L'anéantissement biologique, grâce à la sixième extinction de masse signalée par les pertes de population des vertébrés, serait plus sévère que celle annoncée. C’est ce que cette étude, publiée par Gerardo Ceballos, Paul R. Ehrlich et Rodolfo Dirzo, démontre.
Parue dans la revue scientifique Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States, cette étude montre que, d'un point de vue quantitatif, la sixième extinction de masse de la Terre est plus sévère que celle que l’on perçoit si l'on regarde exclusivement l'extinction des espèces, comme le faisait, par exemple, le dernier rapport Planète vivante du WWF, paru en octobre 2016, et qui montrait que 58% des espèces de vertébrés avaient disparu entre 18970 et 2012.
Dans cette étude, les auteurs soulignent que l'accent mis sur l'extinction des espèces - un aspect critique de l'extinction biologique - conduit à une mauvaise impression commune selon laquelle le biote de la Terre n'est pas immédiatement menacé, mais qu’il entre seulement « peu à peu » dans une phase de perte majeure de la biodiversité, ce qui ne correspond pas à la réalité.
L’étude met plutôt en évidence l’anéantissement biologique que constitue la diminution des tailles des populations mais aussi de leurs aires de répartition, ce qui donne une image plus précise des tendances actuelles de déclin et d'extinction des populations.
Ces scientifiques ont cartographié la répartition géographique de 27 600 espèces de mammifères, d’amphibiens, d’oiseaux et de reptiles, chiffre qui correspond presque à la moitié des espèces connues de vertébrés. Ils ont aussi procédé à une analyse détaillée de l’évolution de 177 espèces de mammifères entre 1900 et 2015.
Selon ces chercheurs, 32% des espèces ont diminué, c'est-à-dire qu'elles ont diminué à la fois dans la taille et dans leur aire de répartition.
Chez les 177 mammifères pour lesquels les chercheurs ont des données détaillées, tous ont perdu 30% ou plus de leur aire de répartition géographique et plus de 40% de ces espèces ont subi des baisses de plus de 80% de leur population.
La conclusion que ces scientifiques tirent de ces données est sans appel : au-delà des extinctions globales d'espèces, la Terre connaît un énorme épisode de déclin et d'extermination des populations, déclin qui aura des conséquences négatives en cascade sur le fonctionnement des écosystèmes et des services essentiels au maintien de la civilisation humaine.
Ces chercheurs décrivent ce phénomène comme un « anéantissement biologique » pour mettre en évidence l'ampleur actuelle du sixième épisode d'extinction majeur de la Terre.
Gerardo Ceballos, Paul R. Ehrlich et Rodolfo Dirzo, «Biological annihilation via the ongoing sixth mass extinction signaled by vertebrate population losses and declines», Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States, 2017, vol. 114 no. 30,
http://www.pnas.org/content/114/30/E6089.abstract
WWF, Rapport Planète vivante 2016, risque et résilience dans l’Anthropocène : http://assets.wwffr.panda.org/downloads/27102016_lpr_2016_rapport_planete_vivante.pdf
http://assets.wwffr.panda.org/downloads/27102016_lpr_2016_rapport_planete_vivante.pdf (1094 hits)