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Métropole en question métropole en action



  • XXVIe Rencontre nationale des agences d’urbanisme Grenoble, Lyon, Saint-Étienne, 13, 14 et 15 décembre 2005

    Selon l’économiste Pierre Veltz, les grandes villes ne se développent pas seulement parce qu’elles sont efficaces au plan économique, mais aussi parce qu’elles constituent des pôles d’attraction des populations au niveau international. Certains analystes estiment d’ailleurs que ce sont les activités économiques qui épousent désormais les dynamiques résidentiel-les, et non l’inverse.

    Face aux effets conjugués de la mondialisation et de la compétitivité économique, le temps ne serait donc plus tant à la concurrence acharnée entre les villes, qu’à l’alliance entre les territoires, aux réseaux de villes et à la mise en place de coopérations métropolitaines, fédératrices de dynamisme et d’attractivité.

    Forte de ce constat, la Fédération nationale des agences d’urbanisme a retenu pour thème de sa XXVIe rencontre celui des dynamiques métropolitaines et de la « métropolisation ». L’accélération de ce phénomène, facteur d’attractivité et de rayonnement pour les villes, est en effet source d’interrogations sur les équilibres institutionnels, sociaux ou environnementaux auxquels sont attachés les habitants, les acteurs économiques et les élus. La rencontre nationale, organisée « en réseau » par trois agglomérations françaises majeures – Grenoble, Lyon et Saint-Étienne –, s’efforcera de répondre aux multiples questions posées par cette évolution.
    La métropole « vécue »

    À Grenoble, sur le thème de la « métropole vécue », la rencontre s’attachera à la fois au territoire métropolitain lui-même – une réalité physique plus difficile à cerner qu’il n’y paraît de prime d’abord – et aux pratiques quotidiennes des habitants et des entreprises qu’il accueille. Qui sont donc ces « métropolitains », dont les choix de vie produisent à la fois des concentrations urbaines intenses et de grands territoires suburbains aux ambiances campagnardes et aux modes de vie néanmoins citadins ?

    Si la géographie métropolitaine ne va pas toujours d’elle-même, en revanche, et paradoxalement, la nécessité pour toute métropole de se définir une identité et une image fortes s’impose comme une évidence, parfois en décalage avec le vécu de la population. Le pouvoir d’attraction des métropoles réside dans leur capacité à générer une offre croissante, diversifiée et innovante dans tous les domaines de la vie urbaine, souvent en rupture avec les modèles traditionnels. Mais l’abondance des choix de vie possibles apparaît tout à la fois comme un moteur du développement métropolitain et un facteur de disparités.

    Pour faire face à ces contradictions, de nouvelles régulations publiques sont attendues. Car la « métropolisation » met au défi les acteurs politiques d’inventer un développement plus durable, à travers des formes originales de gouvernance et de coopération entre les collectivités et des outils de prospective, de planification et de projets adaptés.

    Plusieurs types d’interrogations se manifestent aujourd’hui :

    - Si l’identité est au cœur du projet métropolitain, c’est de son acceptation (ou de son rejet) que dépendront sa cohérence et ses chances de réussite. Comment cette image est-elle appropriée par les habitants et l’ensemble des acteurs d’un territoire ? À quelles conditions la métropole devient-elle un patrimoine commun, facteur de cohésion sociale et de dynamisme ?

    - Dans le cadre d’une offre métropolitaine sans cesse renouvelée, l’individualisation des pratiques et les nouveaux rapports au travail esquissent des territoires propres à chacun. Ils engendrent des formes de segmentation sociale reposant en particulier sur un accès inégal aux ressources de la ville. Sous quelles formes et à quelles échelles ces pratiques se développent-elles ?

    - Enfin, la compatibilité entre la dynamique métropolitaine et le développement durable n’est pas évidente. Elle suppose que soient bien évalués les risques liés à un développement économique et urbain insuffisamment maîtrisé et que soient créées des politiques de régulation à la bonne échelle. Quels modes de gestion et quelles formes de coopération faut-il mettre en place pour parvenir à un « développement métropolitain durable » ?
    La métropole « en projet »

    À Saint-Étienne, autour de la notion de « métropole en projet », la rencontre nationale s’interrogera sur la configuration de ces nouveaux espaces métropolitains et leur adéquation avec les projets qu’ils portent. Les contenus de projets apparaissent en effet très souvent liés aux ressources propres dont disposent les territoires et aux réseaux d’alliances qu’ils savent construire. Mais sont-ils pour autant adaptés aux véritables enjeux du développement métropolitain ?

