Une des rencontres importantes de la biodiversité, la COP14, s’est tenue du 17 au 29 novembre à Sharm El-Sheikh en Egypte. Evènement majeur, certes, mais qui n’a fait pas déplacer les foules pour autant… Ce sommet est pourtant l’équivalent de la COP climatique : c’est l’occasion pour les gouvernements du monde entier de travailler sur différents enjeux et notamment sur l’avancée de l’application des 20 objectifs d’Aïchi 2020 (fixés en 2010 et inclus dans le Plan stratégique pour la diversité biologique) et plus récemment repris dans les 17 ODD (Objectifs de Développement Durable adoptés en 2015). Les premiers visent à réduire les pressions sur la biodiversité tandis que les seconds répondent aux défis mondiaux pour une société plus durable et en paix (enjeux liés à l’éducation, à la lutte contre la pauvreté, à l’érosion de la biodiversité, au climat, aux droits humains…). Rappelons-le encore : la biodiversité c’est la vie, c’est l’ensemble des espèces sur terre (dont les humains !) et les interactions entre elles qui leur permettent de survivre, d’évoluer, etc.
Alors que le changement climatique continue de faire la une de l’actualité (si l’on peut dire…), l’érosion de la biodiversité est timidement abordée. Pourtant, les 2 sujets sont intrinsèquement liés. Les variations du climat modifient la biodiversité et peut fragiliser les interactions entre espèces animales, végétales, microorganismes et les milieux dans lesquels elles évoluent. Et inversement, le climat est régulé par le vivant et sa diversité d’espèces aux niveaux local et global.
Lors de la dernière COP biodiversité, les Etats signataires ont adopté la déclaration de Cancún sur l’intégration de la biodiversité dans les politiques sectorielles (tourisme, agriculture, pêche, foresterie, extraction de matériaux de construction…) et les décideurs économiques se sont engagés à travers le manifeste de la Convention sur la Diversité Biologique à prendre en compte la biodiversité et les services écosystémiques dans leurs activités économiques. Ce traité international qui prend en considération l’érosion de la biodiversité fixe de nouveaux objectifs et cibles pour l’avenir. Couplé aux ODD, il constitue un cadre d’engagements forts pour la préservation de la biodiversité.
Les entreprises ont une part de responsabilité importante dans la mise en œuvre du Plan Stratégique et de l’atteinte de trois objectifs de la Convention sur la diversité biologique : la conservation de la biodiversité, son utilisation durable et le partage des ressources naturelles. Des actions sont attendues pour atteindre la plupart des objectifs à horizon 2020 ou 2030, et malgré quelques initiatives prisonnières comme Act4Nature – qui regroupe une soixantaine d’engagements d’entreprises françaises – cela reste de l’ordre du vœu pieux quand l’on voit la faible mobilisation des acteurs sur le sujet.
L'accélération de la transition vers une société durable est une opportunité pour la prospérité économique et l'emploi, aussi bien dans les pays développés qu’en voie de développement. Les avantages sont nombreux, à commencer par la maitrise des risques liés à ses approvisionnements, aux ressources naturelles et la protection contre des catastrophes naturelles, mais aussi la réduction de certains coûts ou externalités et les opportunités liés à l’émergence de modes de consommation responsables. Cette transformation des modèles économiques est impérative et doit se faire dans une approche globale de lutte contre l’érosion de la biodiversité, des changements climatiques et de mise en œuvre des ODD. On ne peut plus penser (et agir !) pour le climat d’un côté, la biodiversité d’un autre ou la pauvreté encore d’un autre !
Si les émissions de gaz à effet de serre ne diminuaient pas suffisamment, près de 50% des espèces qui vivent actuellement dans les régions les plus riches en biodiversité seraient menacées d’extinction d’ici à 2080, selon une étude de l’ONG WWF. Un pourcentage conséquent qui pourrait être diminué de moitié si l’on réussissait à maintenir la température moyenne en dessous de 2°C. Cet objectif semble difficilement atteignable par les Etats signataires de l’Accord de Paris (même si les intentions sont réelles), au vu des engagements pris lors de la COP21 qui nous placent plutôt sur une trajectoire menant à un réchauffement de 3,2°C. Quelles solutions ? Mener des mesures d’adaptation, changer nos modèles de production et stopper la consommation d’énergies fossiles. Comme le précise le rapport spécial du GIEC, il est encore possible de se limiter à 1,5°C, à condition d’avoir une action collective des collectivités et du secteur privé… et vite !
Par Sylvain Boucherand et Charles-Adrien Louis, cofondateurs de B&L évolution
[CdP24-climat]
17/10/24 à 09h35 GMT