Les écosystèmes marins et côtiers fournissent aux humains de l’alimentation, de l’eau, des médicaments, des matériaux de construction, de l’énergie, des transports, de la protection des côtes et de la prévention de l’érosion, tout comme la régulation du climat, la production d’oxygène, la maintenance de la biodiversité, ainsi que des services récréatifs, esthétiques, culturels, religieux et spirituels. La valeur économique de ces écosystèmes est estimée en milliards de dollars par année.
Malheureusement, les activités anthropiques marines et terrestres menacent, détériorent et détruisent de plus en plus ces écosystèmes qui subissent les effets cumulatifs majeurs découlant des changements climatiques, de l’extraction non durable des ressources marines, de la modification du donné physique et de la destruction des habitats et des paysages marins et côtiers, ainsi que de la pollution marine.
Aujourd’hui, environ 30% des stocks halieutiques sont pêchés à un niveau non durable d’un point de vue biologique et sont par conséquent surexploités. Entre 20 et 35% des mangroves ont été perdus depuis 1980. Les récifs coralliens connaissent un déclin constant partout dans le monde depuis plus de 100 ans, et plus particulièrement depuis les 50 dernières années. Ce sont ces constats alarmants qui ont guidé les échanges au cours de ce dialogue sur le thème « Gestion, protection, conservation et restauration des écosystèmes marins et côtiers ».
Coprésident du dialogue, le Président des Palaos, M. Tommy Esang Remengesau Jr. a rappelé que son pays compte une large aire marine de 190 000 km2 d’océans, soit 80% du territoire national. Il a donc encouragé tous les États à ratifier tous les accords internationaux relatifs à la préservation des zones marines. Il a aussi plaidé pour des mécanismes de financement spécifiquement. L’autre Coprésidente du dialogue et Sous-Secrétaire d’État au Ministère de l’environnement, de la terre et de la mer de l’Italie, Mme SILVIA VELO, a compté 29 aires marines protégées couvrant 19,87% des eaux territoriales italiennes. Elle s’est targuée des partenariats de son pays avec les petits États insulaires en développement (PEID).
Le moment est venu de répondre à « l’appel des océans », a estimé Mme MARTHA ROJAS-URREGO, animatrice du dialogue et Secrétaire générale de la Convention de Ramsar sur les zones humides. La réalisation des cibles de l’objectif 14 du Programme de développement durable à l’horizon 2030 sur « la conservation et l’exploitation durable des océans, des mers et des ressources maritimes » permettrait de réaliser les autres 16 du Programme.
La Chine, a indiqué l’Administrateur adjoint de l’Organisme chinois pour les océans, s’est engagée à améliorer la réglementation de la gestion des zones marines dont le pourcentage ainsi que celui des sanctuaires marins a déjà augmenté. Quelque 235 institutions de surveillance gèrent plus de 8 000 stations d’observation produisant des milliards de données par an. La technologie du radar est utilisée pour surveiller les côtes. Le Gouvernement ne s’est pas arrêté là, il a aussi mis en place un système de quota pour les déchets déversés en mer. En outre, la restauration de certaines zones humides a permis le retour de 160 espèces animales qui avaient déserté ces sites. C’est un projet de création de récifs coralliens artificiels pour pallier la destruction des vrais qui a été lancé aux Émirats arabes unies, a dit le Ministre de l’environnement du pays. Le délégué de la Colombie, dont le pays est l’un des plus importants du monde en matière de diversité biologique marin, a d’ailleurs rappelé la proclamation de la Journée nationale de la protection des récifs coralliens. L’existence d’un sanctuaire de requis dans le Pacifique a été soulignée par le représentant du Secrétariat du Programme régional pour l’environnement du Pacifique.
Comment mettre en place des partenariats efficaces entre des secteurs traditionnellement distincts? a demandé l’animatrice. La Secrétaire exécutive de la Convention sur la diversité biologique est d’abord revenue sur les 20 objectifs d’Aichi relatifs à la diversité biologique qui constituent le nouveau « Plan stratégique pour la diversité biologique 2011-2020 » adopté par les États parties à la Convention en octobre 2010. Les 20 objectifs ont d’ailleurs été intégrés dans le Programme 2030. La Secrétaire exécutive a ensuite parlé des différents partenariats initiés par son Secrétariat, se félicitant du fait que désormais, la cible visant à placer sous protection 10% des zones marines d’ici à 2020 est désormais à portée de main. Le Premier Ministre des Îles Cook a en effet indiqué que son pays compte créer des aires marines protégées sur 16% de son territoire.
