Dans un arrêt du 8 février 2012, le Conseil d'État se prononce sur un recours en annulation pour excès de pouvoir de l'article 2 du décret du 30 juillet 2008 portant classement du parc naturel régional du massif des Bauges.
L'Union des industriels de carrières et matériaux de construction Rhône-Alpes, qui est un syndicat professionnel patronal regroupant des entreprises exploitantes de carrières et productrices de matériaux de construction de la région Rhône-Alpes, conteste en effet ce décret en tant qu'il adopte les dispositions de la charte du parc naturel régional, qui imposent aux exploitants de carrière des obligations de procédure et de fond opposables aux tiers, méconnaissant ainsi la législation applicable aux carrières.
Le CE, considère qu'il résulte de [l'article 333-1 du code de l'environnement] que la charte d'un parc naturel régional est un acte destiné à orienter l'action des pouvoirs publics dans un souci de protection de l'environnement, d'aménagement du territoire, de développement économique et social et d'éducation et de formation du public sur le territoire du parc et à assurer la cohérence de cette action avec les objectifs qui y sont définis ; qu'il appartient, dès lors, à l'État et aux différentes collectivités territoriales concernées de prendre les mesures et de mener les actions propres à assurer la réalisation des objectifs de la charte et de mettre en oeuvre les compétences qu'ils tiennent des différentes législations, dès lors qu'elles leur confèrent un pouvoir d'appréciation, de façon cohérente avec les objectifs ainsi définis.
Néanmoins, il considère " que la charte d'un parc naturel régional ne peut légalement imposer par elle-même des obligations aux tiers, indépendamment de décisions administratives prises par les autorités publiques à leur égard ; qu'elle ne peut davantage subordonner légalement les demandes d'autorisations d'installations classées pour la protection de l'environnement à des obligations de procédure autres que celles prévues par les différentes législations en vigueur ".
Concernant les dispositions de la
Charte visant à encadrer l'activité d'extraction de matériaux sur le Parc, le
Conseil d'État considère qu'une telle activité " étant susceptible de provoquer
des nuisances environnementales et paysagères, une charte peut légalement
comporter des mesures précises la concernant, sous réserve de ne pas
méconnaître les prescriptions des autres règles applicables en matière de
carrières ".
Le CE annule donc les dispositions qui imposaient aux exploitants la
réalisation d'une " étude d'impact très détaillée avec l'élaboration d'une
étude paysagère et environnementale " qui devait " sortir du cadre du périmètre
de l'exploitation et disposer d'une analyse des impacts autour de
l'exploitation et en aval de la production ", ainsi que celles subordonnant toute
demande d'ouverture ou d'extension de carrière à " une étude complète portant sur la
logistique d'acheminement des matériaux intégrant les exigences des communes
traversées et la capacité des axes empruntés ". Il considère que ces
dispositions imposent aux exploitants de carrière des obligations
supplémentaires à celles prévues par la législation relative aux carrières.
Le CE considère par contre
légales les dispositions spécifiques aux carrières qui " se bornent à
déterminer des orientations de protection, de mise en valeur et de
développement ainsi que des mesures permettant leur mise en oeuvre, destinées à
guider l'action des différentes collectivités publiques intéressées dans
l'exercice des compétences qui leur sont reconnues par la loi sur le territoire
". En effet, "ces orientations et mesures particulières aux carrières n'ont pas
pour effet d'imposer par elles-mêmes des obligations aux tiers ".
Le Conseil estime que la Charte pouvait comporter de telles dispositions puisqu'elles
visent seulement "visent à limiter l'impact de l'activité d'exploitation de
carrières en terrasses alluvionnaires sur les ressources naturelles,
conformément à l'objet assigné aux parcs naturels régionaux par l'article L.
333-1 du code de l'environnement, aux termes duquel
les parcs "concourent à la politique de protection de l'environnement" et aux
orientations de la charte que ces mesures permettent de mettre en oeuvre ".
Le CE annule l'article 2 du décret du 30 juillet 2008 portant classement du parc naturel régional du massif des Bauges, et condamne l'État à verser à 3 000 euros à l'Union des industriels de carrières et matériaux de construction Rhône-Alpes.
[VEIJURIS]
Pour consulter l'arrêt (584 hits)