Plaider dans un prétoire, procéder à une intervention chirurgicale, conduire un fiacre ou un taxi, piloter un avion, protéger la nation les armes à la main, construire un bâtiment... : ces activités peuvent-elles être exercées par des femmes ? Au début du XXe siècle, les journalistes, les députés, les ministres, les intellectuels et les romanciers, les chanteurs de caf' conc' ou les boulevardiers n'en finissent pas de débattre sur le droit et la capacité des femmes à exercer des métiers historiquement masculins. En cette Belle Époque du féminisme et... de l'antiféminisme, les premières doctoresses, avocates, cochères, chauffeuses d'autotax, aviatrices, charpentières, colleuses d'affiche se mettent à constituer un thème à succès pour les éditeurs des cartes postales, qui, à la veille de la Première Guerre mondiale, connaissent aussi leur âge d'or.
Représentant ces pionnières au travail dans la dignité de leur uniforme professionnel, ou mettant en scène des comédiennes burlesques et souvent dénudées incarnant des avocates, soldates ou députées imaginaires, les centaines de cartes postales réunies et commentées ici nous entraînent dans une exploration inédite : celle des mondes professionnels s'entrouvrant aux femmes à la Belle Époque, mais aussi celle des espoirs, des fantasmes et des craintes que suscitèrent ces nouvelles figures, susceptibles de troubler les rôles de genre traditionnels.
Juliette Rennes, Femmes en métiers d'hommes. Cartes postales (1890-1930). Une histoire visuelle du travail et du genre, Editions Bleu autour, 224 p., 29 euros. EAN : 9782358480444
22/10/24 à 11h20 GMT