Source : Onufemmes - 28 août 2012
Le marché central d'Honaria, dans les îles Salomon, était sale, bondé et célèbre pour ses actes criminels et de harcèlement - en particulier à l'égard des commerçants, en majorité des femmes. Pour beaucoup, le rendre accueillant pour les femmes était une cause perdue.
Pourtant, malgré les critiques et les détracteurs, une femme a pour la première fois été nommée responsable du marché, sur recommandation d'ONU Femmes. Constituant une organisation largement féminine de vendeuses et aidant ces dernières à identifier leurs problèmes et leurs besoins, la responsable, Mme Martha Horawipu, a été saluée pour son action visant à faire du marché un espace de travail plus sûr, plus sain et plus uni pour ses utilisateurs.
Dans les pays plus importants de la région Pacifique, axés sur l'agriculture - la Papouasie-Nouvelle Guinée, les îles Salomon, Vanuatu et Fidji - les vendeuses du marché ont depuis longtemps réussi à garder leurs familles et leurs communautés la tête hors de l'eau. Ici, vendre des aliments est souvent la meilleure manière de gagner des revenus en argent liquide, et les commerçants, dont 80-90 pourcent sont des femmes, font vivre une industrie aux chiffres d'affaires élevés.
Pourtant, ces femmes luttent contre leur invisibilité sociale et les risques personnels qu'elles courent sur leurs lieux de travail. Les vendeuses du marché travaillent 10 heures par jour en moyenne, et celles des régions rurales peuvent passer deux à trois jours sur place. Elles dorment souvent à la belle étoile, étant victimes de harcèlements, d'extorsions, de violences sexuelles et de maladies.
Elles travaillent sans bénéficier des services de base tels que les toilettes, les refuges, l'eau et les installations de cuisson, bien qu'elles paient une taxe quotidienne de présence sur le marché. Un grand nombre de vendeuses maintiennent leur routine de travail épuisante malgré les agitations sociales et les catastrophes naturelles, y compris lorsqu'elles sont enceintes et en train d'allaiter. Et jusqu'à maintenant, on ne leur a pas donné la parole sur la manière dont les marchés sont gérés.
En nouant un partenariat avec les gouvernements et les organisations des commerçants des marchés des pays du Pacifique, ONU Femmes travaille à rendre les espaces de marchés plus sûrs et plus adaptés aux commerçantes. Grâce à ce projet de Partenariat pour améliorer les marchés, l'organisation a enquêté, analysé et recueilli des informations sur la situation à laquelle sont confrontées les vendeuses du marché, et recommandé des changements de réglementations et de plans budgétaires. En nouant des partenariats avec les commerçants, elle a permis de renforcer leur mobilisation, leurs affaires et leur leadership.
" Les commerçantes des marchés soutiennent leurs communautés et les gouvernements autant que leurs familles individuelles, et elles devraient être appuyées en retour " souligne Elizabeth Cox, Conseillère technique principale au sein du bureau sous-régional d'ONU Femmes pour le Pacifique. " Les marchés sont un espace social et culturel particulier, et ils nourrissent les villages, approvisionnent les restaurants locaux et, par le biais des taxes, sont une source très importante de revenus pour les gouvernements locaux ".
A Honaira, par exemple, ONU Femmes aide Mme Horawipu, ses collègues de la Mairie et plusieurs milliers de commerçantes à réformer la gestion des principaux marchés de la capitale afin qu'elle tienne compte des questions de genre. En démontrant le leadership effectif des femmes et leur volonté d'agir, cela permettra de faire changer les mentalités traditionnelles sur la participation des femmes, au fur et à mesure du développement de la ville.
Les autorités de la Province de Shefa au Vanuatu ont également fait office de pionniers dans ce domaine au niveau local, s'engageant en faveur des objectifs du Millénaire pour le développement et de la Convention sur l'élimination de toutes formes de discrimination à l'égard des femmes.
Une partie du budget de la province a été affecté au développement de modèles de marché qui promeuvent les femmes à des rôles de leadership et de gestion. Avec l'appui d'ONU Femmes, ces modèles permettent aux commerçantes de diversifier leurs produits, clientèle, les lieux d'installation du marché et les structures de gestion. D'autres provinces ont exprimé leur intérêt en faveur de l'utilisation de ce modèle au sein de leurs propres marchés, prévoyant de le faire progressivement au cours des trois prochaines années. Dans le même temps, à Fidji, où de nombreux marchés ont été dévastés par de récentes inondations, huit municipalités travaillent avec les dirigeantes des vendeuses, sous la houlette d'ONU Femmes et du PNUD.
La ville de Ba a été la première à construire un marché adapté aux femmes, avec des cuisines, des toilettes, des douches et des places sûres et peu chères afin que les femmes vendeuses et leurs enfants puissent dormir. Un centre d'apprentissage et artisanal est en train d'aider à former à et à diversifier les compétences des vendeurs et d'augmenter leurs revenu, avec un dispositif " travail contre rémunération ".
D'autres projets de ce type sont en cours dans tout l'Etat insulaire. En protégeant la dignité, la sûreté et la sécurité qui ont jusque là été refusées aux vendeuses des marchés, ces initiatives constituent un nouveau départ stimulant, et la reconnaissance que la santé et la sécurité des femmes au travail est l'affaire de tout le monde.
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