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Afrique centrale et de l'Est : les hauts fonctionnaires et les experts de la CEA misent sur la recherche et l'innovation pour promouvoir de nouveaux procédés de production et accél



  • La plupart des pays de l’Afrique centrale et de l’Est sont en général dépendants des matières premières, principale source de leur croissance économique. L’analyse des économies de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) révèle qu’à 70%, les pays de cette zone ont des exportations concentrées sur un seul produit : le pétrole brut. Lorsqu’on évoque la République démocratique du Congo (RDC) sous le large format de l’Afrique centrale, on se rend compte que les ressources minérales constituent encore une fois la grande part de leurs exportations. « Ce sont des produits que nous exportons sans beaucoup valeur ajoutée et qui sont souvent sujets aux fluctuations des cours au niveau international. Cela fait que nos pays souffrent tous d’une certaine vulnérabilité macro-économique », a fait observer le directeur du Bureau sous-régional pour l’Afrique centrale de la CEA, Dr. Jean Luc Namegabe Mastaki. C’était le 15 octobre 2024, à l’occasion de la troisième session conjointe du Comité intergouvernemental des hauts fonctionnaires et d’experts de l’Afrique centrale et de l’Est de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA), qui se tient du 15 au 18 octobre 2024 à Yaoundé (Cameroun).

    Face à cette forte dépendance vis-à-vis des matières premières brutes, la recherche et développement (R&D) est proposée de plus en plus comme une option, pour donner une plus-value à ces ressources naturelles. « La recherche et innovation est le socle de l’industrialisation et de la diversification économique. La recherche-développement, qu’elle soit publique ou privée, permet de créer des produits et de promouvoir de nouveaux procédés de production qui vont nous amener vers des produits plus élaborés, plus complexes que nous manquons encore, mais qui vont nous amener aussi vers des produits plus compétitifs », indique Jean Luc Mastaki. La secrétaire exécutive adjointe de la CEA, Hanan Morsy, abonde dans le même sens en confirmant que l’innovation technologique est primordiale pour garantir une croissance inclusive et durable. D’où le thème général des travaux : « Mise en œuvre rapide des solutions de recherche et d’innovation pour accélérer la diversification économique en Afrique centrale et de l’Est ».

    L’objectif affiché est d’échanger sur les meilleures pratiques en matière d’innovation, de recherche et de diversification économique des Etats. Ce d’autant plus que l’innovation et la recherche sont des leviers à actionner pour créer de nouveaux procédés de production et de fabriquer de nouveaux produits de meilleure qualité et plus compétitifs. « La croissance économique moderne se résume en un processus continu d’innovations technologiques et la transformation structurelle pour les pays à faible revenu nécessite le passage des facteurs travail capital et savoir, des secteurs et activités à faible productivité vers ceux à forte productivité », précise le ministre de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire (Minepat), Alamine Ousmane Mey.

    Persistance des défis structurels

    Durant le dialogue de haut niveau de Yaoundé, les hauts fonctionnaires et experts passent au crible les défis auxquels la recherche est confrontée. L’un des challenges est relatif aux financements qui sont non insuffisants et non durables. « Nous sommes à moins de 0,5% de nos PIB en moyenne en Afrique centrale et de l’Est. D’autres pays sortent du lot, à l’instar de l’Afrique du Sud, du Rwanda qui fait des efforts, des pays maghrébins qui sont en train d’évoluer. Il va falloir que nos pays puissent investir davantage dans la recherche. Au-delà de la recherche publique, la recherche privée n’est pas très visible. Il va falloir promouvoir le secteur privé et l’encourager à aller vers la recherche pour promouvoir de nouveaux produits », souligne M. Mastaki. Or, la recommandation de l’Union africaine préconisait aux Etats d’allouer 1% de leur PIB à la recherche et développement. Le Cameroun est un cas pratique, avec le notamment le faible accès aux financements, avec des garanties élevées et des taux d’intérêt pouvant atteindre 15%.

