Les catastrophes naturelles balayent-elles aussi le développement durable ?
L'association 4D (Dossiers et Débats pour le Développement Durable) organise, avec le concours de l’Association Française pour la Prévention des Catastrophes Naturelles, le jeudi 27 janvier 2005 à 17h30, un évènement spécial sous le thème :
« Les catastrophes naturelles balayent-elles aussi le développement durable ? »
Face au désastre de l’Asie du Sud, tous s’interrogent. L’ampleur du cataclysme amène notamment à s’interroger sur le développement de l’humanité et à se rappeler que plusieurs fois dans les temps géologiques la majorité des espèces vivantes a été détruite. Bien des espèces sont actuellement en voie de disparition : l’homme est-il invulnérable ? En tous cas la durabilité, elle, en prend un vieux coup ! D’autant que ce coup-ci, à la différence de la canicule, le changement climatique, et la responsabilité humaine qui en découle, ne sont pas à l’origine de la catastrophe
Nous avons vu que l’origine du tsunami était bien tellurique - un tremblement de terre sous-marin - et que nous ne disposons pas des capacités scientifiques pour prévoir les séismes. On sait dire où ils peuvent se produire, mais non quand ils vont arriver. Même si on en reste à l’aléa seul, le tsunami résulte de l’effet sur l’océan du déplacement de la faille, et il est possible de modéliser l’arrivée de la vague, donc de prévoir et d’alerter. Mais il faut aller plus loin. Un risque naturel se caractérise par la combinaison de l’aléa (i.e. le phénomène géologique générateur) avec la vulnérabilité (l’effet sur les installations humaines). Beaucoup de séismes importants passent inaperçus lorsqu’ils frappent des régions inhabitées. Ce qui caractérise un risque aujourd’hui, au plan de son impact, ce qui en fait une catastrophe, c’est bien l’exposition des hommes. Au point que l’une des conclusions de la décennie internationale pour la prévention des catastrophes naturelles (DIPCN), qui s’est achevée en 2000, a été de considérer qu’il ne fallait plus parler de « catastrophe naturelle ». Si l’aléa naturel existe, ce qu’on ne peut empêcher, c’est bien la vulnérabilité sociale qui transforme le phénomène en catastrophe.
Or pour l’essentiel nous savons quels aléas géologiques caractérisent telle ou telle zone du globe. Si nous ne savons pas dire quand se produira le séisme ou l’éruption volcanique destructrice, au moins pouvons-nous prendre des mesures de prévention et d’alerte. Il s’agit d’une part de mesures de surveillance, avec des réseaux de mesure, des modèles de calcul et des systèmes de transmission de l’information, et d’autre part d’éducation. Les gens doivent connaître les risques auxquels ils sont exposés pour pouvoir agir eux-mêmes. S’agissant des phénomènes géologiques - encore plus que pour les phénomènes climatiques - nous ne pouvons pas modifier l’aléa. Par contre, nous avons une large marge de manoeuvre pour agir sur la vulnérabilité.
Dans ce type de situation, frappé par un drame, la tendance naturelle est heureusement de prendre des mesures pour prévenir une nouvelle survenue du même phénomène. Après la canicule, on a équipé les maisons de retraites d’une pièce rafraîchie. Et il est possible que, un jour futur, l’océan Indien soit couvert d’un réseau d’alerte tsunami comme en est déjà équipé le Pacifique. Mais cela ne suffit pas. Le prochain cataclysme pourrait n’être ni la canicule en France, ni le tsunami en Asie. Nos prévisions sont toujours trop étroites, et nos réponses trop ciblées. Même lorsque l’on cherche à avoir une vue large, nos schémas sont beaucoup trop bornés par des modèles connus. Nos réponses trop ciblées. Il faut programmer le même effort en Méditerranée et dans les Caraïbes, pas mieux équipés pour l’alerte tsunami que l’océan Indien. Et il ne faut pas seulement surveiller les séismes, mais aussi les volcans et les glissements de terrains. Ou par exemple le grand glissement de terrain côtier déclenché par un petit séisme qui produira un tsunami… Et les grandes tempêtes et inondations qui provoquent des dégâts en augmentation rapide
Loin de balayer le concept de développement durable, la catastrophe nous incite à le muscler en le purgeant de l’illusion du développement sans accidents de parcours, en lui donnant un accent plus fort sur l’apprentissage à la suite des épreuves (le retour d’expérience qui permet d’en éviter de pires), en le dotant d’une plus grande ouverture sur des bifurcations inattendues et dangereuses (expertises alimentés par les capacités de questionnement des lanceurs d’alertes). Suivant les préconisations de Jean Pierre Dupuy - dans le sillage de Hans Jonas – il s’agit de mettre en pratique un « catastrophisme éclairé » : penser aux cas les pires, pour se donner les capacités de les conjurer. Il s’agit de mettre en application les principes de prévention et de précaution qui sont une des conditions de mise en œuvre du développement durable.
Le tsunami d’Asie a entraîné un élan de solidarité planétaire sans précédent. Comme si le nombre et la diversité de conditions des victimes « parlaient » plus spécifiquement à chacun! Il faut aller plus loin : par une mise en œuvre conjointe entre les états, les organisations internationales, les organisations scientifiques et les ONG, prendre l’engagement durable de mesures de prévention et d’exercices d’éveil au risque. Permettre à chacun, face aux risques qui caractérisent la planète, de prendre ses responsabilités, pour lui-même et vis à vis des autres. Sur ce chemin là, beaucoup reste à faire, non seulement en Asie ou en Afrique, mais aussi en France, qu’il s’agisse de l’hexagone ou des Antilles.
Intervenants
- Hormoz Modaressi (BRGM), de retour de la conférence de Kobé
- Judith Bourgeois (Croix Rouge française), de retour de la conférence de Kobé
- Pierre Henri Bourrelier (AFPCN)
- Michel Segard (MEDD - Direction de la prévention des Pollutions et des Risques)
- Fany Demasure (à confirmer -- Action Urgente Internationale, pour Coordination Sud)
La réunion sera animée par
- Jacques Varet, Vice-Président de 4D (et Directeur de la prospective au BRGM)
Date et lieu
27 janvier 2005
à 17h30
à la Chapelle des Récollets (Maison de l’Architecture) - Cité Européenne des Récollets - 148, rue du faubourg Saint-Martin 75 010 Paris
Métro gare de l’Est (Sortie Faubourg Saint Martin)
Conditions d'inscriptions
Entrée pour les non-adhérents à 4D : 3 € Correspondant aux frais de participation à la production et à l’envoi des actes
Pour avoir accès au lieu du débat, merci d’imprimer et de remplir la fiche ci-dessous, et la renvoyer par un moyen à votre convenance à :
Association 4D
Aïcha Debouci
« Cité européenne des Récollets »
150 – 154 rue du Faubourg St Martin - 75010 Paris
Tél. : 01 44 64 74 94 - Fax : 01 44 64 72 76
adebouci@association4d.org
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