A l'approche de la COP 21, la conférence mondiale sur le climat qui se tiendra à Paris à la fin de l'année, la France veut faire figure d'exemple. La ministre de l'Ecologie, Ségolène Royal, n'a donc pas hésité à porter un projet de loi ambitieux. Voté en deuxième lecture à l'Assemblée nationale mardi 26 mai, le « projet de loi sur la transition énergétique pour la croissance verte » retourne au Sénat et devrait être adopté avant les vacances parlementaires ou à la rentrée.
« Faire de la France un pays exemplaire »
Pour Mme Royal, il s'agit bien de faire de l'Hexagone un pays leader en matière d'énergies renouvelables et de consommation écoresponsable. La mesure phare du projet de loi est la réduction du nucléaire dans la production d'électricité française. La baisse de 75 % à 50 % la part de l’électricité d’origine nucléaire, promise par François Hollande, devrait donc être réalisée à l'horizon 2020. En outre, les autres objectifs clefs de réduction de moitié de la consommation d’énergie totale en 2050 et le palier intermédiaire d’une baisse de 20 % en 2030 sont réaffirmés.
Les deux chambres du Parlement, de deux bords politiques différents, ont eu des difficultés à s'accorder sur le texte, le Sénat (à droite) essayant de tempérer les exigences du texte, notamment en termes d'échéances. Malgré les différentes transformations opérées par le Sénat lors de l'examen du projet de loi, l'Assemblée nationale est revenue sur le texte qui se rapproche dorénavant de la version votée en première lecture. Les sénateurs voulaient par exemple étendre à 1000m la distance obligatoire entre les habitations et les éoliennes, mais les députés l'ont ramenée à 500m, ce qui permettra indéniablement d'en installer un plus grand nombre. De même, la chambre haute réclamait que le plafond de la puissance totale du parc électronucléaire soit augmenté à 64,85 gigawatts (GW) mais il demeurera plafonné à son niveau actuel, soit 63,2 GW.
Outre ces mesures emblématiques vers une transition énergétique globale, le projet de loi contient plusieurs mesures « touchant la vie quotidienne » qui ne manquent pas d'avantages pour les consommateurs.
Nombreux avantages pour les consommateurs
Le projet de loi contient ainsi l'obligation d'installer des compteurs intelligents pour maîtriser la consommation d'énergie. ERDF, premier gestionnaire du réseau électrique français, va ainsi voir son compteur communicant généralisé pour atteindre le nombre de 35 millions en 2020. Linky, déjà testé dans plusieurs villes dont Tours et Lyon, a reçu l'aval de la Commission de régulation de l’énergie et sera très bientôt déployé à Bordeaux. Il assurera la transition vers l'utilisation des énergies renouvelables (photovoltaïque et éolien) et enregistrera, à termes, toute la chaîne de production et la consommation d'énergie. C'est un bénéfice direct pour les consommateurs qui verront leur facture établie exactement selon leur propre consommation. En effet, le compteur intelligent permet de relever la consommation exacte de chaque foyer et de chiffrer leur consommation réelle.
Dans la même lignée, l'Assemblée nationale donne le feu vert à l'interdiction des coupures d'eau en cas d'impayés. La possibilité de baisser le débit est toutefois laissée aux distributeurs d'eau, comme c'est le cas pour l'électricité.
Autre avancée pour les consommateurs : la mesure visant à obliger les distributeurs du secteur alimentaire à lutter contre le gaspillage alimentaire. « Voir de l’eau de javel déversée sur les poubelles des grandes surfaces avec des aliments consommables, ça scandalise », a souligné Guillaume Garot, député et auteur d’un rapport sur le gaspillage remis au gouvernement mi-avril. Les grandes et moyennes surfaces seront donc obligées de nouer des partenariats avec des associations afin de faciliter les dons. Autre alternative : donner les denrées non consommées pour l'alimentation animale ou le compost. Les peines pour les contrevenants sont quant à elles dissuasives, allant jusqu'à deux ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende.
En s'attaquant au gaspillage énergétique sous toutes ses formes, la ministre de l'Ecologie montre sa volonté de réaliser une transition énergétique qui profite aussi aux consommateurs. Ces derniers sont en effet souvent inquiets du coût que peut représenter un tel projet écoresponsable, notamment l'abandon progressif du nucléaire. C'est d'ailleurs un des arguments favoris des pro-nucléaires pour lesquels les prix de l'énergie s'envoleraient avec le passage aux énergies vertes. Pourtant, le projet de loi à l'examen montre bien que les intérêts des consommateurs peuvent être conciliés avec une plus grande exigence en matière de production et de consommation d'énergie.