Par Andrzej Zwaniecki
Rédacteur
Washington - Selon les prophètes de malheur, la grande crise énergétique est arrivée. En fait, elle a commencé il y a quelques années lorsque la production pétrolière a atteint son rythme maximum dans le monde. Depuis lors, ce rythme n'a cessé de ralentir. Les prophètes de malheur disent que cette tendance ne fera que s'accélérer en entraînant des conséquences graves pour l'économie mondiale.
Toutefois, la plupart des économistes spécialisés dans l'énergie estiment qu'il s'agit là de prévisions trop pessimistes.
La théorie de la production maximum de pétrole est très controversée, entre autres parce qu'il est difficile de trouver des données fiables dans ce domaine. Si certains disent qu'il est peu probable que la production de pétrole atteigne son maximum avant 2020, d'autres prétendent que ce cap est déjà franchi ou sur le point de l'être.
En dehors de la question de la survenance de ce maximum, les spécialistes sont cependant tous d'avis que l'époque où le pétrole était en grande abondance et où les carburants étaient bon marché est révolue.
La directrice du Centre d'économie énergétique de l'université du Texas à Austin, Mme Michelle Floss, a déclaré à America.gov que l'offre de pétrole resterait inférieure à la demande à moyen et long terme et que son cours demeurerait donc élevé. La plupart des spécialistes dans ce domaine sont du même avis.
Le caractère exceptionnel de la crise pétrolière de 2008
La situation actuelle peut paraître semblable aux chocs pétroliers des années 1970. Toutefois, cette fois-ci, des tendances plus prononcées et plus durables sont la cause de la hausse des cours et non pas des événements politiques particuliers tels que l'embargo sur les livraisons de pétrole décrété en 1973 par les pays arabes. La baisse du dollar américain, utilisé pour le négoce du pétrole dans le monde entier, et la spéculation financière ont contribué à la hausse récente des cours. Néanmoins, la plupart des spécialistes estiment que la principale raison de cette hausse est le fait que l'offre de pétrole ne répond pas suffisamment vite à l'accroissement accéléré de la demande émanant de plus en plus de pays au taux élevé de croissance économique, tels que la Chine et l'Inde.
Selon l'Administration de l'information sur l'énergie des États-Unis (EIA), le monde a suffisamment de pétrole pour satisfaire la demande au moins jusqu'en 2030 (la dernière année de la période des prévisions). L'Arabie saoudite possède les plus grandes réserves prouvées. Les estimations de sa future capacité de production varient fortement entre les quelque 12,5 millions de barils par jour que ce pays compte atteindre à la fin de 2008 et 23 millions de barils par jour. L'Irak vient après l'Arabie saoudite pour le volume de ses réserves prouvées et pourrait tripler sa production. Par ailleurs, des réserves inexploitées de pétrole existent encore, par exemple au large des côtes du Brésil, de l'Afrique et de la zone externe du plateau continental des États-Unis, dans les océans Atlantique et
Pacifique ainsi que dans le golfe du Mexique.
Toutefois, la découverte de grands gisements est rare, et bien qu'on ne puisse pas l'exclure pour l'avenir, elle est peu probable. Par ailleurs, la production des anciens gisements est en baisse (mer du Nord et Mexique) ou a atteint un palier (Russie et Vénézuéla).
Le monde compte cependant de grandes réserves de pétrole dans des sables et des schistes bitumineux. Selon l'EIA, le pétrole extrait de ces deux sources représentera de 9 à 20 % de la production mondiale de pétrole en 2030. La production de biocarburants devrait aussi augmenter de façon importante. Toutefois, l'extraction du pétrole des sables et des schistes bitumineux coûte cher, exige beaucoup de temps et d'énergie et nuit à l'environnement, et la production des biocarburants contribue à la hausse des prix des denrées alimentaires.
Le monde tourne son regard vers l'Arabie saoudite
Dans l'avenir immédiat, l'Arabie saoudite est le seul pays qui puisse augmenter fortement sa production de pétrole. Néanmoins, la proportion dans laquelle elle peut accroître sa production sur demande a diminué pour passer de 15 % de la demande mondiale en 1988 à 2 % à l'heure actuelle.
C'est là, selon les spécialistes, une raison pour laquelle les appels des dirigeants des grands pays industriels en faveur de l'augmentation de la production n'ont qu'un effet limité.
Une autre raison a trait aux bénéfices énormes réalisés par les grands pays producteurs de pétrole, d'après le professeur John Deutch, du Massachusetts Institute of Technology. Il a déclaré à America.gov que les bénéfices de ces pays étaient supérieurs à ce dont ils avaient besoin pour financer leurs programmes nationaux.
Pour sa part, M. Steve Andrews, d'un organisme de recherche à but non lucratif spécialisé dans l'étude de la production d'hydrocarbures (l'Association for the Study of Peak Oil and Gas - USA), estime qu'il n'est pas toujours dans l'intérêt des pays producteurs de pétrole d'augmenter leur production dans de brefs délais. Cette augmentation peut en effet entraver la diversification de leur économie et la gestion de leurs ressources en vue des besoins des générations à venir, a-t-il dit à America.gov.
Les médias et les parlementaires des États-Unis critiquent souvent l'Arabie saoudite parce qu'elle ne chercherait pas suffisamment, selon eux, à augmenter sa production. Toutefois, d'après Mme Foss, ce pays fait beaucoup en coulisse pour mettre plus de pétrole sur le marché mondial. Les producteurs de pétrole savent en effet qu'ils doivent agir avec précaution car, à un moment donné, la hausse du cours du pétrole peut inciter les consommateurs à s'orienter vers d'autres sources de carburant et à faire des économies d'énergie, ce qui ne peut manquer de diminuer la demande de pétrole et de causer une forte baisse de son cours.
Source : Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat.
Site Internet : http://www.america.gov/fr/)
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09/12/24 à 13h08 GMT