Il fait plus chaud en ville qu'à la campagne ou qu'en proche banlieue, notamment la nuit. Mais ce phénomène est variable selon les villes, où il peut faire plus ou moins chaud. Des chercheurs de l'unité mixte internationale MSE (CNRS/MIT) et du Centre interdisciplinaire des nanosciences de Marseille (CNRS/Aix-Marseille université) ont montré que l'organisation des villes est à l'origine de ce phénomène: plus une ville est organisée, comme la plupart des villes nord-américaines avec des rues très droites et perpendiculaires, plus elle piège la chaleur. A l'inverse, plus une ville est désorganisée, comme certains cœurs de villes historiques, plus la chaleur s'évacue facilement. Ces résultats, publiés le 9 mars 2018 dans Physical Review Letters, ouvrent de nouvelles pistes pour un urbanisme et une gestion de l'énergie optimisés.
Les îlots de chaleur urbains (ICU) résultent de l'augmentation de la température de l'air dans les villes, par rapport à celle des zones rurales et péri-urbaines. Aux États-Unis, ce phénomène concerne plus de 80 % de la population vivant dans les zones urbaines. Ces îlots peuvent impliquer, au sein des agglomérations, un accroissement de la demande énergétique (pour la climatisation par exemple), de la pollution de l'air, et la détérioration du confort de vie et de la santé. Des stratégies de réduction de ces îlots de chaleurs ont été mises en place dans certaines villes, comme l'implantation d'espaces verts, mais les impacts environnementaux et économiques de ces îlots, à une échelle nationale ou même régionale, restent à ce jour peu quantifiés.
Des chercheurs ont donc étudié certains paramètres majeurs de l'élévation de la température, comme l'inertie thermique des bâtiments et leur capacité à rayonner pendant la nuit l'énergie absorbée durant la journée. Ils ont pour cela utilisé les températures enregistrées en ville ou à la campagne sur plusieurs années ainsi que des informations sur les empreintes spatiales des constructions urbaines, combinées à un modèle de dissipation de la chaleur. Cette approche a permis de démontrer, pour la cinquantaine de villes étudiées, comme New York, Chicago et Boston, que les effets des îlots de chaleurs nocturnes varient selon la géométrie du tissu urbain. Les bâtiments peuvent en effet s'échanger de l'énergie, plus ou moins facilement selon leur degré d'organisation spatiale. Les chercheurs ont mesuré ce paramètre grâce à des outils de physique qui permettent de réduire la complexité de la ville à une description statistique, c'est-à-dire à des « lots » de bâtiments pertinents. Ils ont montré ainsi que plus une ville est organisée, comme la plupart des villes nord-américaines, plus l'effet des îlots de chaleur urbains (ICU) est important et plus la chaleur reste piégée, et inversement pour les villes « désorganisées ».
Dans les pays aux climats chauds ou tempérés, l'effet « ICU » augmente significativement la facture énergétique. En revanche, pour des régions aux climats froids, il peut potentiellement permettre de réduire la demande énergétique. De fait, au regard des prévisions de croissance urbaine, il devient possible d'identifier les pays qui ont la plus grande opportunité d'utiliser les « ICU » et d'aider ainsi les décideurs à optimiser la demande en énergie des bâtiments et à réduire par la suite leur empreinte carbone aux échelles des villes, mais aussi des régions, voire des États.
Communiqué de presse
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19/11/24 à 15h53 GMT