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Excision: L'Eglise Catholique du Tchad se reveille



  • Chaque année, des tchadiennes enceintes mesurent, plus que d’autres, le danger auquel l’accouchement les expose. L’excision, pratiques préislamiques et pharaoniques, a débuté selon plusieurs recherches, 5 000 à 6 000 ans avant notre ère. Une seule explication prévaut : c’est un des nombreux moyens que l’homme a trouvés pour imposer à la femme un statut inférieur au sien. On peut imaginer le traumatisme que subit la fillette au moment de la mutilation et les conséquences des douleurs insupportables qu’elle porte dans sa chair. Quand elle vit ou survit dans ces conditions, la femme n’est pas placée en situation d’être humain à part entière. Exiger l'abolition d'une coutume anachronique n'a donc rien de malveillant, et encore moins ne signifie avoir un faible pour les habitudes des occidentaux . Il s'agit tout simplement de reconnaître ici qu'une violence physique et psychique a lieu au vu et au su de l'humanité sous le couvert de la culture.
    Aujourd’hui, la santé de nos soeurs est en jeu au nom de croyances vétustes et d'une vénérable tradition.

    Outre la peur et la douleur immédiates, l’excision peut provoquer des hémorragies persistantes, des infections, la stérilité et la mort. Les femmes qui ont subi cette pratique vivent à chaque accouchement le traumatisme lié à l’incision renouvelée pour faciliter la sortie du bébé.
    Pratique non religieuse, l’excision a été conçue selon certains auteurs Ouest africains dans le but de préserver la virginité de la jeune fille, de garantir la possibilité de la marier et de réprimer sa sexualité.

    Habituellement pratiquée chez des petites filles âgées de 8 à 12 ans, cette mutilation génitale constitue la plus grave atteinte à la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant.

    Au Tchad, le gouvernement ne s’en émouvoit pas alors que dans beaucoup des pays africains, on a adopté des lois érigeant la mutilation génitale des femmes en délit pénal.

    L’Eglise Catholique Tchadienne vient de se reveiller. Mgr Edmond Djintagar va en guerre contre l’excision.

    Pourquoi l’Eglise Catholique vient –elle juste de réagir contre une pratique qui selon les auteurs éxisterait depuis plus de 2500 ans avant l'apparition de l'Islam et du christianisme? Le Prélat vient –il de comprendre que la construction d'une nation moderne exigerait désormais la destruction de certaines reliques du passé?

    Pourquoi cette prise de position tardive de l’Eglise alors que deja en 1939, la Soeur Marie-André , une catholique, évoquait dans son livre Femmes d'Afrique noire, l'opération à laquelle était soumisent, les jeunes filles africaines ?
    Les Soeurs Catholiques ne s’étaient elles pas poser en 1956 ces pertinentes questions :
    Faut-il respecter les traditions ou modifier leur cours ? Que dire quand le corps des femmes est soumis à des pratiques nécessaires à leur acceptation par la société, mais néfastes pour leur santé ? Imposer au Sud le modèle du Nord, une certaine idée de la modernité ? Ou bien ne pas intervenir, afin de ne pas bousculer des coutumes ancrées dans un immémorial fonds socioculturel et religieux ?
    Les missionnaires, témoins privilégiés de vie locale en Afrique, n'ont laissé que de rares témoignages sur les mutilations sexuelles féminines. Le respect de ces "mythes puérils pourtant si pittoresques" comme l'écrit le R. P.Daigre en 1932, explique en partie la longue discrétion des Pères et des Soeurs en Afrique. Jusqu'aux années 1970, de toute façon, le sujet n'était pas souvent abordé.
    Dans son roman « Possessing the Secret of Joy », Alice Walker décrit sous forme romancée les affres de l'excision et les traumatismes auxquels l'héroïne Tashi est en proie. La fiction permet ainsi de réaliser à quel point, une femme peut se sentir diminuée dans son être à la suite d'une excision (Alice Walker. Sie hüten das Geheimnis des Glücks. Reinbek B. Hamburg: Rowohlt, 1993).

    C. Beyala, camerounaise d’origine n’a-t-elle pas dénoncé non seulement l'effondrement des valeurs mais aussi le traumatisme psychique dont souffrent ses héroïnes. (Calixthe Beyala. Tu t'appelleras Tanga. Paris: Stock, p.24).

    On peut se dire que l'éxcision ne s'inscrit plus dans le contexte de l'éducation traditionnelle telle que le conçoit la mère de Salimata dans Les Soleils des Indépendances d'Ahmadou Kourouma.

    Pourquoi au Tchad, les problèmes liés à l'éxcision restent-ils encore un tabou ou l’oeuvre des hommes ?

    Si aujourd’hui le Prélat du Diocèse de Sarh utilise l’arme de l’ex-communion comme moyen de reduire la pratique dans son diocèse, la solution du problème ne se situent pas dans les interventions unilatérales et peu médiatisées .Ce problème nécessite un dialogue et une négociation ouverte à toutes les parties intéressées.

    Felix Ngoussou,

    info@tchadforum.com
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