Des appels à la mobilisation pour faire face à l’impact disproportionné de la cyberviolence sur les femmes ont été entendus aujourd’hui à la Commission de la condition de la femme qui menait, en parallèle du débat général, une évaluation de la participation et de l’accès des femmes aux médias et aux technologies de l’information et des communications (TIC), basée sur les exposés volontaires de 12 États Membres*. Les délégations ont aussi dressé un tableau plutôt sombre de la représentation des femmes dans les médias et dans la profession journalistique.
Propagation de messages haineux, sexistes et misogynes, harcèlement, intimidation, « trolling »**, diffusion d’images pornographiques et partages de photos de nus sans consentement, qui représentent les différents visages de la cyberviolence, ou « violence en ligne », ont notamment valu à la délégation de la Belgique de déclarer que « les TIC ont un effet négatif sur l’égalité des sexes ».
Face au constat que cette violence affecte les femmes d’une manière disproportionnée comparativement à la gente masculine, la délégation de l’Afrique du Sud a appelé à la mise en place d’un cadre légal approprié pour protéger les enfants de la propagation de contenus néfastes, ainsi qu’à la mise au point d’un enseignement capable d’aider les jeunes à faire un bon usage d’Internet et des communications électroniques. La Ministre de la femme de la Nouvelle-Zélande a appelé de son côté à mobiliser les jeunes, « les plus importants utilisateurs de technologie en ligne », citant notamment leur rôle dans la rapidité de la diffusion de la campagne #MeToo.
La présence des femmes dans les médias, où elles sont « très peu et très mal représentées », a aussi été vivement dénoncée par les délégations d’États Membres et plusieurs organisations professionnelles ou de la société civile.
Chiffres à l’appui, la Belgique a avancé que si la représentation des sexes dans les médias est plutôt paritaire quand il s’agit d’enfants, les femmes disparaissent de l’information dès l’âge de 19 ans, « pour ne plus y apparaître », notamment lorsqu’il s’agit de sujets économiques ou financiers et, dans une moindre mesure, pour l’information politique. En outre, 90% des experts interviewés dans les programmes d’information sont des hommes. À cela s’ajoute la situation au sein même des salles de rédaction où il y a « une sortie massive » de femmes à l’âge de 35 ans et où trois femmes journalistes sur quatre font l’objet d’intimidations ou de violences.
La représentation stéréotypée des femmes sportives a également été décriée, les couvertures de magazines sportifs faisant souvent la part belle aux hommes qui y sont présentés sous le jour de la puissance physique, alors que l’on met plutôt en avant les athlètes féminines comme objets sexuels, selon la Vice-Ministre de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse de l’Allemagne.
Du côté du contenu des programmes télévisuels de fiction, plusieurs délégations, à l’instar de la Tunisie et du Brésil, se sont inquiétées de l’emploi d’un langage violent qui dévalorise la femme. L’Allemagne a dénoncé pour sa part le fait que seulement 18% des subventions de films soient orientées vers des productions dirigées par des femmes, et que ces dernières se voient davantage confier des seconds rôles à l’écran.
S’agissant de l’accès aux TIC, la Ministre des pêches et de l’égalité des chances du Danemark a fait valoir que 27% des emplois futurs nécessiteront des compétences informatiques. C’est pourquoi les délégations ont insisté sur l’importance de la participation des femmes dans les filières science et technologie, s’inquiétant notamment de la pénurie d’expertise féminine en matière de TIC et du peu d’intérêt que les jeunes femmes portent à ce domaine, une situation que l’on peut imputer à la prévalence des stéréotypes.
Les femmes saoudiennes sont au contraire très intéressées par les cours en informatique et elles représentent 44% des diplômés dans les TIC, a fait valoir la Vice-Ministre du travail et du développement social de l’Arabie saoudite, le pays étant engagé dans un ambitieux projet de transformation numérique. Le Gouvernement doit toutefois déployer un vaste éventail d’incitations à l’embauche et à l’emploi, car seulement 13% des diplômées en TIC intègrent ensuite le secteur privé.
Les délégations africaines ont par ailleurs été nombreuses à vanter l’importance des TIC pour l’autonomisation économique des femmes, par l’entremise notamment du service M-Pesa, qui permet d’effectuer des paiements par téléphone mobile au Kenya. Au Rwanda, 84% des femmes ayant accès à la téléphonie mobile utilisent les modes de paiement mobiles.
Il existe aussi, au Kenya, un service d’obtention de documents administratifs en ligne, appelé « Huduma Kenya », qui a eu un impact notable sur l’allégement de la charge de travail des femmes. Les mérites du commerce électronique et les perspectives qu’il offre aux femmes ont aussi été salués, par le Sri Lanka notamment. Le Soudan a pour sa part indiqué que la télémédecine avait permis de pallier le manque d’accès des femmes rurales aux soins de santé de qualité.
Compte rendu de l'ONU (688 hits)