Pour la Secrétaire exécutive de la Convention sur la biodiversité, les partenariats doivent se baser sur une approche intégrée et impliquer gouvernements, chercheurs, société civile, secteur privé et autres. C’est un partenariat innovant de ce genre que le représentant de Monaco a décrit. Il a présenté un fonds fiduciaire que Monaco a initié avec des bailleurs de fonds privés et publics pour financer la protection des aires marines. Deux projets en Tunisie et au Maroc ont déjà pu bénéficier de cette initiative. Le Premier Ministre des Îles Cook est allé plus loin, il a suggéré la création d’un fonds mondial pour la protection des océans. La bonne santé des océans passe aussi par la pleine mise en œuvre de l’Accord de Paris sur les changements climatiques, a souligné la déléguée de la France.
S’il est unanimement reconnu que les partenariats sont cruciaux, comment s’assurer de la participation des communautés locales? La Directrice du Groupe de la coordination du programme et des politiques de l’Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources (UICN) a affirmé qu’à l’UICN, la plupart des projets sont mis en œuvre avec les communautés locales. Elle a parlé du projet « Les mangroves de l’avenir », mis en place il y a 10 ans dans 11 pays d’Asie du Sud et d’Asie du Sud-Est. Ce projet, qui a été mené avec la contribution active des populations locales, a permis de valoriser le tourisme et la pêche. Il faut toujours, a-t-elle insisté, chercher à autonomiser les communautés locales, en leur apportant tout l’appui nécessaire à la préservation des zones marines et côtières. En lançant les projets et les programmes, il faut privilégier « une gouvernance ouverte » qui tienne compte de la voix de tous et qui tend vers l’appropriation et la redevabilité locales.
Il faut en effet s’occuper de l’environnement sans oublier de prendre soin des gens qui y vivent, a acquiescé l’observateur du Saint-Siège. Ma communauté, a argué le Président de la Polynésie française, est considérée comme faisant partie des petits États insulaires en développement (PEID) même si elle se considère davantage comme vivant dans un grand pays maritime avec 5 millions de km2 d’eau. La Polynésie française est devenue en 2002 l’un des premiers sanctuaires de mammifères marins au monde. Ces efforts, reconnus mondialement, démontrent la valeur du travail des communautés locales qui ont même créé des aires marines gérées par des élèves qui éduquent ainsi leurs camarades.
Quand les populations locales sont impliquées, comment mesurer l’impact des interventions et les avantages socioéconomiques qu’elles en tirent? Le Responsable scientifique de Pêches et Océans (Canada), a d’abord souligné que trop d’agences et organismes dans le monde s’arrogent le droit « d’évaluer les océans ». Il faut qu’elles accordent leur violon parce qu’il est important de reconnaître que la mesure des progrès, des coûts, des bénéfices et de l’impact dépend du lieu où on se trouve. Que l’économie bleue, a-t-il prié, ne devienne pas « nouveau code » permettant aux pays développés d’utiliser les technologies les plus avancées pour exploiter les ressources marines à leur seul avantage. Il faut au contraire des mesures pour que l’exploitation des océans bénéficie aux plus vulnérables de la planète. Toutes les parties prenantes doivent pouvoir participer aux évaluations et ceci est crucial si l’on veut que les ressources marines soient exploitées de manière intelligente et avisée et que les bénéfices soient partagés par tous, a insisté le Responsable scientifique.
Les participants au dialogue ont tous convenus qu’il est essentiel de mesurer les changements dans les écosystèmes marins pour pouvoir élaborer des politiques de gestion informées. Par exemple, ce n’est qu’évaluant précisément et scientifiquement les ressources naturelles que les exploitants directs ou indirects pourront assurer à leur pérennité. Le représentant des Philippines a particulièrement insisté sur des données actualisées. Celui du Canada a d’ailleurs parlé de programmes de recherche que son gouvernement soutient. En plus de la science, il faut aussi savoir tirer parti des connaissances traditionnelles, ont plaidé plusieurs intervenants dont la représentante de « Drammeh Institute », une ONG basée à New York qui œuvre à la préservation des savoirs culturels ancestraux des populations d’ascendance africaine. L’ONG encourage les programmes de préservation des écosystèmes marins par le savoir endogène d’Afrique.
[ODD2030-14]
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