En 2013, dans l'affaire « Les atocas de l'érable » J.E. 2013-1834 (C.A.), une partie d'une directive ministérielle du ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques du Québec avait été jugée illégale par les tribunaux. Comme conséquence de cette décision, les mesures de compensation écologique (restauration de milieux humides dégradés ou création de milieux humides) exigées par le ministère auprès de promoteurs immobiliers ou d'agriculteurs voulant obtenir un certificat d'autorisation pour réaliser un projet dans un milieu humide ou hydrique ont été déclarées illégales.
Les professeurs Sophie Lavallée, Monique Poulin et Stéphanie Pellerin (U. de M.) ont alors été mandatées par le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques pour soumettre 2 études qui ont permis de jeter les bases de la loi qui a été sanctionnée le 16 juin dernier (16 juin 2017).
Leurs études révélaient que 567 km2 de milieux humides ont été perturbés, dans les Basses terres du Saint-Laurent, entre 1990 et 2011. Ces études ont aussi révélé que plusieurs juridictions dans le monde exigent que les promoteurs évitent de développer des projets dans les milieux humides qui jouent un rôle important dans la prévention de l'érosion, la prévention des inondations, la protection de la qualité des eaux et sont aussi l'habitat d'une riche biodiversité.
Les tourbières sont aussi d'importants puits de carbone. La conservation de ces milieux humides permet d'éviter de nombreuses inondations et évite la construction dans des zones inondables. Aux États-Unis, en Allemagne et en Australie, lorsqu'un projet de développement a lieu dans un milieu humide, ses impacts doivent être réduits au minimum et l'État exige que le promoteur restaure un milieu humide comparable dégradé, ailleurs dans le bassin versant, ou créé un milieu humide comparable ailleurs. Des banques de milieux humides déjà restaurés ou créés existent. On les appelle « banques de compensation » et il s'agit d'un marché annuel de plusieurs milliards de dollars par an.
La Loi concernant la conservation des milieux humides et hydriques ne prévoit pas la création de banques de compensation, qui permettraient aux promoteurs de projets agricoles, immobiliers et industriels, d’acheter des unités de compensation auprès de ces banques, afin d’obtenir leurs autorisations du ministère de l’environnement pour leurs projets.
La loi prévoit plutôt que les promoteurs verseront une contribution financière dans un fonds, contribution qui variera selon différents facteurs, tels que la valeur du milieu et l’impact causé au milieu humide, et que ces contributions financières permettront au ministère de développer des programmes de restauration et de création de milieux humides pour compenser les pertes, avec l’objectif d’aucune perte nette.
Pour aller plus loin :
Loi concernant la conservation des milieux humides et hydriques sur le site du ministère : http://www.mddelcc.gouv.qc.ca/eau/milieux-humides/loi.htm
Lire aussi: Trois questions à Sophie Lavallée et Monique Poulin sur le projet de loi sur les milieux humides, Journal Le Fil, 15 juin 2017
Harold Levrel et al, Restaurer la nature pour atténuer les impacts du développement, Édition Quae, 2015, [en ligne : http://www.quae.com/fr/r4643-restaurer-la-nature-pour-attenuer-les-impacts-du-developpement.html]
Crédit Photo: Provancher et Carpentier, MDDELCC
09/08/24 à 08h48 GMT