre. Tou-te-s les journalistes du réseau s'inscrivent dans le combat pour une société démocratique, revendiquant leur appartenance au mouvement des femmes syriennes. Le réseau a ainsi établi un partenariat avec la ligue des femmes syriennes et échangent des informations, des réflexions. Le réseau participe à un certain nombre d’événements comme à la campagne pour la libération des femmes arrêtées par le régime d'Assad. Ainsi, le 8 mars dernier, des journalistes du réseau ont organisé avec plusieurs radios une série d'émissions pour parler de ces femmes emprisonnées et écrit des articles dans des journaux syriens.
Le réseau des femmes journalistes syriennes recherche des partenaires financiers pour lui permettre de faire entendre la voix des femmes syriennes, démontrer aussi qu'elles ne sont pas uniquement des victimes.
Caroline Flepp 50/50