Interdiction des camions publicitaires : une pierre deux coups
La Ville de Montréal veut faire d’une pierre deux coups en explorant la possibilité d’interdire les camions publicitaires sur son territoire : réduction de la pollution visuelle et réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES).
Le Journal de Montréal rapportait en mai dernier que la Ville cherchait à trouver la manière d’interdire la circulation de camions publicitaires sans entraver le droit à la libre expression. La Ville pourrait ainsi emboîter le pas à la Ville de Québec qui a réussi à interdire les camions de publicité mobile sur son territoire. On parle ici des camions qui traînent d’immenses affiches rotatives.
La portée du geste demeure surtout symbolique mais il s’agit là d’un symbole important. Considérés par plusieurs comme superflue, la publicité attire les critiques lorsqu’elle devient envahissante. On peut aimer ou non sa présence dans la ville mais en général, les gens aiment pouvoir exercer un contrôle sur celle-ci. La mesure attirerait donc un capital de sympathie politique au responsable de l'environnement pour la Ville de Montréal, Alan de Sousa. Le Journal de Montréal rapporte que pour le conseiller municipal de Saint-Laurent, il s’agit d’un «gaspillage d'essence et une source de gaz à effet de serre à des seules fins de publicité, en plus de représenter une source de pollution visuelle évitable».
Pourquoi ne pas agir en effet ? Outre la sympathie des citoyens qu’elle attirera, l’interdiction des camions publicitaires est aussi bienvenue de la part de la communauté environnementale locale. Pour Daniel Bouchard, du Conseil régional de l’environnement de Montréal (CRE-Montréal), ces camions «consomme inutilement une ressource de plus en plus rare tout en détériorant la qualité de l'air et en participant aux changements climatiques». Monsieur Bouchard qui est responsable de campagne transport et développement durable au CRE-Montréal souligne que les camions en question «tournent en rond sur des trajets bien établis, généralement là où il y a déjà des bouchon de circulation, et nuisent aussi à la circulation déjà difficile».
Il est à parier que les règlements concernés seront ceux sur l’affichage et la publicité dont l’un des objectifs est de restreindre les zones autorisées à l’affichage. Les réglementations afférentes aux nuisances publiques seraient aussi pertinentes. Alan de Sousa a demandé au contentieux de la Ville d’étudier la réglementation qui permettrait d’interdire cette pratique. La Ville a un certain pouvoir qu'elle détient en matière de répression des nuisances par la Loi sur les cités et villes (L.R.Q., c. C-19), ainsi que par le Code municipal (L.R.Q., c. C-27.1). Ces deux instruments juridiques permettraient ici à la Ville de réglementer pour «définir ce que constitue une nuisance et pour la supprimer, ainsi que pour imposer des amendes aux personnes qui créent ou laissent subsister des nuisances» (Art. 463(1) de la Loi sur les cités et villes et Art. 546(l) du Code municipal).
Il est étonnant que les compagnies qui utilisent ce médium publicitaire ne se soient pas elles-mêmes retirées dans le contexte d’engagements envers le développement durable. Il appert que bon nombre de ces compagnies sont assez petites et ainsi moins soumises à la critique populaire.
Une des compagnies qui vend ce genre de média est Pro-Média publicité mobile. Sa devise est : «si vous manquez de visibilité». La compagnie fait la promotion des camions publicitaires en mentionnant qu’il s’agit d’un «excellent moyen pour capter l'attention des gens». Parmi ces clients passés: Rock-Détente, Le Salon emploi formation ou Chambly Chrysler.
Si l’innovation en matière de communication de messages publicitaires est une qualité recherchée par les consommateurs et les annonceurs, pour Pascal Beauchesne, fondateur du LabFoundation et éco-communicateur engagé, «la décence est de mise lorsqu’il est question de respect de l’environnement». Si Montréal est une ville très novatrice en publicité, la publicité alternative y a aussi sa place et offre une image contrastante avec certaines des aberrations critiquées par un segment de plus en plus important du monde communautaire. Pascal Beauchesne rappel l’exemple d’une compagnie d’affichage mobile à vélo créée il y a quelques années par Philippe Lamarche de Cycles Urbains, «une manière innovante de communiquer qui rejoint beaucoup de gens et ça, il y en aura de plus en plus» explique l'expert en communication.
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