Le 9 avril 2010, la CJUE a été
saisie d'une demande préjudicielle par la Cour constitutionnelle belge concernant l'interprétation de la Convention d'Aarhus du 25 juin 1998, et de la
Directive " Habitats " du 21 mai 1992 (sur la conservation des
habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages), dans le cadre
de litiges opposant des riverains des aéroports de Liège-Bierset et de
Charleroi-Bruxelles Sud ainsi que de la ligne de chemin de fer
Bruxelles-Charleroi à la Région wallonne au sujet d'autorisations de travaux
relatives à ces installations.
Aux six questions qui lui sont posées par la Cour belge concernant ces deux textes, la CJUE, par son arrêt du 16 février 2012, apporte les réponses suivantes :
" 1) Si, pour l'interprétation des articles 2, paragraphe 2, et 9, paragraphe 4, de la convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement, conclue le 25 juin 1998 et approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 2005/370/CE du Conseil, du 17 février 2005, il est loisible de prendre en considération le Guide d'application de cette convention, celui-ci n'a toutefois aucune force obligatoire et n'est pas revêtu de la portée normative qui s'attache aux stipulations de ladite convention.
2) L'article 2, paragraphe 2, de la convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement et l'article 1er, paragraphe 5, de la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, telle que modifiée par la directive 2003/35/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 mai 2003, doivent être interprétés en ce sens que ne sont exclus des champs d'application respectifs de ces textes que les projets adoptés en détail par un acte législatif spécifique, de manière à ce que les objectifs desdits textes aient été atteints par la procédure législative. Il appartient au juge national de vérifier que ces deux conditions ont été respectées en tenant compte tant du contenu de l'acte législatif adopté que de l'ensemble de la procédure législative qui a conduit à son adoption et notamment des actes préparatoires et des débats parlementaires. À cet égard, un acte législatif qui ne ferait que "ratifier" purement et simplement un acte administratif préexistant, en se bornant à faire état de motifs impérieux d'intérêt général sans l'ouverture préalable d'une procédure législative au fond qui permette de respecter lesdites conditions, ne peut être considéré comme un acte législatif spécifique au sens de cette disposition et ne suffit donc pas pour exclure un projet des champs d'application respectifs de cette convention et de cette directive, telle que modifiée.
3) Les articles 3, paragraphe 9, et 9, paragraphes 2 à 4, de la convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement et l'article 10 bis de la directive 85/337, telle que modifiée par la directive 2003/35, doivent être interprétés en ce sens que:
- lorsqu'un projet qui entre dans le champ d'application de ces dispositions est adopté par un acte législatif, la question de savoir si cet acte législatif répond aux conditions fixées à l'article 1er, paragraphe 5, de cette directive, telle que modifiée, doit pouvoir être soumise, selon les règles nationales de procédure, à une juridiction ou à un organe indépendant et impartial établi par la loi;
- dans l'hypothèse où aucun recours de la nature et de la portée qui ont été rappelées ci-dessus ne serait ouvert à l'encontre d'un tel acte, il appartiendrait à toute juridiction nationale saisie dans le cadre de sa compétence d'exercer le contrôle décrit au tiret précédent et d'en tirer, le cas échéant, les conséquences en laissant inappliqué cet acte législatif.
4) L'article 6, paragraphe 9, de la convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement et l'article 9, paragraphe 1, de la directive 85/337, telle que modifiée par la directive 2003/35, doivent être interprétés en ce sens qu'ils n'exigent pas que la décision contienne elle-même les raisons pour lesquelles l'autorité compétente a décidé que celle-ci était nécessaire. Toutefois, dans l'hypothèse où une personne intéressée le demande, l'autorité compétente a l'obligation de lui communiquer les motifs pour lesquels cette décision a été prise ou les informations et les documents pertinents en réponse à la demande présentée.
5) L'article 6, paragraphe 3, de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, doit être interprété en ce sens qu'il ne permet pas à une autorité nationale, fût-elle législative, d'autoriser un plan ou un projet sans s'être assurée qu'il ne portera pas atteinte à l'intégrité du site concerné.
6) L'article 6, paragraphe 4, de la directive 92/43 doit être interprété en ce sens que la réalisation d'une infrastructure destinée à héberger un centre administratif ne peut, par principe, être considérée comme une raison impérative d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, au sens de cette disposition, de nature à justifier la réalisation d'un plan ou d'un projet portant atteinte à l'intégrité du site concerné ".
[VEIJURIS]
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