Le numéro 96 de la lettre NAPA nous parle de réserves de biosphère et de développement durable en Afrique. Elle rappelle le lancement de notre MOOC sur la gestion et la gouvernance des AP et du Master en gestion des AP. A noter aussi, un article sur le parc national de la Pendjari et l'emploi des drones...
Le numéro 96 de la lettre NAPA
Edito : Geoffroy MAUVAIS Coordinateur du Papaco
Ensemble, c’est mieux
Tout le monde connait la tragédie des communs (Garrett Hardin, 1968), dont d’ailleurs nous avions déjà parlé dans l’édito de la NAPA n°5, en février
2008. Elle décrit la surexploitation d’une ressource commune en situation de compétition entre divers utilisateurs potentiels. La ressource est en libre accès mais limitée et chaque utilisateur tend donc à essayer de l’utiliser au maximum à son profit et ce faisant, consomme la part qui pourrait servir à d’autres ; finalement, il met en péril la durabilité de la ressource. Ce n’est qu’une manifestation, très logique, de l’égoïsme humain.
Elle se passe à toutes les échelles bien sûr. Un champ collectif pourrait être rapidement sur-pâturé puisque tout éleveur du village aura intérêt à consommer d’abord ce fourrage commun avant celui de son propre champ. Un étang ouvert à tous sera promptement vidé de ses poissons puisqu’un poisson non pêché est un poisson qui sera pêché par autrui, pourquoi donc lui laisser ? L’air que nous respirons sera utilisé et pollué par ceux qui le peuvent, là où ils le peuvent (par exemple les pays industrialisés) tandis qu’on expliquera aux autres qu’ils ne devraient pas faire de même si on veut tous continuer à respirer ; ainsi cette ressource commune restera hors de leur portée – pas protégée pour autant d’ailleurs.
Hardin décrit trois solutions possibles pour contourner cette fatalité. La première est de nationaliser la ressource, c’est-à-dire d’en rendre l’Etat (la force publique) responsable. C’est une voie séduisante et efficace pour les ressources naturelles si les garants de l’Etat font effectivement leur travail avec honnêteté, ce qui n’est pas toujours le cas, nous en reparlerons dans la prochaine NAPA. La seconde solution est de privatiser la ressource, c’est-à-dire d’en rendre un individu ou un groupe d’individus responsables. C’est efficient si la gestion qui s’y applique respecte son aspect « commun » et prend en compte l’intérêt de tous. Enfin la troisième solution préconisée, c’est de communaliser la ressource, c’est-à-dire d’en rendre les acteurs locaux responsables. Les schémas de décentralisation le permettent dans certains cas, les approches de gestion participatives le tentent. Là aussi, tout reposera sur la qualité de la gouvernance qui se met en place.
Parmi les lecteurs de la NAPA, il y a ceux qui ne jurent que par l’Etat et sa force régalienne pour garantir la protection des aires protégées, biens communs s’il en est. D’autres répètent inlassablement que le secteur privé est plus efficace et seul à même de garantir la durabilité des ressources, pourvu qu’il en tire un bénéfice. Enfin, il y a les passionnés des communautés locales qui se persuadent que seuls les acteurs locaux ont une réponse aux problèmes locaux.
Tout cela est vrai, en partie au moins. La bonne recette est, on l’a déjà dit plusieurs fois dans diverses NAPA, sans nul doute l’addition de toutes les solutions ; tout le monde le comprend aisément, mais cela est très difficile. Difficile parce que chaque acteur se méfie de l’autre, voire le craint, et que la cohésion de l’ensemble, en un lieu, en un temps, est précaire. C’est pourquoi une bonne approche est peut-être de changer d’échelle et de plutôt tenter d’associer les acteurs dans des espaces complémentaires. C’est exactement ce que le modèle des réserves de Biosphère propose et que cette NAPA expose rapidement. Elles sont un même territoire avec différentes vocations – dont la conservation – associant différents besoins et différentes compétences, donc différents acteurs aux responsabilités qui s’ajoutent.
Ce n’est en somme qu’un schéma d’aménagement du territoire simple et constructif et lorsqu’il est bien utilisé – ce qui n’est malheureusement pas le cas dans certaines réserves de Biosphère d’Afrique ! - et bien il produit des résultats concluants. A méditer donc…
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