Conseillère technique du directeur général du Centre Africain pour les applications météorologiques (ACMAD), experte récemment sollicitée lors de la 2de édition de l'école d'été de la Francophonie pour entretenir les jeunes leaders francophones sur les Changements climatiques et les défis auxquels le monde fait actuellement face. C'était à Ouagadougou (Burkina Faso) en août dernier. Madame Marie-Christine Dufresne a accepté se prêter à quelques questions portant sur la prochaine Conférence des Parties de Copenhague et surtout l’implication des jeunes. Lecture !
1) Quelles sont les chances d’aboutissement de la prochaine COP ? Quels sont les risques qui y sont liés ?
J’ai espoir en un aboutissement positif de la prochaine Conférence des Parties à Copenhague en décembre 2009. Cette conférence sera décisive si elle débouche sur un accord politique mondial majeur, à la hauteur des enjeux planétaires du changement climatique, solidaire et intégrateur, tout en étant juridiquement contraignant. L’objectif est l’accord sur un nouveau protocole à la Convention Climat, reprenant et intégrant les acquis du protocole de Kyoto (qui se termine en 2012), tout en allant plus loin sur les points qui le nécessitent. L’urgence est que cette inflexion vers cette trajectoire de long - terme se fasse immédiatement.
Le risque, et il ne faut pas le minimiser, c’est que les intérêts politiques et économiques nationaux l’emportent sur cette vision partagée mondiale et sur la volonté de réussir tous ensemble. Trois grands groupes de pays vont s’affronter, les pays les plus développés qui ne voudront pas supporter seuls la charge de la lutte contre les changements climatiques, les pays émergeants (Chine, Inde, Brésil…) dont la priorité est le développement économique et les pays en développement qui se considèrent victimes d’un changement dont ils n’ont pas été cause et qui demanderont des comptes aux autres pays.
2) Que peuvent attendre les Africains de cette rencontre ? Que doivent–ils exiger des grandes puissances, généralement indexées d’être à l’origine de la dégradation du système climatique universel ?
Les africains ont beaucoup à attendre et à exiger de cette rencontre car, il ne faut pas l’oublier, la majeure partie des pays africains sont des pays en développement qui seront victimes d’un changement dont ils n’ont pas été cause et qui demanderont des comptes aux autres pays et continents. Cependant, certains des pays les plus développés en Afrique ne voudront pas voir leur développement économique risqué d’être entravé par les limitations des émissions des gaz à effet de serre.
D’un commun accord, ils devraient exiger un soutien fort, mesurable et contraignant de la part des grandes puissances pour des actions d’adaptation aux changements climatiques pour les pays les moins développés et en même temps, pour un transfert de compétences et de technologies pour mettre en œuvre un développement économique durable s’appuyant sur l’utilisation d’énergies renouvelables (solaire, éolien…) et de techniques peu consommatrices d’énergie et peu émettrices de gaz à effet de serre (habitat, transport, énergie, agriculture…).
3) Comment à votre avis l’Afrique pourra-t-elle mieux se faire entendre au cours des négociations ?
Justement en arrivant à ces négociations de manière concertée et avec des propositions communes intégrant le souci majeur de tous les pays africains et prenant en compte les différents niveaux de développement de ces pays et des contextes climatiques, géographiques et économiques différents.
4) La jeunesse africaine réclame une représentation plus accrue à la Conférence des Parties. Quels sont vos commentaires à ce sujet?
C’est une excellente nouvelle et très prometteur pour l’avenir que la jeunesse africaine veuille participer aux débats qui vont décider de leur futur. Les jeunes sont les premiers concernés que ce soit par les risques climatiques et environnementaux qu’ils devront affronter tout au long de leur vie du fait du réchauffement planétaire que par leur participation future à un développement économique de leurs pays plus soucieux de l’environnement. On peut espérer qu’ils auront aussi une vision plus solidaire et intégratrice des réponses à apporter, prenant en compte l’intérêt général à moyen et long terme des populations concernées et moins les intérêts économiques à court terme de telle ou telle région ou secteur professionnel. L’ensemble des jeunes et pas seulement africains peut être un contre-pied nécessaire à la pression de certains lobbies économiques qui essayeront de peser sur les négociations en vue de protéger leurs intérêts immédiats.
5) Au-delà de la COP, quel rôle peut jouer la jeunesse africaine en matière de lutte contre le changement climatique ?
Leur rôle ne s’arrête pas à la préparation et une participation éventuelle à la Conférence des Parties de Copenhague. Ils ont à s’impliquer activement dans toutes les opérations de sensibilisation et d’éducation visant à lutter contre le réchauffement climatique, au niveau des communautés rurales, des décideurs politiques et économiques mais également dans les écoles, universités, auprès des associations… Ils peuvent aider à développer des outils de communication adaptés aux publics visés et ils doivent également veiller à mettre en œuvre dans leur vie de tous les jours les nouvelles pratiques conseillées.
Recueillis par Maxime DOMEGNI, Jeune Reporter
09/12/24 à 11h08 GMT