Culture paysanne de cocotier dans le Vanuatu
Dans les îles du nord du Vanuatu, le coprah – albumen séché de la noix de coco – constitue la première source de revenu. Mais le déclin actuel de la rentabilité du coprah et l’augmentation de la pression démographique et de la pression foncière incitent à chercher de nouveaux équilibres agricoles.
Le cocotier occupe une place prépondérante dans la culture et l’économie des îles du Pacifique. Dans les îles du nord du Vanuatu, le coprah – albumen séché de la noix de coco – constitue pour les paysans, la première source de revenu. Le déclin actuel de la rentabilité du coprah et l’augmentation de la pression démographique et de la pression foncière incitent à chercher de nouveaux équilibres agricoles. Aujourd’hui, les données existantes sur la culture du cocotier ne concernent que les plantations industrielles monospécifiques et uniquement dans les vingt premières années de la vie des cocotiers. Les données à la fois sur les systèmes de culture paysans et sur l’ensemble du cycle des cocotiers font défaut.
La multiplicité des associations culturales mises en œuvre sur les parcelles paysannes soulève des difficultés méthodologiques spécifiques pour caractériser et évaluer les systèmes de culture à base de cocotiers. Ces derniers ont par ailleurs un cycle biologique d’environ 80 ans, ce qui ne permet pas un suivi dans le temps. Evaluer la durabilité de ce système de culture demande ainsi à surmonter ces deux obstacles. C’est l’objectif que s’est donné Nathalie Lamanda au cours de sa thèse. L’étude a été réalisée sur l’île de Malo au Vanuatu.
Le cycle de développement complet des systèmes de culture paysans est reconstruit
Près de 200 parcelles de l’île ont été sélectionnées. Elles représentent une diversité de situations, au niveau tant des stades de développement des cocotiers que des plantes qui leur sont associées. Pour décrire ces parcelles, des outils appartenant à plusieurs disciplines ont été utilisés : des enquêtes avec support cartographique issues de la géographie, les enquêtes auprès des exploitants tirées de l’agronomie systémique et la notion de structure de la végétation empruntée à l’écologie.
En combinant les parcelles, il est alors possible de reconstruire le cycle de développement complet de ces systèmes de cultures mis en place par les paysans. On aboutit à deux principales chronoséquences et à la mise en évidence de leurs situations clés.
Encore immatures, les cocotiers sont en général, durant leurs cinq premières années en moyenne, associés à des jardins vivriers. Par la suite, ceux-ci sont progressivement abandonnés. Des cacaoyers, que les paysans ont la plupart du temps plantés dès le départ avec les cocotiers au sein des jardins peuvent alors se développer grâce à l’ombrage des cocotiers. Au moment de l’entrée en production de ces derniers, alors âgés d’une dizaine d’années, ceux-ci atteignent une hauteur suffisante pour ne plus être endommagés par le bétail. L’exploitant peut alors introduire des bovins sur sa parcelle. Il s’engage ainsi dans un système agropastoral. Lorsque ce n’est pas le cas, il conserve des cacaoyers et des espèces alimentaires au sein d’un système agroforestier. Enfin, lorsque le peuplement de cocotiers se fait vieux – 70 ans environ après sa plantation – on observe l’apparition de trouées liée à la disparition d’un ou plusieurs arbres. Il est alors possible de le régénérer, en plantant de jeunes cocotiers ou d’autres arbres ligneux entre les cocotiers plus âgés. Il arrive également que les exploitants installent des espèces vivrières rustiques telles que bananiers, papayers ou choux des îles, dans ces trouées. Ils créent ainsi des jardins d’appoint. C’est notamment le cas sur le littoral ouest, où la pression foncière est la plus importante et où les jardins sont les plus éloignés des villages.
Le système agropastoral est le plus répandu autour des villages. Dans les zones plus escarpées et moins propices au pâturage, c’est le système agroforestier qui domine.
Evaluer la production des systèmes
L’objectif a été également d’évaluer la production de ces systèmes à partir de chaque chronoséquence. C’est l’évolution de la production globale d’une parcelle qui est au centre des débats. Concernant le coprah en particulier, la production maximale se situe environ entre la vingtième et la quarante-cinquième année de vie du cocotier. Par la suite, elle décroît. Sur les parcelles paysannes, elle correspond à environ 65% de la production des plantations industrielles monospécifiques. Mais la production de coprah ne représente que l’une des composantes de la production des cocotiers. Il faut en effet ajouter la contribution des autres produits du cocotier : les palmes servant à la confection de paniers, les bourres et les coques sont utilisées comme combustible. En outre, à la différence des parcelles industrielles monospécifiques, la caractéristique des parcelles paysannes est aussi d’associer la culture du cocotier à celle d’autres espèces herbacées (bananiers ou tubercules) et/ou ligneuses (arbre à pain, manguier, etc). L’accès à la lumière, l’encombrement racinaire et la fertilité physico-chimique du sol sont alors autant de clés pour le fonctionnement de systèmes agroforestiers, caractérisés par des mesures de terrain ou des modèles en trois dimensions du peuplement de cocotiers.
Ce travail permet d’envisager la modélisation de la dynamique des systèmes de culture agroforestiers à base de cocotiers. Une thèse sur ce sujet débute actuellement. D’autres travaux sont en cours pour évaluer plus précisément les performances de ces systèmes.
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