    L’élaboration et le portage de ce « projet métropolitain » posent la question de la gouvernance et de l’ingénierie du territoire. Pour accroître son ancrage local, le projet doit aller à la rencontre des dynamiques de son « hinterland ». Les différents types de réseaux doivent être également mobilisés dès le stade de l’élaboration du projet, car il en va de l’efficacité de sa mise en œuvre. La capacité du pouvoir politique à mobiliser et à fédérer l’ensemble des ressources disponibles conditionne par conséquent très largement la réussite d’une stratégie de métropole.

    La rencontre nationale abordera cette dimension sous différents angles :

    - Entre mimétisme et différenciation, quels sont les contenus originaux de ces « projets métropolitains » au plan européen et mondial ?

    - Sur quelle ingénierie la construction des projets peut-elle s’appuyer ? Quel est le rôle spécifique des agences d’urbanisme dans ce domaine ?

    - L’émergence d’un « gouvernement politique » d’échelle métropolitaine est-elle une condition nécessaire pour transformer un territoire donné en véritable métropole ? La dynamique de projet peut-elle constituer une alternative à la lente structuration d’institutions politiques de gouvernance métropolitaine ?

    La métropole attractive et son « rayonnement »

    À Lyon, la rencontre nationale traitera des voies et moyens du « rayonnement métropolitain », qui est devenu la pierre angulaire de la compétitivité. Existe-t-il, en effet, des villes moyennes ou grandes et, a fortiori, des conurbations importantes qui n’aient pas l’ambition affichée d’ouvrir leur tissu économique à l’investissement international, de tourner leur culture locale vers les publics européens ou mondiaux, de mettre en valeur leurs atouts touristiques, de proposer une offre urbaine et de développer des « projets urbains » d’envergure internationale, de faire qualifier leur équipe sportive dans une compétition européenne, quand ce n’est pas de nouer des liens de solidarité et d’échange avec d’autres métropoles ?

    Il n’en a pas toujours été ainsi et chacun peut mesurer le chemin parcouru. Mais les atouts d’hier ne sont pas forcément les atouts d’aujourd’hui, voire de demain. Les concurrences entre les territoires, en s’exerçant sur des « terrains de jeux » de plus en plus larges, exigent des stratégies à la fois plus fines et davantage anticipatrices, voire opportunistes. La mondialisation économique, l’ouverture européenne, les enjeux de solidarité Nord-Sud, l’internationalisation des cultures et la place nouvelle des villes dans le monde font du rayonnement international des métropoles une question centrale des politiques urbaines.

    En tout état de cause, une métropole active suppose une attractivité et un rayonnement fort facilitant son positionnement au plan européen, voire mondial, valorisant son rôle dans la diffusion des valeurs économiques, culturelles et de la connaissance, et développant sa capacité d’attraction (investissements, entreprises, matière grise, étudiants, événements, tourisme…).

    Les questions nourrissant la réflexion demeurent nombreuses :

    - Faut-il se plaindre ou, au contraire, se féliciter de cette évolution, la tenir pour un destin, ou bien encore redouter l’indifférenciation des lieux et des cultures qui pourrait en découler ?

    - Comment jouer des cartes singulières dans le concert de la mondialisation ? D’ailleurs, la France et l’Europe ont-elles réellement des « atouts » ? Et qu’y a-t-il de nouveau – ou d’original – dans les pratiques des villes tournées vers des stratégies de rayonnement métropolitain ?

    - Comment définir globalement la spécificité des métropoles françaises ? S’agit-il d’un rayonnement davantage culturel et universitaire qu’éco-nomique ? Quelles performances supplémentaires ces métropoles devraient-elles cultiver ? Et quelles seraient les faiblesses à corriger ?

    Des défis pour l’action

    Ces questions constituent autant de défis pour l’action. La XXVIe Rencontre nationale des agences d’urbanisme en proposera une lecture originale, tant par les croisements thématiques qu’elle facilitera que par les modalités de travail et d’échanges prévues dans les trois agglomérations organisatrices. Il s’agit non seulement de contribuer à approfondir l’analyse de la « métropolisation », mais également de mettre au débat les moyens d’une action efficace en matière de dynamisme, de coopération et de rayonnement métropolitains. Sans proposer de modèle unique ni de « prêt-à-penser », car il y a assurément plus d’un chemin pour y parvenir.
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