Les enjeux budgétaires liés au droit communautaire de l'environnement
Rapport d'information du sénat n° 342 (2005-2006) de Mme Fabienne KELLER, fait au nom de la commission des finances, déposé le 10 mai 2006
Le constat : faute d'appliquer correctement le droit communautaire de l'environnement, la France s'expose à des pénalités financières importantes
- Le droit communautaire de l'environnement : un poids considérable - 85 % du droit de l'environnement français a une origine communautaire il a un impact important sur le budget de l'écologie : en 2006, la mise en oeuvre de Natura 2000 mobilise 40 millions d'euros en autorisations d'engagement et 25,4 millions d'euros en crédits de paiement ; dans le secteur de la politique de l'eau, la mise en place des directives communautaires représente près de 40 % des moyens d'engagement des agences de l'eau sur la période 2003-2006 (3,2 milliards d'euros).
- La Commission européenne a les moyens de le faire appliquer. Par exemple pour ne pas avoir exécuté un premier arrêt de la CJCE datant de 1991, dans une affaire de pêche de « poissons sous taille », la France a été condamnée à payer à la fois une somme forfaitaire de 20 millions d'euros et une astreinte de 57,8 millions d'euros par période de 6 mois : une somme répartie entre 5 ministères... (arrêt du 12 juillet 2005)
- La pression sur les Etats membres, notamment financière, s'est accrue
- La France est dans une situation difficile, en 2004, la France a été l'Etat le plus condamné pour manquement, l'environnement étant l'un des secteurs les plus porteurs de contentieux ;
La sénatrice Fabienne Keller fait 11 propositions pour remédier aux insuffisances actuelles :
Sensibiliser les agents publics et développer l'évaluation
1) sensibiliser davantage les agents publics à l'importance du droit communautaire dans le domaine de l'environnement et accroître, de manière générale, leur « culture communautaire » ;
2) dès le départ et tout au long de la procédure d'élaboration de la législation communautaire, réaliser des études d'impact, non seulement juridiques mais également budgétaires et organisationnelles - pour l'Etat comme pour les collectivités territoriales - afin de disposer d'une vision claire des enjeux et des difficultés éventuelles ;
3) en aval, développer systématiquement une analyse coûts/bénéfices des mesures communautaires dans le domaine de l'environnement, afin d'apprécier pleinement les effets de la législation communautaire dans ce domaine et d'en tirer les conséquences ;
Faire coïncider le temps national et les exigences communautaires
4) se saisir très en amont, dès les livres verts et les livres blancs, des propositions de la Commission, afin de peser réellement sur le cours des débats ;
5) adapter les modalités de transposition des directives, afin d'utiliser pleinement le délai de transposition et de banaliser les transpositions de directives ;
Renforcer l'analyse politique des projets de législation, en resserrant les liens entre les institutions
6) conforter la place du Parlement national au sein du processus d'élaboration des textes communautaires, en demandant, par exemple, à chaque ministre de présenter systématiquement les enjeux des propositions de législation communautaire devant la commission compétente et/ou la délégation pour l'Union européenne ;
7) renforcer les relations entre le gouvernement, le Parlement national et le Parlement européen, afin d'établir de véritables relations de travail entre ces trois acteurs, ce que la présence du siège du Parlement européen sur le territoire national devrait favoriser ;
8) associer davantage au processus d'élaboration de la législation communautaire les collectivités territoriales, qui supportent de nombreux coûts résultant de dispositions communautaires dans le domaine de l'environnement : le Sénat, représentant des collectivités territoriales, devrait jouer un rôle majeur en la matière ;
Revoir l'organisation actuelle pour assurer une application effective et rapide du droit communautaire de l'environnement
9) renforcer la coordination interministérielle, tant au niveau de la transposition des directives que de l'application des mesures communautaires : dans un contexte de dépendance du ministère de l'écologie et du développement durable vis-à-vis des services d'autres ministères, cet élément est essentiel pour atteindre l'objectif d'appliquer pleinement le droit communautaire ;
10) simplifier l'organisation des polices de l'environnement, aujourd'hui très éclatées ;
11) assurer, dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), un suivi systématique des actions entreprises par le ministère de l'écologie et du développement durable pour traiter les dossiers faisant l'objet de litiges.
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