Choix européens variables sur l'énergie hydrolienne.
Les océans sont en mouvement perpétuel. Les courants marins et les vagues produisent une énergie cinétique considérable qui peut, aujourd'hui, être transformée en électricité. Deux types d'appareils peuvent être utilisés : l'hydrolienne, une sorte d'éolienne sous-marine dont les pales sont actionnées par la force des courants, et le convertisseur de houle, qui capte l'énergie des vagues.Plusieurs engins ont été imaginés en Europe. Certains n'ont pas quitté la table à dessin, d'autres vendent déjà leur électricité. Leur potentiel énergétique et commercial varie considétablement d'un pays européen à l'autre mais la France semble déjà clairement en retard (voir article lié) .Les projets d'hydroliennes et de convertisseurs de houle fourmillent en Europe. Les plus avancés ont été lancés par des sociétés situées en Grande-Bretagne, qui détient le premier gisement européen d'énergie marine. Le ministère de l'Industrie britannique (DTI), préoccupé par le déclin de la production pétrolière offshore, a versé, depuis 1999, 85 millions d'euros pour encourager la recherche dans ce domaine.Parmi les entreprises lancées dans la production d'électricité d'origine marine, certaines ont atteint le stade du développement commercial. C'est le cas de la firme écossaise Ocean Power Delivery (OPD). Son Pelamis de 150 mètres flotte sur la surface de l'eau, et récupère l'énergie de la houle grâce à ses quatre cylindres articulés par des vérins. OPD a livré, en mars 2006, trois Pelamis de 750 kW à un consortium portugais, pour 8 millions d'euros. Leur mise en service doit intervenir bientôt.« Le Portugal a été le premier à faire de l'exploitation de sa ressource en houle une priorité, et à reconnaître son potentiel commercial », explique Richard Yemm, directeur général d'OPD. « Le gouvernement portugais a mis en place un marché d'intérêt local qui offre, pour l'électricité provenant des vagues, un prix plus élevé que pour les technologies matures, comme l'énergie éolienne. Cela permet de financer les premiers pas des projets et de faire avancer cette technologie. C'est exactement la même approche que celle qui a permis à l'éolien de décoller au Danemark et en Allemagne. »Si les trois Pelamis donnent satisfaction, 28 autres seront commandés avant la fin de l'année. Une fois déployés à 5 km des côtes portugaises, ils pourront produire 22, 5 MW, et alimenter 15 000 foyers.
Différents mode d'alimentations électriques
L'autre leader du secteur est Marine Current Turbines (MCT). La société anglaise est entrée dans la phase 2 de son programme de recherche, soutenu par plusieurs partenaires privés, dont EDF. Après avoir testé en mer d'Irlande, dès 2003, la Seaflow, une hydrolienne délivrant 300 kW, MCT s'est lancé dans la construction de la Seagen, une hydrolienne à double rotor d'1MW. Le prototype sera en fonction fin 2006, et d'ici 2009, une dizaine d'exemplaires seront installés. Puissance : 10 MW. Leur originalité ? La rétractabilité de l'hélice et du générateur : l'entretien a lieu hors de l'eau, et évite ainsi une coûteuse maintenance sous-marine.L'hydrolienne de Hammerfest Strom, elle, échappe à la construction de pylône de maintien. Elle est fixée sur un trépied de 120 tonnes posé sur le fond. La société norvégienne a été la première au monde à relier son Blue Concept de 300 kW au réseau électrique. L'examen de fiabilité a été réussi en 2002, le projet doit désormais passer au stade industriel, avec l'ouverture, fin 2008, d'une ferme de 20 hydroliennes d'une capacité totale de 10 MW.Beaucoup moins respectueux de l'environnement, le Limpet : un récepteur en béton construit sur le rivage pour récupérer l'énergie des vagues. Les Ecossais de Wavegen ont dû creuser une falaise pour l'installer. Le principe ? L'eau de la houle monte et descend dans une chambre étanche, comprimant l'air qui s'y trouve et entraînant une turbine. Depuis 2000, le Limpet fournit 400 foyers en électricité. Son potentiel commercial a séduit l'allemande Voith Siemens Hydro, qui a racheté Wavegen en 2005, et vient d'annoncer deux nouveaux projets, en Ecosse et en Allemagne.
Prototypes en tous genres
D'autres concepts, pourtant fiables, recherchent des partenaires pour leur développement commercial. C'est le cas de l'hydrolienne à axe vertical des Italiens de Ponte di Archimede (PDA). La turbine est installée dans une embarcation fixe sous laquelle est fixée une hélice tripale. Un prototype de 20 kW a fait ses preuves dans le détroit de Messine en 2003. PDA tente maintenant de convaincre des investisseurs.SMD Hydrovision aussi. Son projet Tidel a déjà reçu 4 millions d'euros du ministère de l'industrie anglais (DTI). Il s'agit d'une double turbine de 500 kW, flottant entre deux eaux, et ancrée au fond marin. Les deux hélices se placent automatiquement face au courant grâce à une aile de liaison. Leur rendement est ainsi maximal. Une maquette a été testée au New and renewable energy centre (Narec) de Blyth. Un essai grandeur nature doit suivre. Comme le Seagen, le Tidel peut être entretenu à l'air libre, en allongeant les câbles ancrés au sol.Le Wave Dragon, de l'entreprise danoise Lövenmark, a obtenu 2,4 millions d'euros du 6e programme européen pour la recherche. Dans ce convertisseur de houle, les vagues franchissent un plan incliné et déferlent dans un réservoir, entraînant une turbine. Après l'essai réussi du prototype, une expérimentation, en taille réelle, va débuter au large du Pays de Galles. L'engin, d'environ 200 m, pour 30 000 t, devrait délivrer 7MW.L'Archimedes Wave Swing (AWS), d'Ocean Energy, sert aussi de la force des vagues, mais différemment : un cylindre, rempli d'air, monte et descend sous l'effet de la pression de la houle, sur un pylône fixé au sol. Le mouvement généré est transformé en électricité (2MW). Les essais du prototype, en 2004, au large du Portugal, permettent à l'entreprise écossaise de fabriquer actuellement un AWS de deuxième génération, pour une mise en service en 2008. Soutenue par Alstom, Ocean Energy a reçu, en avril 2006, 3 millions d'euros d'un fond d'investissement.Lunar Energy n'a pas encore trouvé de partenaire important, mais a obtenu 8,2 millons d'euros du DTI pour son projet d'hydrolienne à cinq hélices, installée dans une conduite en forme de diabolo. L'appareil, conçu pour être le plus résistant possible, devra cependant être entretenu par des plongeurs ou un robot. Une maquette a été essayée en laboratoire, et un prototype sera immergé dans les eaux écossaises de l'Emec (European marine energy centre) avant la fin de l'année.Le Stingray, en revanche, est au point mort. Cette aile oscillante, posée au fond de la mer, et produisant 150 kW, a été testée en 2002 et 2003, puis suspendue par la société britannique The Engineering Business, faute d'investisseurs. D'autres projets, non évoqués ici, n'existent que sur le papier. Ils se concrétiseront peut-être lorsque la filière énergétique marine aura prouvé sa viabilité.
Source :http://www.novethic.fr
Rafaël Baldos
Mis en ligne le : 12/10/2006
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