    L’autre défi est relatif au système d’innovation qui comprend à la fois la recherche, les chercheurs, les liens entre l’innovation c’est-à-dire toute la procédure de brevets, de protection de droits de propriété intellectuelle et autres. Au Cameroun par exemple, le cadre de la propriété intellectuelle n’est pas propice à l’innovation. Le pays n’a enregistré que 200 dépôts de brevets en 2022.  

    L’enjeu ici est de disposer d’un système « coordonné » prenant en compte les inventeurs, afin qu’ils soient rémunérés sur la base de leurs inventions. L’autre défi enfin est la fuite des cerveaux qui ne sont pas rémunérés au niveau de leurs pays et sont davantage sollicités par les centres internationaux de recherche voire les multinationales. D’où la nécessité de mettre en place des stratégies qui permettent de développer les capacités mais aussi de les maintenir dans les sous-régions Afrique centrale et de l’Est.

    Urgence de mettre en place un écosystème favorable

    L’implémentation des initiatives de promotion de recherche et innovation est un travail de longue haleine. « L’innovation ne doit pas tomber du ciel. Elle est le résultat de tout un processus de planification et d’investissement. Nous avons choisi cette thématique pour cette année parce que nous sommes au terme de 10 années d’engagement pour l’agenda de la science, technologie, innovation et mathématiques. Après 10 ans, il est temps d’évaluer. Nous voulons saisir l’opportunité de cette rencontre et débats pour mettre sur la table le bilan fait. Ce bilan montre l’écart entre les pays de l’Afrique centrale et les autres parties de l’Afrique. Cela montre aussi un grand fossé en termes de réalisations, c’est-à-dire ce qui a été fait pour concrétiser les idées de millions de producteurs, d’entrepreneurs, d’industriels qui sont sur le continent », souligne le chef de section des initiatives sous-régionales au bureau sous-régional de la CEA pour l’Afrique centrale, Dr. Adama Ekberg Coulibaly.

    Les experts sont unanimes sur un fait : les idées sont disponibles mais elles sommeillent dans les tiroirs et peinent à être concrétisées en produits et services innovants. Il faut donc corriger cet écart. « L’innovation est importante dans la mesure où nous ne devons pas seulement compter sur ce que nous avons dans le sous-sol ou au-dessus du sol. Il faut plutôt s’arrimer à une nouvelle économie appelée économie numérique. Cela demande de penser à l’après-pétrole, l’après-or et à l’après-diamant. Cela passe par l’innovation. Mais vous ne pouvez pas avoir des innovations si vous n’avez pas investi de façon adéquate dans les infrastructures », ajoute l’économiste senior de la CEA.

    Les bons points du Cameroun en matière de recherche et innovation

    Lors de son discours d’ouverture du CIE 2024, le ministre camerounais en charge de l’Economie est revenu sur les prouesses de con pays en matière de recherche et innovation, précisant que le Cameroun est à l’avant-garde de la révolution technologique et industrielle en Afrique centrale. Des progrès significatifs sont visibles dans les secteurs de la manufacture et de la production d’énergie. Le secteur des TIC est en nette croissance. 45,6% de la population camerounaise était connectée à Internet en 2023, avec une augmentation de plus de 330 000 nouveaux utilisateurs, par rapport à la même période en 2022.

    Au regard du potentiel naturel du Cameroun, des initiatives sont en cours pour la mise en place d’une stratégie de l’économie bleue, afin de promouvoir une industrie durable. A travers cette démarche, le pays vise à augmenter ses capacités de recherche et d’innovation d’ici 2030, conformément aux Objectifs de développement durable (ODD). « Cela comprend l’augmentation du nombre de chercheurs et le financement de projets innovants dans des domaines comme les énergies renouvelables et les technologies propres, pour réduire l’empreinte carbone industrielle », martèle Alamine Ousmane Mey.

     

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