La 21ème Conférence des parties (CdP ou COP 21) de la Convention-cadre des Nations-Unies sur le changement climatique (CCNUCC) s'est achevée à Paris le 12 décembre dernier par un accord unanimement salué comme un succès en dépit des nombreuses questions restant en suspens. Ce résultat ambivalent vaut pour l'un des sujets vis-à-vis duquel des attentes fortes s'étaient manifestées avant et pendant la conférence, à savoir la place de la mer et des îles face au réchauffement climatique.
S'agissant de la mer, la Plate-forme Océans et Climat qui s'était fortement mobilisée sur la question espérait que le mot « océan » figurât pour la première fois dans un accord de ce type afin de souligner le rôle joué par la mer en tant que régulateur du climat. Alors que le mot ne figurait plus dans le texte de l'accord présenté la deuxième semaine, il a finalement été réintégré in extremis dans le préambule qui souligne la nécessité « d'assurer l'intégrité de tous les éco-systèmes, y compris les océans ». C'est sans doute plus une consolation qu'une satisfaction puisque, parallèlement, l'accord n'inclut pas la mer dans la liste des puits de carbone à conserver ou à développer, ce qui ne veut pas dire qu'elle n'en est pas un, l'accord renvoyant pour la définition de ces puits à la CCNUCC de 1992 qui inclut les océans et autres éco-systèmes marins.
Ce verre d'eau (de mer) à moitié vide et à moitié plein se retrouve également en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre dues au transport maritime. Même si celui-ci est un des moins polluants, il porte néanmoins sa part de responsabilité. Or, pas plus que le transport aérien , le transport maritime n'est pointé dans l'accord. Une mention figurait pourtant dans le texte de la deuxième semaine qui a disparu dans la rédaction finale.
S'agissant des îles, rien n'est dit spécifiquement à leur endroit sinon peut-être l'essentiel pour elles. En effet, l'article 2 de l'accord appelle à « limiter la hausse moyenne de la température de la planète nettement au-dessous de 2°C par rapport aux niveaux pré-industriels et (de) poursuivre l'action menée pour limiter la hausse à 1,5°C ». Or, cette dernière référence a été incluse pour répondre à la revendication portée par les 43 pays réunis au sein du Forum de la vulnérabilité climatique, c'est-à-dire, pour la plupart, les États insulaires menacés de submersion marine suite à l'élévation du niveau de la mer généré par le réchauffement climatique.
Est-ce à dire que l'histoire est désormais écrite, avec ses bons et ses moins bons côtés, et qu'il n'y a plus rien à faire ? Non, car la COP 21 est une étape, importante certes, mais qui est appelée à connaître des suites, de même qu'il existe d'autres lieux pour traiter des questions qui n'ont pas trouvé ici toutes leurs solutions.
Pour ce qui est de la reconnaissance du rôle de la mer face au changement climatique, il faut davantage se référer à la déclaration « Because the Ocean » signée par onze pays dont cinq insulaires avant la conférence de Paris rejoints depuis par onze nouveaux États dont quatre insulaires, la plus à même de déboucher, à partir de 2016, sur un plan d'action élaboré dans le cadre de la CCNUCC. De même, pour les émissions de gaz à effet de serre émanant de la navigation maritime, c'est à l'Organisation maritime internationale (OMI) de se saisir du sujet, même si un encouragement de la COP 21 aurait été apprécié.
Et puis, à côté des États, a été soulignée la formidable mobilisation de la société civile porteuse de l’Agenda des Solutions, c'est-à-dire des nombreuses initiatives venant des entreprises, des collectivités ou des associations et apportant des réponses, souvent innovantes, pour relever le défi du changement climatique. A cet égard, les îles, et singulièrement les îles francophones, ne sont pas les moins imaginatives comme l'a montré le bilan de leurs « bonnes pratiques » dressé par le Carrefour des acteurs sociaux (CAS) à l'orée de la Conférence de Paris.
La célèbre formule de Victor Hugo « la mer est un espace de rigueur et de liberté : qui oublie la rigueur perd la liberté » trouve ainsi une nouvelle illustration, la rigueur des îles étant plus que jamais garante de la liberté d'usage des océans.
11/12/24 à 13h46 GMT