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France : Bilan très mitigé pour la consultation publique sur l'EPR.


La Commission particulière du débat public sur l'EPR a dressé le bilan de la consultation engagée entre octobre 2005 et février 2006. Alors que la manifestation contre l'EPR a connu un certain succès le 15 avril dernier, le bilan du débat public s'avère, quant à lui, décevant.La Commission particulière du débat public sur l'EPR a dressé le bilan de la consultation engagée entre octobre 2005 et février 2006. Alors que la manifestation contre l'EPR a connu un certain succès le 15 avril dernier, le bilan du débat public s'avère, quant à lui, décevant.

Inscrit dans la loi d'orientation sur l'énergie et adoptée le 13 juillet 2005 par les parlementaires, l'EPR (technologie de réacteur à eau pressurisée) a été développé par Siemens et Areva, pour remplacer les 58 réacteurs nucléaires existant en France, à partir de 2012. Le débat public organisé sur ce sujet a d'emblée suscité une polémique : pourquoi lancer un débat alors que le projet a été, quoi qu'il en soit, entériné par le Parlement ?

Alors que certaines ONG dénoncent un débat tronqué, la Commission estime de son côté qu'elle"s'est efforcée de conduire un débat utile, tant pour les enseignements du débat proprement dit que pour les avancées qu'il aura permis pour l'avenir (...). Par habitude, ou par crainte, la parole n'est en effet pas encore totalement libérée sur le sujet sensible du nucléaire, mais ce débat aura justement permis de commencer à modifier cette situation."Elle reconnaît cependant que les délais de préparation et de débat ont été trop courts pour mobiliser les Français sur un sujet aussi complexe."Un débat de quatre mois peut-il avoir du sens par rapport à une décision qui engage l'avenir à tout point de vue sur des dizaines et des dizaines d'années ?"s'interroge la Commission dans son rapport.

Outre les questions d'organisations, ce sont surtout le choix des sujets abordés et le manque de transparence qui ont suscité des relations houleuses avec les ONG et les associations pendant ces quatre mois. Pour CAP 21,"les conditions tronquées du débat public, l'absence de transparence se posent de manière accrue sur toutes les questions relatives au nucléaire civil comme en a témoigné le pseudo débat sur l'EPR". De leur côté, Agir pour l'Environnement, les Amis de la Terre, France Nature Environnement, le WWF et Greenpeace avaient dénoncé la teneur des premiers débats publics qui se sont tenus à Bar-Le-Duc et à Cherbourg notamment.

"Pratiques abusives de secret"

Si elles ne remettaient pas en cause le débat public lui-même, les ONG accusaient en revanche le gouvernement d'avoir classé, en août 2003, toute information relative aux matières nucléaires"secret défense", limitant ainsi la crédibilité et la transparence du débat public. Dans une lettre adressée au Premier ministre, elles faisaient état de la"frustration"engendrée par le débat public, qui ne répondait pas aux questions touchant les risques d'attaques terroristes sur les installations nucléaires, ainsi que le niveau de résistance du futur réacteur EPR à la chute d'un avion de ligne... Une réunion arbitrée par la Commission nationale du débat public, rassemblant le haut fonctionnaire auteur du décret sur le secret défense, la direction de la sûreté nucléaire, EDF et les ONG, avait réussi à faire revenir les ONG dans le débat... Un réchauffement des relations qui n'aura pas duré.

Le 13 octobre 2005, Greenpeace indiquait que"la proposition élaborée sous l'égide de la CNDP qui devait permettre à des experts indépendants d'accéder aux documents"secret défense"a été refusée par le gouvernement. Nos associations reconnaissent la bonne volonté, et le courage de la CNDP mais ne participeront pas à un débat n'apportant pas toutes les réponses aux citoyens."Pour l'ONG,"le débat a sans aucun doute permis de mettre sur la place publique les pratiques abusives de secret et non-transparence des administrations et entreprises françaises du nucléaire. La Commission s'est attachée à faire progresser la situation. Ses travaux ont permis de clarifier les bases légales du"secret"et d'en cerner un peu plus clairement les limites et faiblesses face à l'évolution du droit en matière d'accès à l'information."

"Participation décevante"

La Commission reconnaît que les débats auraient pu être plus cohérents et plus efficaces, mais, souligne-t-elle"eu égard aux efforts déployés et compte tenu du nombre de réunions réparties à travers la France, la participation peut paraître numériquement décevante : un peu plus de 4200 personnes, la plupart des réunions ne dépassant pas 200 personnes."Elle se félicite cependant d'avoir réussi à ce que"les problématiques de la production de l'énergie, mais aussi des économies d'énergie et des énergies renouvelables, ont souvent traversé le débat, renvoyant à des préoccupations beaucoup plus globales de consommation et de mode de vie."Autre aspect positif, EDF s'est engagé, suite au débat, à produire un rapport public concernant la sûreté du réacteur EPR, alors que seule une version technique interne était initialement prévue. Par ailleurs, la convention passée entre la Commission du débat public, EDF et le GSIEN (Groupement de Scientifiques pour l'Information sur l'Energie Nucléaire) a permis à ce dernier, moyennant un engagement de confidentialité, d'avoir accès à certaines parties du rapport préliminaire de sûreté couvertes par le secret industriel, souligne le rapport. Enfin, le groupe EDF s'est engagé à passer une convention avec la commission locale d'information de Flamanville et l'ANCLI (Association nationale des commissions locales d'information) pour l'étude de questions techniques sensibles.

Quel qu'en soit le bilan, le débat public n'aura pas freiné, bien au contraire, les manifestants"anti-EPR"qui ont défilé le 15 avril dernier à Cherbourg. Environ 20 000 personnes se sont en effet rassemblées à l'appel des associations, du Réseau sortir du nucléaire et des ONG. Corinne Lepage, présidnte de CAP 21, a estimé ce projet"inutile, onéreux et inopportun.""L'EPR n'apporte que peu de progrès par rapport à la génération précédente, il laisse en suspens des questions essentielles de sécurité, et n'assure même pas un intérêt économique pour les entreprises et les salariés français puisque la cuve du prototype finlandais sera réalisée au Japon."Les 3 milliards d'euros que coûte l'EPR"vont canaliser la quasi-totalité des fonds publics de recherche, alors même que l'industrie française de l'énergie renouvelable aurait besoin pour se développer d'un véritable effort de recherche et d'innovation,"a-t-elle souligné .

Source : http://www.novethic.fr

Véronique Smée

Mis en ligne le : 24/04/2006.
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