Par Cheryl Pellerin
Rédactrice
Washington - Les gaz à effet de serre menacent la santé et le bien-être du peuple américain : c'est ce qu'a déterminé, le 7 décembre, l'Agence des États-Unis pour la protection de l'environnement (EPA), à la conclusion d'un contentieux qui traînait depuis une décennie sur son autorité légale de limiter les émissions de dioxyde de carbone et d'autres gaz en tant que polluants en vertu de la loi sur la salubrité de l'air (Clean Air Act). La controverse avait fait son chemin jusqu'à la Cour suprême.
La décision à deux volets reconnaît, primo, que six gaz à effet de serre constituent des polluants atmosphériques et, secundo, que les nouveaux véhicules contribuent à cette pollution et par conséquent aux changements climatiques. Elle a été annoncée alors que s'ouvrait à Copenhague la Conférence 2009 des Nations unies sur les changements climatiques au cours de laquelle 110 chefs d'État et 36.000 délégués et participants doivent décider du calendrier et des méthodes qu'adopteront les citoyens de la planète Terre pour faire face à un climat changeant.
" La décision annoncée aujourd'hui n'impose en elle-même aucune nouvelle norme sur l'industrie automobile ", a expliqué l'administratrice de l'EPA, Mme Lisa Jackson, lors d'une conférence de presse à Washington, " mais elle est le préalable de normes plus strictes pour les émissions des voitures et des camions ".
L'EPA a fait connaître en avril ses conclusions sur les différents gaz et a ouvert au public une période de commentaires de 60 jours. L'agence en a reçu et examiné plus de 380.000, suite à quoi sa décision sur les gaz considérés comme polluants est devenue définitive. Ces gaz sont le dioxyde de carbone ou gaz carbonique, le méthane, l'oxyde de diazote, les hydrofluorocarbures, les perfluorocarbures et l'hexafluorure de soufre.
En septembre, l'Agence pour la protection de l'environnement et le ministère des transports ont proposé de nouvelles normes sur les émissions de dioxyde de carbone pour les véhicules légers qui seront fabriqués de 2012 à 2016, notamment les voitures, les véhicules utilitaires, les camions personnels légers, les fourgonnettes et les monospaces. Ces deux administrations ont établi les normes suggérées en réponse à l'appel lancé en mai par le président Obama en faveur d'une politique nationale plus activement centrée sur l'utilisation efficace du carburant.
Les automobiles sont responsable de plus de 23 % des émissions de gaz à effet de serre aux États-Unis. Les normes proposées par l'EPA pour les véhicules légers, qui représentent près de 60 % des émissions causées par les transports, réduiraient celles-ci de près de 950 millions de tonnes et permettraient de conserver 1,8 milliards de barils de pétrole pendant la durée de vie de ces véhicules.
Une voie longue et tortueuse
Maintenant que l'EPA a déterminé que ces émissions constituent un danger à la santé, elle peut, de concert avec le ministère des transports, mettre au point la version définitive des normes proposées relatives aux véhicules légers.
La décision est opportune du fait de l'attention que porte le monde entier aux gaz à effet de serre, mais elle découle d'événements qui ont commencé en octobre 1999 quand le Centre international pour l'évaluation des technologies (ICTA de son sigle anglais), qui est un groupe sans but lucratif, et 18 autres organisations avaient soumis une pétition à l'EPA, lui demandant de réguler les émissions de gaz à effet de serre des nouveaux véhicules, dans le cadre de la loi sur la salubrité de l'air, qui énonce les responsabilités précises de l'EPA en matière de protection de la qualité de l'air aux États-Unis.
L'EPA avait rejeté ladite pétition en 2003, indiquant que la loi mentionnée ne l'autorisait pas à réguler les gaz présents dans l'air si le but était d'atténuer les changements climatiques. En réponse, l'ICTA et 13 organisations écologiques de même que 15 États fédérés, territoires et municipalités soumirent des pétitions demandant à la cour d'appel fédérale à Washington d'examiner la décision de l'EPA, laquelle finit par prévaloir devant ce tribunal. Le contentieux fut alors soumis à la Cour suprême, avec l'État du Massachusetts comme plaignant contre l'EPA.
La plus haute instance judiciaire du pays rendit sa décision en 2007 en faveur du Massachusetts et des autres plaignants, disant que l'EPA avait bien l'autorité de réglementer les émissions de dioxyde de carbone et d'autres gaz à effet de serre, et ajoutant même que l'EPA avait agi de manière " arbitraire et capricieuse " en rejetant la pétition qui lui avait été soumise. La décision de la Cour suprême, adoptée par 5 voix contre 4, n'accordait à l'EPA la possibilité d'éviter de réguler les gaz à effet de serre dans le cadre de la loi sur la salubrité de l'air que si elle déterminait que ces gaz ne contribuaient pas aux changements climatiques. Deux ans plus tard, l'EPA concluait que lesdits gaz posaient en effet un danger à la santé publique et avaient des conséquences sur le climat.
Un plan de rechange
Les conclusions de l'EPA portent sur les émissions de gaz à effet de serre qui font l'objet d'études et d'examens approfondis depuis des décennies par des scientifiques internationaux. Mais tout le monde n'est pas convaincu que la réglementation est le meilleur moyen de résoudre ce problème.
" Ma réaction et celle de beaucoup d'autres, je crois, est que l'EPA a fondé sa décision sur des principes juridiques mais que ce n'est pas la bonne façon de faire face aux changements climatiques planétaires ", a dit à America.gov M. Kevin Trenberth, directeur de la division de l'analyse du climat au Centre national des recherches atmosphériques au Colorado, et auteur principal du rapport d'évaluation du Groupe intergouvernemental sur les changements climatiques. " Cette approche n'est pas exhaustive et elle est dépourvue de mesures d'incitation ou de sanctions. Elle est centrée sur les émissions (...) sans du tout s'occuper des questions d'adaptation ", a expliqué M. Trenberth.
" Dans un monde idéal, le Congrès aurait déjà adopté une loi sur le climat et sur l'énergie propre ", a déclaré M. Ron Burke, directeur de la branche pour le centre des États-Unis de l'Union of Concerned Scientists (un groupe de scientifiques préoccupés par les changements climatiques). M. Burke, qui a témoigné lors d'une audience publique de l'EPA, a ajouté dans un communiqué publié en novembre : " Malheureusement, cela ne s'est pas encore produit et la planète n'attendra pas. C'est pourquoi il est crucial qu'en attendant l'EPA tente de résoudre ce problème - qu'elle ait un plan de rechange au cas où le Congrès ne s'acquitterait pas de cette tâche. "
Le président Obama et l'administratrice de l'EPA, Mme Jackson, se sont tous deux déclarés en faveur de l'adoption de lois pour parvenir à une solution d'ensemble du problème des changements climatiques et souhaitent que le Congrès agisse dans ce sens, a indiqué l'EPA.
" Le problème des émissions de dioxyde de carbone est mondial, c'est pourquoi il est vraiment nécessaire de tenter de le résoudre dans le cadre international de la conférence en cours à Copenhague ", a ajouté M. Trenberth. " Il ne faudrait pas s'y prendre une industrie à la fois ou un pays à la fois parce que cela encouragerait certaines usines à aller s'implanter dans des États qui n'ont pas mis en vigueur des mesures pour réduire ces émissions. "
Source : Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat.
Site Internet : http://www.america.gov/fr/)
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22/10/24 à 11h20 GMT