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Urbanisme : les maisons en bois sont-elles vraiment durables ?



  • Portées par un marketing écolo efficace et synonyme de retour à la nature, les maisons à ossature bois sont, à l’usage, source de complications pour les différents traitements et entretiens. Attention, personnes sensibles aux produits chimiques, s’abstenir !

    C’est une lapalissade : le bois est un matériau vivant. Et à ce titre, il faut vraiment s’occuper de lui. L’argumentaire des entreprises proposant des maisons à ossature bois est bien huilé : absorption du carbone, économies d’énergies, délai de fabrication réduit, esthétisme… La carte postale semblerait presque idyllique. Pourtant, à l’usage, ces maisons ne sont pas aussi durables que les plaquettes publicitaires le laissent entendre. Sans un entretien rigoureux et finalement coûteux, elles se transforment en nids à insectes et champignons. Qui dit entretien, dit traitements chimiques agressifs, qu’il vaut mieux laisser à des entrepreneurs professionnels et certifiés. Des traitements qui prennent parfois l’allure de chemins de croix.

    Si vous ne vous protégez pas contre les intempéries…

    Les bricoleurs du dimanche seraient évidemment tentés de tout faire eux-mêmes. Des vidéos sur YouTube pullulent pour apprendre à fabriquer soi-même les produits d’entretien. Mais cela revient à jouer avec le feu, car la distribution et les restrictions d’usage de certains produits sont devenues extrêmement contraignantes en France, surtout depuis l’adoption de la norme NF EN 335-1.

    Avant d’arriver sur un chantier de construction, le bois a déjà subi plusieurs traitements, à base de produits chimiques qui n’ont rien d’anodin, comme les dérivés d’arsenic. Ensuite, en prévision du montage, les différents éléments à traiter sont catégorisés par classes d’emploi. La classe 1 concerne des bois restant au sec (-20% d’humidité, comme les menuiseries intérieures) ; la classe 2 des bois peu exposés aux intempéries (supportant les 20% d’humidité, comme les charpentes et les ossatures) ; la classe 3 supporte l’humidité (pièces de menuiseries extérieures) ; la classe 4 permet un contact permanent avec l’eau douce ; et enfin la classe 5 cible les bois exotiques qui peuvent supporter l’air marin et l’eau salée.

    Quel qu’ait été son mode de traitement chimique (pulvérisation, trempage ou autoclave) à l’origine, le bois est une matière qui s’altère avec le temps. Les traitements disponibles sur le marché permettent de conserver quelques années ses propriétés et son aspect. Sans cure complète tous les trois à cinq ans, le bois peut présenter des déformations, des fissures à sa surface et surtout prendre une teinte grisâtre. Plusieurs traitements sont disponibles, à des tarifs très variables. Très à la mode, l’huile de lin évite la décoloration, mais laisse souvent apparaître des traces noires, difficiles à faire disparaître par la suite. Le vernis quant à lui permet une protection efficace contre l’eau, mais s’écaille vite avec le temps et doit être entièrement poncé avant de pouvoir appliquer une nouvelle couche. Enfin, saturateurs et lasures permettent parfois de garder au bois son aspect d’origine. Mais la pluie et le soleil ne sont pas les pires menaces pour les maisons en bois.

    Si vous ne vous protégez pas contre les petites bêtes…

    Sachez-le : sous vos pieds, au-dessus de vos têtes, certains insectes peuvent vivre jusqu’à douze ans dans le bois, ingérant leur propre volume chaque jour, creusant des milliers de minuscules tunnels. Et les insectes, termites en tête, ne sont pas les seuls nuisibles. Les champignons comme la mérule peuvent également faire des ravages.

    Certes, les maisons neuves sont conçues avec des pièces de charpente ou de menuiserie ayant subi un traitement préventif insecticide et fongicide. Mais les effets de ces traitements ne sont pas éternels, et les propriétaires des lieux doivent, tous les cinq à dix ans, les renouveler. Voire tous les trois ans si la maison se trouve dans l’un des nombreux bassins d’infestation de termites en France.

