La 34e édition de la Journée de l'Industrialisation de l'Afrique (JIA) a été célébrée le 20 novembre 2023 à Yaoundé au Cameroun, autour du thème : « Accélérer l'industrialisation de l'Afrique par l'autonomisation des femmes africaines dans la transformation pour un marché intégré ». La cérémonie présidé le ministre des Mines, de l'Industrie et du Développement technologique par intérim, Pr. Fuh Calistus Gentry, a révélé que le rôle clé des femmes dans l'industrialisation de l'Afrique, à travers leurs implications dans divers secteurs d'activités (industrie, économie, politique etc.). « Le Cameroun est fier de ce que dans son administration et dans la quasi-totalité des secteurs d’activités, les femmes sont bien impliquées dans la prise de décisions. Nous avons un bon rythme, conformément aux orientations de l’Union africaine et des Nations unies pour accélérer l’industrialisation de l’Afrique », a indiqué le ministre.
S’il est vrai que les activités menées par les femmes dans ce sillage contribuent à la création d'emplois et au développement du continent africain, il faut cependant noter que, selon un récent rapport de l'ONU, les femmes africaines ne représentent que 38% de la main-d'œuvre du secteur manufacturier. Une donnée statistique qui nécessite le renforcement de la participation des femmes au commerce intra-africain. « Accroître le nombre de femmes dans le secteur manufacturier est le moyen le plus sûr de maximiser la productivité et de veiller à ce que les bénéfices de la croissance industrielle parviennent aux familles et aux communautés des travailleurs et travailleuses du secteur », a souligné pour sa part le représentant-résident de l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel (Onudi), Raymond Tavares, lors de la lecture du message du secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres. Dans la lecture de la déclaration commune au nom des trois institutions de la CEA, l’Union africaine et l’Onudi, il est ressorti la mise en relief de l’autonomisation des femmes dans le contexte de l’industrialisation, de la transformation et de la mise en place d’un marché intégré (ZLECAf).
Le modèle d’industrialisation d’Afrique centrale cité en exemple
A l’occasion de cette activité, la CEA a fait une présentation sur le Plan directeur d’industrialisation et de diversification économique en Afrique centrale (PDIDE-AC). Il s’agit d’une boussole axée sur les chaînes de valeurs en exécution des recommandations de l’Union africaine (UA). Le document qui fixe le cap de la décennie de la diversification économique en Afrique Centrale (2021-2030) a été remis officiellement à la Commission de la Communauté économique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC) en juillet 2023 à Libreville (Gabon).
Le PDIDE est, faut-il rappeler, le résultat d’une étude approfondie de l’écosystème, des facteurs et des niveaux d’industrialisation en Afrique Centrale. Il est bâti sur une vision stratégique du futur visant à « faire de l’Afrique centrale une base de défense manufacturière de classe mondiale pour la transformation sur place des produits stratégiques et minéraux critiques, une plaque tournante de solutions énergétiques, logistiques et écologiques, un hub régional de recherche et d’innovation axé sur l’intégration et le partage des cerveaux et intelligences, des données et logiciels, des technologies et savoir-faire stratégiques ».
Il s’agit d’un Masterplan qui offre à la sous-région un cadre conjoint d’engagement pour une transformation structurelle accélérée des économies, basée sur l’exploitation durable des richesses naturelles et autres atouts des Etats. « Plus qu’un cadre conjoint d’engagement et de dialogue durable, le PDIDE-AC est avant tout une méga-stratégie industrielle et de diversification économique, multipolaire, multisectorielle et multi-acteurs », déclare le chef de la section des initiatives sous-régionales au Bureau de la CEA, Dr. Adama Ekberg Coulibaly. Par ailleurs, le PDIDE-AC structure l’ambition de l’Afrique centrale sur 16 chaînes de valeurs industrielles classées en deux groupes : les chaînes de valeurs industrielles à forte intensité de main-d’œuvre et les chaînes de valeurs industrielles à forte intensité capitalistique.
Sur le plan opérationnel, la diversification économique sera portée par des chaînes de valeur industrielles que sont les zones économiques spéciales de nouvelle génération (ZESNG) qui ont la particularité d’être inclusives et durables. Le recours à cette démarche cadre avec les recommandations des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine adoptées lors de la 17e session extraordinaire de leur Conférence tenue à Niamey au Niger le 25 novembre 2022. A travers le PDIDE-AC, l’Afrique centrale s’aligne sur l’agenda continental d’industrialisation et de diversification économique.
Après la validation technique à Libreville, il est question de vulgariser le PDIDE auprès du citoyen lambda, à travers une phase de formation, d’information, de sensibilisation et d’appropriation. Que ce soit au niveau du monde des entreprises, de la société civile, du monde universitaire. « La question d’industrialisation fait défaut au continent. C’est parce que nous n’avons pas réussi à comprendre et à appliquer l’industrialisation que la contribution du continent à la valeur ajoutée manufacturière est moins de 2% », fait observer le Dr. Adama Coulibaly de la CEA.
Selon le calendrier prévisionnel, la prochaine étape prévoit la convocation en mars 2024 de la conférence annuelle des ministres du Commerce et de l’Industrie des 11 pays de la CEEAC, pour faire adopter la stratégie au niveau des ministères sectoriels. Les recommandations issues de leurs travaux vont être soumises à la réunion des Chefs d’Etat.
Des contraintes politiques levées
Pour disposer d’un plan commun à la CEMAC et à la CEEAC, des défis ont été relevés. « Il a fallu user de persévérance et de patience pendant trois ans pour arriver politiquement à faire accepter que la CEMAC et la CEEAC aient une même vision et prennent un même véhicule et une même trajectoire pour arriver à la même destination », fait savoir le Dr. Adama Coulibaly. La difficulté du contexte politique a été levée. La CEA a réussi à équiper l’Afrique centrale et ses économies pour être armés et en finir avec la concurrence ruineuse et les crises à répétition. C’est un processus de dialogue durable qui a abouti à un produit (le PDIDE), c’est-à-dire une vision, des initiatives stratégiques au niveau communautaire adossées à des projets intégrateurs comme la raffinerie régionale que l’Afrique centrale n’a pas. C’est un processus de consultation itératif engagé par la CEA et qui a abouti, se réjouit Dr. Adama.