Dans un article de Nature Climate Change, une équipe internationale d’experts analyse les implications de l’Accord de Paris, adopté lors la COP21, pour le futur des océans et pour les nécessaires interactions entre la communauté scientifique et les négociations climatiques.
L’océan tempère le réchauffement global du climat au prix d’une altération profonde de son fonctionnement physique et chimique, de ses écosystèmes et des services qu’ils fournissent à l’humanité (pêche, aquaculture, tourisme littoral, protection côtière, etc.). Les niveaux d’impact sur l’océan d’ici la fin du siècle dépendront fortement de la trajectoire mondiale d’émissions de gaz à effet de serre que l’humanité suivra d’ici là. Pour rappel, lors de la COP21, les pays se sont engagés à limiter l’augmentation de température de la planète à « moins de 2 °C d’ici 2100, voire à 1,5 °C ».
Des experts de l’Oceans 2015 Initiative ont analysaé les implications d’un tel engagement du point de vue de l’océan. Cet article traduit l’Accord de Paris en termes de risques d’impact sur l’océan. Il souligne également que la « communauté océan » a un rôle important à jouer dans le processus d’augmentation des ambitions des pays en termes d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre sur le long terme. Cela permettrait en retour aux scientifiques d’affiner les scénarios de risques d’impact futurs sur l’océan.
Selon cette étude, même le scénario à faibles émissions de gaz à effet de serre, qui correspond globalement à l’objectif de 2 °C en 2100, comporte des risques de dommages majeurs, notamment sur les coraux tropicaux et les bivalves des latitudes moyennes. Les chercheurs estiment qu’il multipliera par 1,4 le niveau de risque d’impact actuel. Des scénarios plus émetteurs de CO2 aggraveraient considérablement la situation, jusqu’à multiplier le risque d’impact actuel par 2,7 dans le cas de la poursuite de la trajectoire actuelle d’émissions. Quant aux scénarios tirés des « contributions nationales » des pays en amont de la COP21, ils multiplient le risque d’impact actuel par 2,2 à 2,5. Il est donc indispensable que les « contributions nationales » en termes d’émissions de gaz à effet de serre soient révisées à la hausse, ce que l’Accord de Paris prévoit au travers d’un cycle de révision tous les 5 ans à partir de 2020.
Alexandre Magnan, chercheur « Vulnérabilité et Adaptation » à l’Iddri, auteur principal de l’article, rappelle que « l’Accord de Paris et ses suites représentent une opportunité majeure pour passer de scénarios de risques d’impact « théoriques » à des scénarios « réalistes », c’est-à-dire reflétant mieux la réalité des décisions prises dans le cadre des négociations climatiques. Cela permettra à la science de nourrir les négociations au fil de l’eau, dans l’objectif notamment de maintenir le cap vers des modèles de développement compatibles avec l’ambition de limiter le réchauffement global à moins de 2 °C d’ici la fin du siècle ».
Jean-Pierre Gattuso, directeur de recherche CNRS au Laboratoire d'océanographie de Villefranche (UPMC/CNRS) co-responsable de l’étude, ajoute que « de telles conclusions mettent en avant l’importance de la récente décision du GIEC de produire, d’ici à 2020, deux rapports spéciaux, l’un sur un monde à 1.5 °C, l’autre sur les océans et la cryosphère (là où l’eau est présente à l’état solide : banquises, neige, glaciers, sols gelés, etc.). Les négociations climatiques ont besoin d’une vision claire des bénéfices à espérer d’efforts d’atténuation très ambitieux, et c’est la responsabilité de la communauté scientifique d’apporter de telles preuves ».
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19/11/24 à 15h53 GMT