    À la norme française sur la distribution des produits mentionnée un peu plus tôt, s’ajoute la réglementation européenne, plus connue des professionnels sous l’acronyme BPR (Biocides Product Regulation). « Le BPR concerne la mise sur le marché et l’utilisation des produits biocides utilisés pour préserver le bois contre les attaques des organismes nuisibles, explique François Corda, président du SPB (Syndicat national des industriels de la préservation du bois et de la lutte anti-termites). Tous les produits requièrent une autorisation de mise sur le marché (AMM), les substances actives qu’ils contiennent devant être préalablement approuvées. Traduit en France par la loi N°2015-1567 du 2 décembre 2015, ce cadre réglementaire et législatif très strict a énormément réduit le nombre de produits admis sur le marché et, partant, le nombre d’acteurs ». Les nouvelles réglementations ont en effet resserré l’offre. Les autorisations de mise sur le marché coûtent aux industriels environ 300 000 euros par produit, ce qui a poussé nombreux d’entre eux à déserter ce domaine d’activité. Il ne reste en France qu’une dizaine de producteurs de produits chimiques destinés aux différents traitements du bois. Tout cela explique en partie les tarifs très élevés des prestations des professionnels.

    Les traitements curatifs : attention à votre santé

    La prévention, c’est bien, mais il faut parfois passer à la vitesse supérieure pour se débarrasser des insectes et autres champignons nuisibles. Là aussi, en France, ce travail doit être effectué par des professionnels qui, depuis juillet 2015, doivent être détenteurs du certificat Certibiocide, obtenu après une formation de trois jours et valable pendant cinq ans. La vente de certains produits leur est d’ailleurs réservée.

    Le traitement contre les insectes est certainement le plus contraignant et le plus agressif. Cinq modes sont aujourd’hui permis par la législation française. La fumigation et le gazage demandent aux ouvriers de rendre hermétiquement close une zone à traiter : si la première est assez aisée à mettre en place, elle n’atteint que les insectes adultes, la seconde est quant à elle hautement toxique et a pour but de tuer les larves au plus profond du bois. Troisième alternative, le traitement thermique. Ici, le professionnel chauffe l’air ambiant pendant plusieurs heures jusqu’à une température mortelle pour les larves. Autre technique, la pulvérisation – que les propriétaires appliquaient eux-mêmes par le passé – n’a qu’un effet très limité, car il ne traite que la surface du bois. Dernier mode de traitement enfin, l’injection consiste à enfoncer des mèches dans le bois pour atteindre le cœur des pièces de charpente par exemple.

    Dans le cas des champignons, deux modes opératoires sont préconisés, en fonction de la profondeur de l’infestation. Dans tous les cas, il faut procéder à un décapage radical de la surface à traiter, suivi d’un assèchement puis de l’application d’un fongicide. Dans les cas extrêmes, les professionnels doivent retirer tout ou partie de la zone atteinte par les champignons, supprimer la source d’humidité responsable de leur prolifération, puis remplacer les éléments contaminés et/ou pourris.

    Des durées de vie très disparates

    Les forums sur Internet regorgent de témoignages d’habitants : des façades qui s’abîment prématurément, des éléments pourris inexplicablement, des promesses non tenues par des collectivités locales qui poussent les acquéreurs à investir dans des écoquartiers mal conçus… En fonction du type de bois utilisé et de la région où est construite l’habitation, la durée de vie d’une maison en bois contemporaine varie beaucoup, aux alentours d’une cinquantaine d’années. Pour les plus malchanceux, cette durée de vie n’excède parfois pas une dizaine d’années. En tout état de cause, ces durées ne correspondent pas avec la psychologie française d’investissement dans l’immobilier à long terme, pour transmettre un bien en héritage par exemple. Contrairement à l’Amérique du Nord où une maison qui arrive en fin de vie est remplacée, et où un nouvel investissement sera logiquement de mise.

    Côté techniques de construction, le savoir-faire des Américains ou des Canadiens n’est pas encore arrivé en France, et les habitations mal conçues et mal façonnées vieillissent plus mal (mauvais respect de la norme RT2012 sur l’isolation, ou des directives du fascicule FD P 20-651 sur la durabilité des ouvrages). Mais le principal facteur reste l’entretien. Contrairement à une maison classique, les maisons en bois ne tolèrent pas d’écart de temps trop importants entre chaque étape de leur entretien. Un entretien qui demande des investissements réguliers, rarement stipulés sur le devis des constructeurs…

     

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