Par: Agnès Béatrice BIKOKO et Paul OMBIONO
Une caractéristique essentielle de la vague de démocratisation qui s’est emparée des pays de l’Afrique au Sud du Sahara dans les années 1990 a été l’émergence d’une nouvelle classe de l’élite politique : Une élite qui prétend parler au nom et pour les citoyens.
Au Cameroun, la distance entre les politiciens et le citoyen lambda se crée davantage lorsqu’en 1991, alors que les camerounais revendiquent plus d’ouverture démocratique, la tenue d’une conférence nationale souveraine et les meilleures conditions d’étude pour la jeunesse, Paul Biya, Président de la République du Cameroun, déclare à la télévision nationale que « l’école n’est pas une arène politique. L’école aux écoliers, la politique aux politiciens ». Il s’en suivra une répression des forces de l’ordre contre les étudiants et autres manifestants. Cette déclaration n’avait donc fait que créer davantage de distance entre les citoyens et la politique. Depuis lors, beaucoup de camerounais considèrent la politique comme une activité dangereuse, réservée à une catégorie de personnes prêtes à se sacrifier face aux forces de l’ordre sans foi ni loi.
Ainsi, l’engagement politique des citoyens n’est perceptible que pendant les élections, période autour de laquelle l’élite politique vient solliciter les voix du peuple pour briguer un mandat électif. Or, les élections à elles seules ne suffisent pas pour faire la démocratie. L’enracinement de la culture démocratique n’est possible que si les citoyens eux-mêmes participent à la gestion de la cité et s’auto-organisent pour faire entendre leurs voix dans la marche des affaires publiques. Une société citoyenne doit donc être institutionnalisée et ouverte à la participation citoyenne, à l’opposé de la simple démocratie représentative. Pour qu’une telle société citoyenne se développe, il faudrait non seulement que les institutions de la démocratie représentative soient ouvertes et renforcées pour débattre des intérêts dans le sens d’un débat permanent, mais également que la société civile et politique participent à ces débats. La citoyenneté active doit être la force motrice pour tout changement politique, où le citoyen est au centre de toute prise de décision politique. Le mot d’ordre ici est l’exigence et l’extension de la participation de toutes les couches sociales à la prise de décision politique.
Toutefois, la citoyenneté active s’apprend et se pratique. Pour la Fondation Roi Baudouin : « L’activité citoyenne se définit essentiellement par son intention : au-delà d’un cercle familial ou amical, contribuer au bien-être d’autres individus ou de la collectivité dans son ensemble. Elle ressort d’une dynamique de la société civile, qui n’est ni commerciale ni partisane. Elle ne vise donc pas essentiellement un profit financier ou un intérêt particulier. En ce sens, elle est gratuite. Bref, l’activité citoyenne répond essentiellement à une éthique de la participation. Peu importe qu’elle soit bénévole, défrayée ou indirectement rémunérée dans le cadre d’un emploi ». A notre sens, il apparaît très clairement que l’école est le cadre idéal d’apprentissage de la citoyenneté. C’est le lieu par excellence d’apprentissage des savoir-être, des savoir-faire d’où notre interpellation de la communauté éducative à œuvrer pour une société plus citoyenne pour un développement durable et une société camerounaise plus démocratique.