L’Ong américaine Rainforest Alliance et ses partenaires de mise en œuvre du projet visant à « renforcer les droits économiques et sociaux des femmes et des jeunes (en particulier des jeunes femmes) par la promotion de la gestion communautaire et écologiquement durable des paysages » (projet Women in COBALAM) ont dressé le bilan du co-financement de l’Union européenne (UE) le 25 juillet 2023 à Yaoundé. A l’occasion, il ressort que le projet développé sur le terrain sur la période 2020-2023, par l’Association pour les services d’appui à la protection de l’environnement et au développement (SAPED) et l’African Center for Renewable Energy and Sustainable Technology (ACREST), a été à la hauteur des attentes.
« Depuis novembre 2020 que ce projet a été lancé avec le co-financement de l’Union européenne, le Programme des Nations unies pour l’environnement et le Fonds pour l’environnement mondial, nous avons réussi à augmenter la participation des femmes dans les organisations communautaires de base, c’est-à-dire les groupes de producteurs, les GIC, les coopératives et autres », a expliqué le directeur senior de Rainforest Alliance pour l’Afrique de l’Ouest et Centrale, Nadège Nzoyem. Et d’ajouter : « Nous sommes passés pratiquement de 40% des femmes dans ces organisations à près de 60% pour ce qui est de la zone des monts Bamboutos. Nous avons réussi à avoir 33% de femmes dans les commissions communales de gestion des paysages mis en place dans le cadre de ce projet pour améliorer la concertation et la prise de décision en matière de conservation et de restauration des monts Bamboutos ».
Par ailleurs, cinq entreprises gérées par des femmes ou ayant au moins 50% de femmes dans les instances de prise de décision ont été renforcées, sur les aspects de l’amélioration de la productivité, de la qualité des produits, de leur conditionnement et d’accès aux marchés. La démarche permet désormais de disposer d’entreprises spécialisées dans la fabrication de l’huile d’avocat (avec un packaging règlementaire et une qualité améliorée) et du miel 100% naturel à travers l’encadrement de plusieurs groupes dans l’amélioration des systèmes de production.
Des femmes capables de prendre en main leur destinée économique
En prime, l’évaluation globale du projet sur financement UE a révélé une amélioration des productions agricoles par l’utilisation des pesticides biologiques. « Les formations sur la transformation de la pomme de terre en farine, la fabrication des engrais bio, la fabrication des fours améliorés et l’élaboration d’une comptabilité ont transformé nos vies et amélioré nos sources de revenus. Les partenaires ont également mis à notre disposition des appuis. Dans le seul volet de l’agriculture durable, nous avons reçu des appareils, des bottes, des houes pour travailler, ainsi que des moulins à écraser pour diversifier les revenus de notre communauté », a fait savoir le délégué du GIC Afa’apon dans la commune de Babadjou, Brigitte Manto.
A sa suite, la responsable des ventes du GIC des Apiuculteurs et éleveurs Bamepa'ah (APEB), Charnelle Koubo, loue les initiatives mises en route dans le domaine de l’apiculture (élevage des abeilles, ndlr). « Nous avons eu des formations sur les bonnes pratiques apicoles, c’est-à-dire de la fabrication de la ruche à la récolte en passant par la pose. Nous avons également eu une formation sur la transformation des produits apicoles. Nous fabriquons les huiles de toilette, les bougies et le vin de miel pour pouvoir les commercialiser », a confié l’apicultrice.
D’après Rainforest Alliance, ce projet est venu à point nommé dans la zone des monts Bamboutos où la majeure partie de la population intervient dans l’agriculture (pomme de terre, carotte…) et à un moment où l’on note une flambée du coût des engrais sur le marché. « Avec les produits de notre environnement, nous sommes capables de relever le défi de la productivité. On aura des populations plus saines et un environnement plus sain », soutient Nadège Nzoyem.
Le renforcement du leadership des femmes, une priorité de l’Union européenne
« Avant que je n’intègre les activités du projet Women in COBALAM, je ne parvenais pas à mieux m’exprimer devant les hommes et les femmes ». Cette déclaration anecdotique de Brigitte Manto illustre l’impact positif du projet Women in COBALAM sur la transformation de l’image de la femme, l’intégration du genre et l’autonomisation des femmes, grâce à leur participation aux processus décisionnels et aux activités économiques durables à l’échelle du paysage. Considérant le fait que près 70% de femmes pratiquent l’agriculture dans les différents paysages des hautes terres de l’Ouest, l’objectif ici était de renforcer la participation des femmes aux instances de décision, d’améliorer les compétences techniques et stimuler la productivité des entreprises locales dirigées par des femmes, en mettant l'accent sur l'agriculture durable, les produits forestiers non-ligneux et les solutions en matière d'énergies renouvelables. Sur 3000 bénéficiaires ciblés, les activités devraient profiter à environ 1200 femmes.
« On a fait bouger les lignes. Le fait que les femmes aient plus de poids dans les instances de prise de décision me paraît très important. Elles ont aussi tout un rôle dans la gestion de leurs entreprises. Il était capital d’amorcer ce processus », a indiqué la représentante de la délégation de l’Union européenne au Cameroun, Claudia Antonelli, représentante de la délégation de l’Union européenne au Cameroun, par ailleurs responsable du programme forêt à l’UE-Cameroun.
D’après notre source, « l’Union européenne s’est engagée à ce qu’au moins 85% de ses actions considèrent l’égalité entre les femmes et les hommes comme un objectif significatif ou comme l’objectif principal ». Les trois priorités du plan d’actions genre de l’Union européenne au Cameroun consistent à : lutter contre les violences, pratiques nuisibles et discriminations basées sur le genre; promouvoir les droits économiques et sociaux et garantir l’autonomisation des filles et des femmes y compris dans l’économie verte et circulaire et promouvoir la participation citoyenne et le leadership des femmes en particulier pour la prévention et la résolution des conflits.
Les acquis du projet Women in COBALAM méritent d’être capitalisés
Globalement, martèle Nadège Nzoyem, les objectifs d’intégration ont été atteints. Si le financement de l’Union européenne a pris fin le 31 juillet dernier, l’implication des femmes dans la gestion des paysages continue. « Il ne reste plus qu’à capitaliser sur les acquis, à les maintenir et étendre les actions à d’autres paysages/communautés, pour que cette intégration soit bénéfique pour la société camerounaise et l’environnement de façon globale. Nous allons consolider les acquis en matière d’intégration des femmes. Nous sommes en train d’identifier d’autres partenaires qui pourraient renforcer cette question d’intégration du genre », précise la responsable à Rainforest Alliance.
Position unanimement partagée par Claudia Antonelli selon qui une série d’actions vont se poursuivre avec les fonds du PNUE et du GEF. « Il faut continuer, solliciter les autres partenaires, les communes, les banques, les agences de micro-crédit, pour trouver des sources de financement pérennes. Nous sommes là pour impulser une dynamique. Il est à présent question de lire l’évaluation externe du projet, apprendre et utiliser ses leçons pour nos autres interventions et voir dans quelle mesure continuer à soutenir cette dynamique », conclut-elle.
19/11/24 à 15h53 GMT