Par Irin
Chaque
année, environ 200 millions de personnes à travers le monde sont affectées par
les catastrophes naturelles, dont 100 millions de femmes ou de filles, selon le
Bureau des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophes
(UNISDR).
Cependant, si l'Assemblée générale des Nations
Unies a adopté le
Cadre d'action
de Hyogo (CAH) - un plan d'action de dix ans qui vise à rendre le monde
plus sûr face aux catastrophes naturelles et qui appelle à l'intégration de la
perspective relative à l'égalité des genres dans les programmes de réduction
des risques de catastrophes naturelles %u2013 la plupart des pays n'ont pas encore
adopté de politiques sensibles au genre.
Selon les derniers rapports sur les progrès
accomplis dans la mise en oeuvre du CAH, entre 2009 et 2011, 62 des 70 pays
consultés n'ont pas collecté de données ventilées selon le genre sur la
vulnérabilité aux catastrophes naturelles et la capacité.
" Il est bien évident que les pays et les
communautés qui s'appuient sur la résilience et les solutions proposées par la
moitié de leur population sont voués à l'échec. Il faut réfléchir à la manière
dont chaque citoyen peut contribuer à ... la résilience et à l'élaboration de
mesures pour la réduction des risques de catastrophes ", a dit Kathleen
Cravero-Kristofferson, présidente de la Oak Foundation, lors du débat intitulé
" Women Making a Difference ", organisé à l'occasion de la quatrième
Plate-forme
mondiale pour la réduction des risques de catastrophe du 19 au 23
mai à Genève.
La plate-forme a été organisée pour évaluer
les progrès accomplis par le CAH et les problèmes rencontrés lors de sa mise en
oeuvre, et pour préparer l'agenda du développement post-2015. Les participants à
l'évènement ont également débattu d'un plan d'action de suivi %u2013 le CAH2 %u2013 qui
tiendrait compte de la question des femmes et du genre.
Mme Cravero-Kristoffersson a rappelé à
l'auditoire que le thème de la Journée internationale des risques de
catastrophes, le 13 octobre dernier, était " Les femmes et les filles, la Force
invisible de la résilience ". " Mais dans le monde d'aujourd'hui, et à l'occasion
de cet évènement, nous constatons que les femmes ne sont pas invisibles, nous
choisissons de ne pas les voir ", a-t-elle dit. %u2028Fatimetou Malick, membre du
panel et maire de Tevrah Zeina, en Mauritanie, partage cet avis. " Il est
important de ne plus voir les femmes comme des personnes vulnérables et de les
considérer comme des acteurs déterminants de la réduction des risques de
catastrophes ", a-t-elle dit. Elle est la seule femme élue maire de ce pays
d'Afrique, qui a été frappé par des sécheresses à répétition au cours de ces
dernières années.
Au
niveau local
L'étude préliminaire sur l'examen à
mi-parcours du CAH a montré que les organisations féminines locales sont
presque toujours exclues ou écartées des programmes de réduction des risques de
catastrophes (DRR) et de relèvement, bien qu'elles aient enregistré des
résultats positifs dans la réduction des risques auxquels les familles sont
confrontées quotidiennement.
Mme Cravero-Kristoffersson a souligné que
l'une des principales priorités du CAH2 sera d'établir une approche ascendante
et d'investir dans des initiatives lancées par les organisations féminines afin
de fonder la mise en oeuvre du CAH2 au niveau local.
" Il faut formaliser le rôle joué par les
organisations féminines dans les programmes de planification, de mise en oeuvre
et de suivi relatifs aux catastrophes et au changement climatique, et élaborer
des politiques et des mesures incitatives pour encourager les gouvernements
locaux et nationaux à construire des collaborations efficaces avec les
organisations féminines locales ", a dit Violet Shivutse, membre du panel et
activiste de l'association GROOTS, une organisation féminine locale de la
région de Kakamega, au nord-ouest du Kenya. %u2028Suite aux sécheresses et aux
inondations qui ont accablé la région, GROOTS a réalisé un exercice de
cartographie pour évaluer les vulnérabilités des habitants, établi des
coopératives de production agricole et testé des semences résistantes à la
sécheresse.
" Entre 2003 et 2005, nous avons constaté un
changement important du régime climatique. Dans la région, nous savons que la
période d'ensemencement est en mars, mais nous pourrions être touchés par les
sécheresses jusqu'en juin ou juillet ou recevoir des précipitations au début du
mois de janvier avant de préparer les terres. Cela représente un grand
changement. Une partie des récoltes a été détruite par les sécheresses ou les
inondations ", a indiqué Mme Shivutse. %u2028Ils ont ensuite établi des parcelles
témoins pour former les membres de la communauté, mis en place un système de
collecte des eaux de pluie en prévision des périodes de sécheresse et institué
un dialogue avec les institutions des gouvernements locaux pour échanger sur
les pratiques et les défis rencontrés.
L'égalité
dans la différence
La question de l'autonomisation des femmes et
de la garantie de leurs droits a également été abordée dans le contexte de la
DDR. Le Bangladesh veille à ce qu'environ 30 pour cent des bénéficiaires de
ses projets de DDR soient des femmes et le Cambodge se penche sur la mise en
place de quotas pour les femmes dans les programmes de DDR. En Palestine, les
autorités vont plus loin que l'égalité entre les hommes et les femmes, a
indiqué un participant originaire du Territoire palestinien occupé.
" Je n'aime pas l'idée selon laquelle nous
devons être les égales des hommes. Nous sommes complémentaires : je suis la
mère, la soeur et lui, c'est le père, le frère. Donc nous devrions travailler
ensemble pour construire la résilience et la paix dans notre monde ", a soutenu
Ekhlas Ratrout Aqel, maire de Naplouse en Cisjordanie.
" Il y [a] tellement
d'invasion[s] et de destruction en Palestine ; nous avons de l'expérience dans
ce domaine. En 2002, la plupart des villes de la Palestine ont été envahies et
nous avons travaillé ensemble - les docteurs, les ingénieurs, les hommes et les
femmes, tous ensemble ".
Selon les principes directeurs de l'UNISDR,
intitulés
Making Disaster
Risk Reduction Gender-Sensitive, un nombre croissant de pays
s'efforcent d'impliquer les femmes dans la gestion et la planification des
risques de catastrophes naturelles ; ils incluent les questions de genre dans
les programmes de réduction des risques et les programmes de réponse. Et grâce
aux efforts accomplis au niveau mondial dans la mise en oeuvre du CAH, les
listes de vérification en matière de genre et de diversité deviennent la norme
dans les programmes de préparation aux catastrophes naturelles dans le
monde.