Par Dominic Cabrera-Gagnon, étudiant au baccalauréat en études politiques appliquées à l’Université de Sherbrooke
« Zabaltuna » ou « Vous nous avez envahis d’ordures ».
Si quelques hommes et femmes, ayant vécu en Tunisie il y a de cela 3000 ans, réapparaissaient aujourd’hui dans les rues de Tunis, ils adresseraient ce reproche à leur descendance.
Mohammed Oussama Houij, né à Tunis en 1991, a terminé ses études en génie sanitaire et s’est spécialisé dans la gestion des déchets, l’épuration des eaux usées et la protection de l’environnement. En entrevue avec la journaliste Ayda Labassi du HuffPost Tunisie, Oussama affirme sans retenue que le peuple tunisien « […] est carrément sur la route d’un désastre écologique, si ce n’est pas déjà le cas », et si l’on se fie aux plus récentes études, le jeune ingénieur n’aurait pas tort[1].
Selon un rapport de la Société allemande pour la coopération internationale (GIZ), rédigé en coopération avec l’Agence nationale de Gestion des Déchets de Tunisie (ANGed), la dégradation de la situation environnementale dans le pays du Maghreb se manifeste par une prolifération des déchets solides, des dépotoirs et des points noirs ainsi que par l’accumulation et l’envahissement de déchets le long des chaussées, des cours d’eau et des espaces verts (GIZ, 2014 :12). Le rapport, mis à jour en avril 2014, évoque d’ailleurs quelques causes de cette crise, situées à la fois au niveau étatique et entrepreneurial, et au niveau citoyen. La dissolution des conseils municipaux et ruraux, l’absence totale de contrôle des infractions environnementales et le désintéressement du secteur privé à investir dans la gestion des déchets ont nui à l’instauration d’une infrastructure efficiente dans la gestion de l’entreposage des déchets et leurs transports à travers les municipalités. Pour ce qui est des problèmes communautaires, l’absence généralisée d’un comportement écocitoyen et des connaissances de base concernant le recyclage, le compostage et le triage de déchet font que la population tunisienne a des lacunes importantes en matière de comportements écoresponsables[2] et ce sont ces lacunes que l’ingénieur Mohammed Oussama tente de corriger.
En plus d’être ingénieur, Mohammed Oussama Houij est également un adepte de photographie et de graphisme, et c’est en s’inspirant du Canvas Project qu’il a eu l’idée de combiner ses passions pour l’art et l’environnement. Le Canvas Project, un projet artistique consistant à transposer des personnages de peintures célèbres dans des photos illustrant des décors contemporains, là où Oussama se démarque. Ce dernier positionne les personnages peints par des artistes tels Eugène Delacroix, Mary Cassat ou Jean Leon tantôt devant des ruelles parsemées de déchets, tantôt devant un imposant dépotoir. Cet exercice artistique provoque donc chez le témoin des œuvres un mélange de consternation, de confusion et de dégout, et c’est sur cet effet de catharsis que le jeune tunisien mise pour provoquer des changements au sein de la population[3].
Pour le moment, Mohammed Oussama poursuit sa campagne de sensibilisation, continuant de publier ponctuellement ses œuvres d’art sur les médias sociaux, et attirant au passage de plus en plus d’abonnés et d’amis qui l’encouragent à faire de son projet une campagne internationale, chose que le jeune homme considère. Mais, tous comprennent que le réel but de l’ingénieur devenu artiste, c’est qu’un jour ses publications puissent cesser et que ses pages Facebook ou Twitter n’aient plus raison d’être.
Labassi, Ayda, « «Zabaltuna», la campagne de sensibilisation lancée par un jeune tunisien en images », dans HuffPost Tunisie, consulté en 2017, URL http://www.huffpostmaghreb.com/2017/09/20/zabaltuna-tunisie-_n_18050958.html
Deutsche Gesellschaft Für Internationale Zusammenarbeit, Rapport sur la gestion des déchets solides en Tunisie, décembre 2013, p.12.
Zabaltuna, consulté en 2017, URL https://twitter.com/zabaltuna
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[1] Labassi, Ayda, « «Zabaltuna», la campagne de sensibilisation lancée par un jeune tunisien en images », dans HuffPost Tunisie, consulté en 2017, URL http://www.huffpostmaghreb.com/2017/09/20/zabaltuna-tunisie-_n_18050958.html
[2] Deutsche Gesellschaft Für Internationale Zusammenarbeit, Rapport sur la gestion des déchets solides en Tunisie, décembre 2013, p.12.
[3]Zabaltuna, consulté en 2017, URL https://twitter.com/zabaltuna
L'initiative jeunesse de lutte contre les changements climatiques a pour objectif de sensibiliser les jeunes francophones aux changements climatiques. Elle permet également de faire connaître les actions et l’engagement de la jeunesse francophone pour lutter contre les changements climatiques sous la forme d’une série d’articles.
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