L'arrêt d'Assemblée du 3 octobre 2008 constitue la première décision du Conseil d'Etat annulant un décret pour méconnaissance de la Charte de l'environnement de 2004.
Le Conseil d'Etat consacre la valeur juridique de " l'ensemble des droits et
devoirs définis dans la Charte de l'environnement ".
La charte de l'environnement est issue de la révision constitutionnelle du 1er mars 2005. Le Conseil d'Etat a reconnu la valeur constitutionnelle de l'ensemble de ses dispositions dont il juge que la méconnaissance peut être invoquée pour contester la légalité des décisions administratives.
Par sa décision du 3 octobre, le Conseil d'Etat se fonde ainsi sur l'article 7 de la Charte, qui consacre le principe de participation du public. Il affirme que " ces dispositions, comme l'ensemble des droits et devoirs définis dans la Charte de l'environnement, et à l'instar de toutes celles qui procèdent du Préambule de la Constitution, ont valeur constitutionnelle ; qu'elles s'imposent aux pouvoirs publics et aux autorités administratives dans leurs domaines de compétence
respectifs ".
Cette décision du Conseil d'Etat est en harmonie avec la décision du Conseil constitutionnel du 19 juin 2008 sur la loi relative aux organismes génétiquement
modifiés.
En l'espèce, le Conseil d'Etat annule pour incompétence un décret relatif aux lacs de montagne. Les grands lacs de montagne (lacs d'une superficie supérieure à 1000 hectares) sont en principe soumis à une double législation : la loi montagne, mais aussi la loi littoral. Les communes riveraines bénéficient ainsi d'un niveau élevé de protection. Le recours portait sur un décret d'application d'une loi qui visait à réduire cette protection (L. 145-1 du code de l'urbanisme) : elle prévoit que la loi littoral est applicable uniquement au sein d'un périmètre restreint autour du lac (périmètre qui reste à délimiter par des décisions particulières), et non plus sur l'ensemble du territoire des communes riveraines. La commune d'Annecy, qui souhaitait maintenir un haut niveau de protection, avait formé un recours contre ce décret. Le Conseil d'Etat annule le décret pour incompétence. Il résulte en effet de l'article 7 de la Charte de l'environnement que seul le législateur est compétent pour préciser les " conditions et limites " du droit de participation du public. Le décret, en intervenant dans ce domaine, a donc empiété sur le domaine de la loi.
La décision présente ainsi un double intérêt :
- la consécration solennelle de la valeur juridique de la Charte de l'environnement ;
- l'affirmation du rôle du Parlement dans le domaine environnemental.
[chenv]
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